32 jours.
J'ai mal.
Est-ce que cette phrase suffit pour exprimer à quel point ça fait des jours que j'ai l'impression de me consumer à petit feu ? J'évite de regarder, de toucher ou même de penser à sa porte, juste à côté de la mienne. Tout me ramène à Alex, pourtant, je dois me mordre pour ne serait-ce que penser une seconde à lui.
Évidemment, ça ne marche pas. Alors je me mords, une fois, une deuxième fois. Tant de fois que je ne peux plus les compter, mes mains devenues rouges. Si le but de Deliah était bien de tout détruire ce que j'ai pris du temps à construire avec Alex, elle a réussi, du moins en partie. Et ça tue.
Je ne peux plus l'approcher. Pas seulement parce que la sorcière me regarde mal à chaque fois et me menace de me garantir un voyage pour le monde des morts mais aussi parce que le voir à ses bras est trop pour moi. Alex est vraiment très bon comédien. Comme à cet instant où je descends les escaliers, le cœur serré par le stress tandis que nos regards se croisent avant qu'il ne rompt le contact visuel.
Il est doué pour jouer le rôle qu'on vient de lui attribuer. Il ne me regarde pas, ne fait aucun geste vers moi et m'évite proprement et efficacement à chaque fois que nous manquons de peu de nous retrouver côte à côte. Et ça, ça amuse Deliah, qui retrousse ses lèvres bien ourlées, une moue constamment fière imprimée sur son visage.
Comme à cet instant, quand elle m'observe, pour voir si je vais craquer, ou plier, exactement comme elle le souhaite. En quelques jours, j'ai eu le temps d'entendre ses mots tranchants, rien que pour moi. La jeune femme attend un moment en particulier : le jour où je signerai mon arrêt de mort. Chaque acte, chaque phrase, sont prononcés dans le seul but de me détruire. Même difficilement, mon cœur continue de survivre derrière sa cage thoracique, vulnérable mais toujours vivant.
— Je peux savoir pourquoi on est là, selon tes désirs ? Tu m'excuseras, même si je ne suis pas désolée, mais j'ai des choses à faire, plus importantes que de t'entendre ouvrir ta gueule, siffle Alexia.
Derrière moi, à peine descendue des escaliers, elle est déjà enragée à la simple vue de la sorcière. C'est la seule dans cette maison qui ose l'insulter pour la sortir de ses gonds ; et ça marche. Après tout, pourquoi la respecter, quand elle nous vole nos vies ? m'a plusieurs fois rétorqué ma meilleure amie. Je suis d'accord avec elle, seulement je ne veux pas lui montrer que je tiens à peine debout.
Alexia finit de descendre. Je ne m'étais pas rendue compte qu'elle m'avait suivie avant qu'elle parle. Je serre les dents et me triture les mains, mal à l'aise. Pour ma défense, je suis si obnibulée par le bras enroulé de Deliah autour de celui d'Alex que j'ai encore moins réalisé le silence de mort qui règne dans la cuisine, attenante au salon. Les jumeaux sont renfrognés et Rodric est bien le seul à tenter de ne pas perdre la face et à continuer de sourire.
Le voir faire allume une petite flamme : celle de la colère. Comment peut-il faire cela alors que son propre fils se sacrifie pour sauver sa famille, y compris moi ? Je déglutis en sentant mes veines rugir et mon sang bouillir. La magie envahit mes sens en plus de temps qu'il n'en faut et je réprime aussitôt la vague qui menace de remonter à la vue de tous. Depuis que Deliah nous a étranglé avec son ultimatum, mes pouvoirs de magiciennes sont omniprésents.
Mes émotions sont un vaste tourbillons que je n'arrive plus à contrôler. Colère, tristesse, culpabilité, détresse. Ils se mélangent tous autant qu'ils sont et je dois museler plusieurs fois cette vague magique et agréable qui ne demande qu'une seule chose : s'exprimer. Pourtant, je ne peux pas. Ce que je ne peux pas la combattre en sachant que je ne sais pas les contrôler et que les conséquences seront désastreuses mais ce n'est pas l'envie qui manque.
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La Malédiction de La Luna (S2)
WeerwolfSaison 2 ✓ Un mois et demi après, Rodric et sa famille ne sont toujours pas réapparu tandis que Léana et Alexander dépérissent peu à peu sous l'inquiétude et l'impatience depuis que Nëta, la déesse de la nuit, leur a révélé la vérité. Le Père des Lo...