Je tombe à la renverse comme aspirée par ce trou béant. Je suis lourde. L'air me transperce, me brûle la peau. J'ai plus que jamais peur du néant. Pourtant, ces secondes me font sombrer dans un vide intersidéral. Je suis tétanisée. Mon corps ne me répond plus, il chute au gré des cieux. Mais il n'est pas ici question d'une image, seulement d'un gouffre, un gouffre sans fond. Je meurs d'envie d'hurler mon désespoir dans ces derniers instants, mais, quand bien même je le ferais, mes lèvres ne s'entrouvrent plus. Je crains l'atterrissage qui n'arrive jamais, comme s'il cherchait à prolonger mes souffrances. Mais, au moment où je crois mourir, j'émerge.
Il y a là, en face de moi, ces lettres longuement observées. Celles qui supputent les années qu'il me reste à vivre. En lisant ces quelques mots ancrés dessus, mon cœur se remet à battre sans que je me fusse rendue compte de son arrêt. Mais le soulagement n'est que de courte durée. Je souhaite en vain me prouver que je n'ai pas cessé d'exister, que mes jours comptent toujours. Mais impossible de déplacer mes membres. Comme si, toujours tétanisés par la peur du néant, ils s'étaient jugés trop fatigués pour reprendre entièrement possession d'eux-mêmes, comme s'ils étaient toujours figés dans cette perception onirique. Les ombres se déplacent tandis que mes yeux divaguent. Mes pensées explosent. Ils disent que c'est du à l'arrêt de mon cœur mais puisse un cœur s'arrêter lorsque la Mort le maintient en vie ?
Lucy
