Renaissance

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Il fait noir, on n'y voit pas à deux mètres. Quelques ombres se distinguent, mais impossible de discerner quoi que ce soit avec le brouillard qui vient de se lever. Pourtant, je sais exactement où je vais, et j'avance sans bruit dans les buissons. Ma destination est là, juste derrière les fourrés. Un lac perdu au milieu de la forêt. Personne ne vient jamais ici, c'est mon refuge secret. Je viens là quand je suis triste, en colère, blessé... C'est un endroit calme, qui a toujours eu le don de m'apaiser, depuis je ne sais combien d'années.

Un nuage s'efface dans le ciel, et la clarté de la lune éclaire soudain mes pas. Tout est si calme, si silencieux. J'arrive enfin au bord du lac, la lumière blanche se réfléchit doucement à la surface de l'eau. Je retire mon T-shirt, et me prépare à piquer une tête en prenant une profonde inspiration. Je m'élance, et plonge dans les eaux noires. Je me heurte à la surface des eaux glacées, et me laisse entraîner vers les profondeurs. Tout est silencieux au fond, j'entends uniquement les battements de mon cœur. Je m'enfonce toujours plus loin, à plusieurs mètres maintenant de la surface. Je m'éloigne de ce monde qui m'oppresse, de tous mes problèmes, de ce qui m'accable te que je déteste dans ma vie.
   Je continue de descendre : je devrais bientôt arriver au fond. Mais j'ai du sous-estimer la distance. et je m'enfonce encore et encore dans l'obscurité. Je commence à manquer d'air, je sens le sang battre sur ma tempe. Il faut que je remonte. À regret, je me retourne, et fais demi-tour vers la surface. Elle aussi semble plus loin que jamais. L'air se fait de plus en plus rare. Je bats des pieds encore plus vite, je commence à suffoque. La lumière de la lune m'éclaire à nouveau, je suis tout proche maintenant.

Je sors la tête hors de l'eau, pour y être aussitôt renvoyé par la pression d'une cascade sur mes épaules. Je panique. Il n'y a pas de cascade dans le lac. Le manque d'air commence à me faire tourner la tête. J'essaye une nouvelle fois de remonter et de reprendre de l'air, pour être encore une fois renvoyé vers les profondeurs par le liquide violent. Je n'en peux plus, j'ouvre la bouche pour respirer, et l'eau s'engouffre dans mes poumons avec une force destructrice. Je voudrais crier ma douleur, mais elle continue de s'infiltrer en moi, m'écrasant sous la pression, m'attaquant de l'intérieur maintenant. Je suffoque. Des tâches colorées apparaissent devant mes yeux alors que je perds conscience. Au loin, j'entends quelqu'un crier un prénom :

- Nathan ! Nathan !

Je connais ce prénom. Je l'ai déjà entendu de nombreuses fois. C'est le mien ! On m'appelle ! Quelqu'un est venu me chercher ! J'essaye comme je peux de remonter, de combattre l'eau qui m'assomme et m'étourdit. Je me débats dans tous les sens. Et je tombe de mon lit.

...

- Alors, on fait la grasse matinée ce matin ? Me demande ma mère sur un ton taquin. Tu vas avoir des ennuis si tu continues à te coucher aussi tard. Et je ne te parle pas que d'arriver en retard en cours.

Je passe la porte de la cuisine, et la laisse me parler en long, en large et en travers de tous les bénéfices du sommeil. Ça ne sert à rien de l'interrompre. De toute façon, je sais très bien qu'elle ne m'écouterait pas. Elle ne veut que mon bien, mais parfois elle peut être un peu... collante. Je secoue la tête en m'asseyant sur une chaise. Non, ça ne sert à rien de m'énerver contre elle. Et puis elle a raison, je me couche beaucoup trop tard. Et pour aucune raison en plus. Je passe mes soirées et mes nuits à jouer à de vieux jeux flash disponibles partout, ou encore à traîner sur des forums pour des discussions vides de sens. Résultat, je me lève beaucoup trop tard tous les matins, et je suis toujours en retard. Cela fait presque un an que je n'entends plus mon réveil. Je soupire en attrapant la bouteille de lait. Cette vie n'est pas super, mais c'est la mienne.

Ma mère a terminé de déblatérer sur les bienfaits du sommeil, elle s'attaque maintenant aux derniers potins des célébrités. J'avale mon petit déjeuner en vitesse, et me dépêche de partir pour aller en cours. Comme tous les matins, je dois courir pour arriver à l'heure à l'arrêt de bus. J'y arrive à temps, mais complètement essoufflé. Un groupe de filles glousse dans un coin. Je suis sûr qu'elles se moquent de moi. Il y a de quoi. Ma tenue est pitoyable, je suis à peine coiffé. On dit qu'il ne faut pas se fier aux apparences, mais je sais bien, moi, que ce qu'il y a derrière n'est pas beaucoup plus glorieux. Le bus arrive enfin, je me dépêche de monter et de me trouver une place pas trop exposée, pour me soustraire aux regards.

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