Chapitre 21

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Daryl

Je ne comprends pas pourquoi Dorian n'a pas attendu que j'arrive auprès de lui pour s'élancer. J'avais cru détecter qu'il aurait besoin de plus d'encouragements pour faire le grand saut. Moi-même, j'ai hésité un long moment lors de ma première fois, et pourtant, je carbure à l'adrénaline. Cet homme est plus que fascinant avec ses gestes si différents d'une personne normale. Quand il devrait festoyer pour une victoire, il préfère la compagnie de son imbécile de père, et quand il est supposé hésiter devant un gouffre aussi profond, il s'y jette sans la moindre hésitation.

Encore étonné, je m'approche du précipice et aperçois mon beau brun qui s'est assis sur l'un des rochers utilisés pour se délester de l'équipement. Son corps ne bouge pas, mais je peux voir qu'il a les mains sur son visage. Est-il en train de réaliser ce qu'il vient d'accomplir ? Rien n'est moins sûr si je me fie à ses épaules qui commencent à se soulever en mouvements saccadés. Il pleure !

— Chat de gouttière !

Je me précipite vers le sentier qui mène au rocher. Moi qui croyais lui permettre de se détendre. Je l'ai plutôt amené chez un chaman où il a assez fumé pour en devenir hystérique et, ensuite, je l'ai laissé seul pour son premier saut. J'espérais quoi ? Que tout se passerait à merveille ?

J'accours auprès de lui en dévalant la piste rocailleuse qui s'effrite sous mon passage. Ma main touche le sol plusieurs fois pour garder mon équilibre dans cette pente très inclinée. Même si un des employés a déjà rejoint Dorian pour l'aider, il est évident que quelque chose ne va pas. Ses mains, qui tantôt recouvraient son visage, ont glissé jusqu'à sa nuque. La tête relevée, il la secoue, comme s'il était fâché contre lui-même, ne se préoccupant même pas de l'homme qui détache ses sangles.

Deux cents pieds, c'est long à descendre quand on doit le faire sur nos deux jambes. C'est même bien assez pour sentir la culpabilité me gagner. Je veux lui montrer que tout va bien, que notre journée n'est pas terminée et que je vais réussir à lui changer les idées.

J'arrive enfin auprès de lui alors que je l'entend marmonner des paroles inintelligibles.

— Hé ! Beau brun ! Tu as été génial. Le premier plongeon est le plus difficile, tu verras que la prochaine fois tu apprécieras davantage.

Il acquiesce de la tête sans me répondre par des mots. Je vois bien qu'il a pleuré et je m'en veux à un point que je décide de le prendre dans mes bras en m'agenouillant à sa hauteur. Évidemment, grâce à ma chance légendaire, mon genou atterrit sur l'un de ces cailloux qui ont aussi envahi les cavités de mes chaussures pendant ma descente. C'est inconfortable, mais mon seul but consiste à apaiser Dorian. Il s'agrippe bientôt à moi et laisse échapper de longs sanglots interminables.

— Je... Je n'ai pas réussi. Il a dit que ce serait l'un de nous deux.

— Calme-toi, mon beau, lui réponds-je en passant ma main dans ses cheveux. Tu es en sécurité. Je suis désolé que ça n'est pas été agréable.

— Ça devait être moi ! Pourquoi ?

L'employé derrière mon beau brun commence à s'impatienter, soufflant son impatience sans aucune discrétion.

— Tu veux bien te lever, Dorian ? On va pouvoir en discuter dans un endroit plus confortable.

Je le tire par les deux bras afin qu'il soit enfin debout. Bien qu'il tienne maintenant sur ses deux jambes, il ne semble pas prêt à remonter. Sa tête s'est à nouveau rabattue, signe qu'il n'est pas encore rassuré. Soudain, il plonge à genoux devant moi.

— Tu es blessé ? Comment ? me lance-t-il aussitôt.

Je me penche pour vérifier ce qui l'a poussé à prendre cette posture et je vois que le caillou s'est incrusté dans ma chair. Mon sang se répand en petits sillons devant ses yeux dilatés.

Burn outOù les histoires vivent. Découvrez maintenant