Chapitre 54 : De trop

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Hoquetant d'effroi aux révélations de Gabriel pour le moins douteuses, ma mère monte en panique.

– De qui s'agit-il ?

– Son nom est Alastor. Nous nous sommes rencontrés durant nos études, et déjà à cette époque il n'était pas fréquentable. C'est une brute sauvage qui ne pense qu'à lui et oblige ceux qui l'entourent à se plier en quatre pour répondre à ses moindres demandes plus que déshonorantes. Il n'hésitera pas à abuser de votre fille, je l'ai déjà vu faire maintes et maintes fois.

– C'est affreux ! s'horrifia ma mère tandis que mon père dévisage Gabriel avec horreur.

– Vous ne pourrez pas le rater lorsque vous le verrez, tous ses pores exhalent le vice.

Je repose brusquement mon assiette sur le porte-assiette et me tourne vers la tablée. Néanmoins, Gabriel est, encore une fois, le seul à me jeter un coup d'oeil. Il affiche un sourire discret à mon attention, puis pose sa main sur celle de ma mère lorsque celle-ci fond en larmes.

– Je vous promets de tout faire pour éloigner votre fille de lui.

– Sauvez-la, je vous en conjure, le supplia ma mère en plongeant son regard ravagé dans celui de Gabriel.

– Je prends votre demande très à coeur et vous promets que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour la réaliser.

Comment peut-il dire de telles choses ? Je ne suis pas un objet, encore moins sa propriété ! Remontée par la haine, je m'avance à grands pas jusqu'à la salle à manger et saisis Gabriel par le col de sa chemise en lin blanc.

– Comment oses-tu ?

Il ne me répond pas de suite, prenant d'abord le temps de se lever pour se tenir face à moi, abordant un triste sourire qui se reflète jusque dans ses yeux.

– C'est pour toi bien, Angèle... Il faut que tu te tiennes éloignée d'Alastor.

– Et qu'en est-il de toi ? Je pense que je devrais aussi prendre mes distances avec ta personne, crachai-je en resserrant mon emprise autour de son col.

– Ma chérie, écoute ce garçon, me supplia ma mère en se levant de table à son tour pour venir se placer à côté de moi et poser une main sur mon épaule.

– J'ai encore le droit de décider qui je fréquente ou non. Et ce n'est pas un type dans ton genre qui va me dicter ma conduite, c'est clair ?!

– Plus tu t'éloignes du chemin, plus tu te perds dans les bassesses du Mal.

– Non ! Plus je m'éloigne de ton foutu chemin barbelé, plus j'y vois clair. Tu n'es qu'un monstre, Gabriel ! Ne prétends pas vouloir m'aider lorsque tu ne sais même pas ce que je souhaite.

– Je sais ce qui est bon pour toi.

– Non tu le ne sais pas ! Ce qui est bon n'est pas forcément ce que je souhaite. Alors ne prétends pas avoir une quelconque influence sur moi !

A cet instant, ses sourcils se froncent et une étrange sensation de flottement règne dans l'air tandis qu'un silence de mort s'abat sur nous. En jetant un regard autour de moi, je vois mes parents complètement figés, même le verre que mon père a renversé en se relevant est figé dans le temps, l'eau poétiquement arrêtée en l'air.

De l'Autre CôtéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant