Le lendemain, aux premières heures, Achlys se glissa hors du château. Les premiers domestiques commençaient à s’affairer en cuisine et ne la virent pas passer devant, aussi discrète que une ombre. Dans les rues, la ville s’éveillait doucement. Une femme se rendait au lavoir, une pile de linge sous le bras. Un jeune garçon sortait un cheval de l’écurie, les yeux encore bouffis de sommeil. Au loin, un coq chantait et son cri se répercutait dans les ruelles vides.
Achlys s’empressa de mettre rapidement de la distance entre le château et elle. Comme tous les matins, elle se rendait chez son oncle et comme tous les matins, elle devait passer devant le cimetière pour ça. En temps normal, elle ne s’y arrêtait pas. Elle détournait volontairement le regard du portail qui séparait les pierres tombales du reste du royaume, traçant une frontière entre les vivants et les morts. Elle continuait son chemin.
Seulement, aujourd’hui, elle s’arrêta.
Depuis l’enterrement de Olysseus, elle n’était jamais allé se recueillir sur sa tombe. Elle ne l’avait jamais entretenue, ni garnie de fleurs et elle était encore moins venue lui parler. Elle savait que Eamon venait régulièrement pour avoir surprit une discussion entre Kafale et lui, il y a quelques mois. Elle ignorait si ses parents venaient mais se douter que ça ne devait pas être le cas pour sa mère.
Une étrange sensation la poussa à bifurquer dans l’allée des défunts. Peut-être parce-que, le lendemain, elle allait disparaître. Peut-être parce-que cette fois, contrairement à la première, elle était préparée et avait peaufiné son plan depuis des mois. Elle n’échouerait pas et, par conséquent, elle ne reviendrait jamais. Peut être qu’elle avait besoin de lui dire au revoir.
La tombe de Olysseus se trouvait à l’écart du reste, non loin d’un saule pleureur dont les branches étaient si basses que le feuillage caressait l’herbe. La pierre miroitait doucement au soleil levant et plus elle s’approchait, plus elle sentait une boule grossir dans sa gorge.
Perdre son jumeau avait été l’expérience la plus douloureuse de sa jeune vie. Elle ne s’en était jamais réellement remise. En mourant Olysseus avait emporté une partie d’elle au passage. Son décès l’avait brisé en un million de petits morceaux qui n’avait pas pu être recollé.
Elle était née la première, à peine quelques malheureuses minutes avant son frère. Dès leur naissance, Basilius et Rhéa avaient su qu’ils étaient indissociables. Achlys hurlait à pleins poumons, plongeant dans des colères noires dès que on la séparait de Olysseus. De son côté, le petit garçon se mettait à pleurer, inconsolable, si il ne sentait plus la présence de sa jumelle à côté de lui. Jusqu’à leurs cinq ans, ils avaient dormit ensemble dans le même lit, faisant de terribles cauchemars si ils étaient seuls. Rhéa avait finit par les séparer de force, leur octroyant une chambre chacun, l’une à côté de l’autre. Ils avaient l’interdiction formelle de se rejoindre pendant la nuit mais Achlys n’avait jamais été une petite fille obéissante. Quand la lune était haute dans le ciel, elle se hâtait de se glisser dans le lit de son jumeau. Et là, se serrant l’un à côté de l’autre, ils chuchotaient à voix basse jusqu’à que le sommeil les emporte.
Cependant, dès leur plus jeune âge, les différences entre eux étaient flagrantes. Olysseus était un gamin renfrogné, taciturne et particulièrement silencieux. Toujours dans la lune, il semblait constamment perdu dans les méandres de ses pensées. D’un tempérament doux, il pouvait passer des heures assit à caresser les chiens faméliques qui arpentaient les rues de la ville en quête de nourriture. Achlys, elle, était belliqueuse, hargneuse et turbulente. En constant conflit avec elle-même, elle avait une sainte horreur de l’autorité avec qui elle entretenait des rapports houleux. Elle était celle qui avait toujours le dernier mot et Olysseus ne luttait jamais contre elle. Il se laissait prendre par la main et entraînait dans les nombreuses frasques de sa sœur.
VOUS LISEZ
AU NOM DE LA LOYAUTÉ, LA VENGEANCE VIENDRA
FantasyAchlys, future Reine du puissant royaume de Krigere, est une Princesse endeuillée qui n'aspire que à une seule chose : fuir le plus loin possible de sa terre natale pour trouver la liberté si chère à son cœur. Kaan, jeune Prince déchu, survit dans l...