L'amour d'une mère

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Millie n'était pas là et Cameron profitait de la chambre seul. Il était inquiet. Il espérait qu'elle allait vite rentrer. Il regarda son sac de voyage. Il pouvait toujours partir encore. Il suffisait de ne pas se faire attraper jusqu'à la rentrée.

Il se mit à fouiller dans la chambre à la recherche de la cachette d'argent de sa mère. Elle ne serait pas contente à son retour mais Cameron avait besoin d'argent pour prendre le train jusqu'à Londres. Là bas, il se cacherait dans la gare et attendrait la rentrée. Il ne pouvait pas rester ici, seul. Quand sa mère s'absentait, Cameron devait la remplacer et il ne voulait pas le faire encore une fois. Depuis ses dix ans, la vieille l'avait poussé à faire plus que le ménage ou la cuisine. Cameron retenait surtout que ça faisait mal et il ne comprenait pas que sa mère continuait ce travail. Elle avait certes de belles tenues, mangeait à sa faim mais ça faisait mal. Les clients étaient souvent violent.

Cameron finit de trouver le petit coffret. Sa mère économisait chaque pourboire, depuis douze ans maintenant. Il prit quelques pièces, les fourra dans ses poches et attrapa son sac. Il regarda l'horloge sur la table de chevet. Il ne savait pas lire l'heure mais savait que selon les aiguilles il pouvait fuir ou non. Il n'avait pas beaucoup de temps. Il devait passer par la fenêtre.

Il essaya de l'ouvrir et fronça des sourcils en la voyant alors bloqué et cloué. Il déglutit en comprenant que la vieille l'avait piégé. Il s'était déjà enfui par là. Elle le savait bien sûr.

Il tira sur sa chemise trop longue. Il allait devoir subir une nuit et fuir dès le lendemain matin par la cuisine. Ça voulait dire n'emporter que le strict minimum. Il n'avait aucune idée de comment il ferait sans habits. S'il laissait son sac, alors elle allait deviner qu'il voulait fuguer encore une fois.

Il s'assit sur le lit et se recroquevilla. Il détestait cet endroit. Il en voulait au monde entier d'être né. Il eut un frison en entendant la porte de la chambre s'ouvrir. Il espéra que c'était sa mère mais non. Il baissa immédiatement les yeux.

— Tiens, dit la patronne de l'établissement.

Elle jeta des habits à côté du garçon d'à peine douze ans qui les attrapa, la gorge nouée.

— Madame... s'il vous plaît, dit-il à voix basse. Je ferais plus de ménage et...

— Tu crois que c'est gratuit le loyer ? Les repas ? Ta mère et toi vous devez payer comme tout le monde ! Ce n'est pas si terrible. Ce travail est aussi vieux que le monde et personne ne s'en plaint à part toi !

Cameron préféra ne rien dire.

— Elle est où ma mère ? Demanda-t-il à une des filles avant l'arrivée des clients.

— Elle devait aller voir quelqu'un, répondit Hortensia. Ne fais pas cette tête ! Tu es déjà si hideux, n'en rajoute pas ! Tu as de la chance d'avoir un client... Il a des goûts bizarres ce type.

Le client était un gros monsieur qui sentait l'amande et la sueur. Cameron ne l'aimait pas. Il faisait pourtant ce qu'il lui demandait. Il fallait bien payer le loyer et sa mère ne pouvait pas travailler ce soir, alors il le faisait.

— Cameron ?

Le garçon avait mal, comme à chaque fois. Sauf que là, le client avait invité un ami et ça avait été plus long, plus douloureux aussi. Il laissa des larmes sortir de sous ses paupières.

Millie fronça des sourcils. Elle n'avait vu son fils pleurer très rarement. Elle savait qu'il n'était pas heureux ici, mais maintenant qu'il ne rentrait que l'été, elle avait espéré qu'il serait content.

— Qu'est-ce que t'as ? Demanda-t-elle. Tu as cassé quelque chose ? C'est pas grave... Je me ferais un client en plus pour payer la casse. Vas plutôt faire le petit-déjeuner avant qu'elle s'énerve et me demande de payer plus !

Le secretOù les histoires vivent. Découvrez maintenant