Valentina Tome 1 : un monde nouveau

Chapitre 12

Vingt ans plus tôt,
Dans une petite ville près de Rome


Mama m'a demandé d'être sage et de ne pas faire de bruit dans ma chambre. Elle a la visite d'un monsieur et je vois bien qu'elle est inquiète. Je l'entends se déplacer dans le salon, elle parle une langue bizarre et je ne comprends rien du tout sauf mon prénom. Je me faufile discrètement jusqu'aux escaliers pour écouter ce que lui répond l'homme qui semble en colère. Il parle très fort et mama n'arrête pas de dire non. Je crois qu'il essaye de lui faire du mal. Sur la pointe des pieds, je descends quelques marches pour me rapprocher d'eux. D'où je suis, j'arrive à apercevoir mama qui se trouve devant la fenêtre. Le grand monsieur, lui, est sur le canapé, une tasse de café à la main. Cette fois, il parle en italien et je peux enfin les comprendre.

— Je t'ai dit non, Valentina n'a rien à voir avec ta famille. Je t'interdis de t'approcher de mon bébé.

— Ma famille est également la tienne, dois-je te rappeler que tu es ma fille Alba. Gronde le grand monsieur. Arrête tes sottises et rentre à la maison. Nous t'aiderons pour l'élever en bonne petite sorcière. Elle arrive à ses 10 ans, elle doit commencer son apprentissage !

— Non ! Je me suis éloignée de vous pour cette raison, je refuse que mon enfant devienne une diablesse !

Une sorcière, je sais ce que c'est. Mama me raconte souvent le récit d'une gentille sorcière qui s'est sauvée d'un grand château rempli de méchants. C'est mon histoire préférée, parce que la gentille sorcière gagne à la fin et j'aime bien quand les gentils gagnent.

— Tiens tiens tiens, mais qui est venue nous saluer.

Je sens une main chaude saisir mon poignet et me tirer en avant dans le salon. C'est le grand monsieur habillé tout en noir qui m'a attrapée. Il me terrorise, ses yeux sont bizarres et il a une marque au-dessus de son côté droit. Je me tortille pour lui échapper et retourner dans ma chambre parce que je sais que mama va me disputer.

— Valentina, je t'avais demandé de rester en haut. Papa lâche là, tu lui fais peur !
Elle m'avait dit qu'il n'y avait plus qu'elle et moi. Que j'étais sa famille et elle la mienne. L'homme me libère enfin et s'agenouille devant moi, un sourire aux lèvres. Il est encore plus moche, vu de près.

— Bonjour, Valentina. Je suis ton grand-père. Tu veux bien faire un câlin à ton nonno ?

Une fois qu'il m'a lâchée, je me dépêche de rejoindre mama vers la fenêtre, en plus d'être vilain et de me faire peur, une drôle d'odeur entêtante s'échappe de son long manteau. Je me cache derrière les jambes de mama et me cramponne à son jean.

— Alba, si tu refuses de venir avec moi, nous reviendrons la chercher. Cette petite à un gros potentiel et je ne permettrais ni Domenico ni ses infâmes monstres s'approcher d'elle. Elle fait partie de la plus grande famille de sorciers et je veux cette enfant.

L'homme tourne les talons et quitte la maison, mama est toute triste et se laisse tomber sur ses genoux. Elle me serre dans ses bras et me couvre de baisers, elle n'arrête pas de me demander pardon. Je ne comprends pas, je ne l'ai pas écoutée et c'est plutôt moi qui devrais m'excuser.
Ce soir-là, mama à fait nos valises et nous avons fui notre foyer. Elle a presque tout laissé à l'intérieur. Des larmes dévalent mes joues quand je remarque que j'ai oublié mon doudou lapin. C'était mon doudou préféré, il sentait les fleurs et un autre parfum que je ne connais pas. Devant le portail mama a encore pleuré. Je ne saisis pas ce qu'il se passe, elle m'a simplement dit que l'on partait en voyage. D'un seul coup mama lève la main droite. De petits cracs résonnent et de grosses flammes apparaissent dans la fenêtre du salon, elles se baladent jusqu'à la cuisine. Poursuivent leur chemin dans la chambre de mama, dans la salle de bain pour finir dans la mienne. Mes larmes coulent plus vite, parce que je comprends que je ne reverrai jamais mon doudou lapin qui sent bon les fleurs ni mes copains à l'école.

Mama m'installe dans la voiture et nous nous sommes éloignées rapidement de notre maison. Quand je me suis réveillée, j'ai cru que c'était un rêve. On était à nouveau devant notre maison, celle où j'ai laissé mon doudou. Sauf que je ne l'ai pas trouvé, à la place mama m'a tendu un petit paquet.

— Ouvre mio cuore.

Encore ensommeillée, je défais le nœud sur le cadeau et je découvre un nouveau doudou lapin. Il est identique à celui que j'ai oublié sur mon ancien lit. Toute contente, je me jette au cou de mama, qui me serre fort contre elle et me berce doucement dans ses bras. Ses larmes coulent toujours, mais je ne comprends pas pourquoi. Quand je m'allonge, elle lève la main gauche devant moi et une forte lumière blanche apparaît.

— Pardonne-moi mon lapin, mais c'est mieux que tu ne te souviennes de rien. Murmure mama.