Ce qui pourrait être mieux

Qu'est-ce que la réification des animaux ?

L'une des idées transversales de mon propos est que les torts que nous causons aux animaux que nous consommons consistent uniquement en leur réification et leur abattage systémiques ; sans avoir à ajouter à cela, comme l'on pourrait le penser, le fait de manger la chair animale prélevée sur les carcasses des animaux. 

Or, si l'on voit bien ce qu'est l'abattage systémique, à savoir la mise à mort industrialisée des animaux dans les abattoirs, la réification systémique des animaux est quelque chose de beaucoup plus discret et d'insidieux, si bien que nous ne la percevons pas spontanément, même lorsqu'elle produit ses effets juste sous nos yeux.

L'on réifie un être vivant dès lors qu'on le traite seulement comme un moyen et non pas comme une fin en soi, pour reprendre la terminologie kantienne. Dit autrement, l'on réifie un animal dès lors qu'il cesse d'être à nos yeux autre chose qu'un être vivant qui a un intérêt (et donc un droit) à ne pas souffrir. Dit encore plus simplement, l'animal est réifié aussitôt qu'on le considère et le traite comme une vulgaire chose ; vulgaire chose qu'il n'est pas puisqu'il s'en distingue en tant que, contrairement à elle, il possède au moins un intérêt (celui de ne pas souffrir).

Or, les animaux d'élevage font précisément partie de ces êtres vivants qui ne sont pour nous que des moyens : ils n'existent à nos yeux que comme des réservoirs de protéines et de saveurs dont on s'occupe uniquement dans la perspective de les mener à l'abattoir afin qu'ils soient abattus, dépecés et débités en morceaux, avant de finir dans nos assiettes.

L'on ne réifie pas un animal lorsqu'on lui reconnaît un droit de vivre paisiblement et librement, et lorsque l'on s'applique à faire respecter un tel droit. Autrement dit, les seuls animaux à ne pas être réifiés sont ceux qu'on laisse mourir de causes naturelles, que l'on ne "régule" (chasse) pas, que l'on n'utilise d'aucune manière, c'est-à-dire qui sont pour nous sans fonction.

A contrario, sont réifiés : les animaux d'élevage (bétail, volaille, etc.), les chevaux de course, les animaux chassés, les animaux d'attraction (de cirque en premier lieu et de zoo dans une moindre mesure) et tout animal dont on s'occupe uniquement parce que l'on trouve en son endroit quelque commode aptitude (c'est-à-dire une fonction).