En regardant ELIF

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Mon regard n'avait pas pu la quitter dès l'instant qu'elle avait décidé de laisser la porte de monsieur Charles entrouverte. Elle avait cette manie de ne pas complètement fermer les portes derrière elle, qui devrais-je l'avouer m'exaspérait à chaque fois. De mon petit box, j'observais en silence et désarmé, je pouvais contempler ses gestuelles que je trouvais à la fois vifs et souples, ses gestes étaient efficients. J'avais toujours trouvais ça bizarre la maitrise qu'elle avait sur son physique.

Elle gesticuler en riant, dans mon observation contemporaine j'avais constaté que c'était le seul endroit des locaux de l'entreprise où son rire aigu caractéristique ne dérangeait personne. Après, ce n'était pas la fille avec le rire le plus bizarre de la boite, Angela l'une des belles juristes de la boite riait comme une trompète et Merveille, sa sœur siamoise comme un moteur de 4x4.

- Altan !

Je sursautai de mon confortable et glissant fauteuil en cuir à l'écoute de mon nom. Ce n'était ni un son doux ni un son amical, mais c'était la voix sèche et battante de M. Charles qui venait de me sortir de ma petite rêverie, quoi de plus mieux.

En me dirigeant vers son bureau, je n'avais cessé de ressentir cette légère pression dans l'échine comme si j'allais recevoir une nouvelle corvée ou que j'allais me faire réprimander pour une tache mal faite, même si la dernière option était peu probable. Je ne me reprochai de rien, mais pourtant tous les regards étaient à présent braqués sur ma personne, ce qui m'agaçait encore plus. Mais bon, peu importe.

Nova Entertainment, une boite dans laquelle je travaillais comme responsable informatique depuis cinq ans maintenant. Max Richter l'avait créée depuis six années et il y avait placé Charles Onyembe comme PDG. Ce n'était pas la plus grosse entreprise dans son domaine mais les chiffres étaient corrects et constants, ils avaient dépassé le seuil de survivance propre aux jeunes entreprises qui débutent et la zone actuelle était d'un vert propre aux jeunes plantes.

Pas de grosse exigences en terme de dress-code, du coup tout le monde s'habillait assez confortablement, quelque part entre le pantalon-chemise décontracté et la tenue de ville sans cravate. M. Charles tenait à bâtir une équipe souple et à l'aise dans son travail créatif. C'était l'idée qui avait permis de créer des liens entre les membres de l'équipe, mais entre sa nièce qui se faisait rejeter et moi pour qui ça ne signifiait rien, cette belle cohésion avait démontré ses limites : la meute acceptait difficilement ceux qui étaient différents d'eux.

C'était ça, mon emploi du temps de 8 à 17h, 5 jours sur 7 ; sans plus. C'était leur entreprise, mon occupation rémunératrice.

- Oui monsieur, vous m'avez appelé.

Je posais un léger regard sur sa nièce, qui elle, avait toujours ses prunelles sur son oncle puis scruta mon patron. L'homme robuste mais à la fois fatigué par l'âge m'observa et prit un air autoritaire, qu'il me lança, un regard perçant qui me figea.

- C'est quoi ça ? interrogea monsieur Charles tout en grognonnant. Ne mérite-t-elle pas une salutation verbale, elle n'est pas un meuble dans le décor Altan.

- Ce n'était pas l'idée que j'ai voulu transmettre, mes excuses.

- Mais encore ? aboya l'homme d'une cinquantaine d'année.

- Bonjour mademoiselle, lançai-je en la regardant fixement de mon regard de poisson mort et articulant convenablement.

Elle exécuta quelques gestes que je regardai sans prendre la peine de les voir et d'en comprendre le sens. Puis me reconcentra sur l'homme qui n'était pas loin de me faire une autre crise, de ce même regard stoïque qui m'accompagnait depuis longtemps.

en regardant ELIFOù les histoires vivent. Découvrez maintenant