Chapitre 1

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« L'ombre de la violence subie dans l'enfance plane sur la vie entière » HERBERT WARD                                                                                                          

Je ne saurais pas vous dire ce qui a le plus bouleversé ma vie. En réalité en moins de 5 ans, j'ai appris les plus gros secrets que s'entêtait à cacher ma famille dans l'espoir que nous ne vrillons pas fou. Mais il a suffi d'une photo, d'un instant, une journée pour que notre bulle protectrice éclate.
Sous la rage, la tristesse, sous tous ses sentiments négatifs les mots explosent. Ils sont lancés comme des piques et finissent tous par entailler les cœurs les plus fragiles et les plus pures.

En un instant, l'illusion prit fin et déjà émergeait le mont de l'iceberg.
Néanmoins, le haut de cet iceberg n'était que le coté le plus petit et on redoutait tous le jour où nous verrions le coté engloutit de celui-ci.

Il est possible pour un enfant de supporter les disputes entre les parents, à la limite de subir les coups du père sur la mère. Mais en grandissant, l'enfant comprend l'ampleur des choses alors commence à ce moment-là, la phase de déni et de reproche. « Comment ai-je pu penser que ma famille était normale ? » « comment ai-je pu laisser passer ça ? ».
En fait, on se reproche tout le malheur de la famille alors que nous étions les plus innocents de l'histoire et pire encore : nous étions les victimes.

Je me demande à quel moment de leur existence les adultes vrillent au point où ils peuvent entrer dans un déni tellement fort qu'ils sont persuadés que les coupables sont les victimes.
Au point où ils leur est possible de se déchirer et se reprocher toutes les horreurs du monde mais surtout au point où même après ces épisodes traumatisants, ils sont persuadés que rester ensemble est ce qu'il y a de mieux pour leurs enfants.

Je crois que nous avons perdu toute trace de notre innocence quand nous avons pu dresser le portrait de notre père. Un pervers narcissique, avec un fort complexe d'infériorité, un dragueur invétéré ajouté à cela un trouble du mensonge presque inné.

Mais au-delà d'un profil, j'ai cette impression que ce genre de situation est propre à chaque enfant. Elle est propre à chaque situations familiales et chaque enfant choisie sa voie. Mais pour schématiser on peut dire qu'il existe deux principaux chemins, le bien et le mal. Et dans ces deux chemins il en exister une infinité d'autres qui mènent à des fins différentes plus ou moins graves.

Enfin bref, la vie est un cheminement d'épreuves. Mais il est important de noter que nos premières épreuves ne nous sont souvent pas destinées, elles sont les conséquences des épreuves que nos parents vivent. Je ne fais bien sûr pas une généralité mais pour beaucoup, pour ceux qui connaissent les relations conflictuelles entre leurs parents, vous savez surement de quoi il est question.

Pour reprendre où j'en étais, ma découverte ou plutôt notre découverte a été comme des couronnes d'épines qui enserraient mon cœur et qui me piquaient à chaque battement. J'ai été englouti par ce tsunami de souvenirs. Ils se succédaient me montrant à quel point ma famille était détruite, à quel point j'étais manipulée et surtout que nous faisions partie de ses familles coincées sous le joug d'un homme destructeur. Un homme mauvais qui nous avait ensorcelés pour pouvoir jouir de notre innocence. Il a profité d'avoir des enfants pour se vanter, pour jouer quelque temps à la poupée pour mieux les abandonner une fois lasser. Il a profité d'avoir une femme pour se nourrir comme un roi, garder une maison propre, un jardin entretenu, un linge propre plié et repassé. Enfin bref, il avait un esclave et des poupées comme un gamin capricieux.
J'avais toujours pensé que ma mère jouait plus le rôle de mère que le rôle de femme avec lui... Elle n'était que bonne à ... J'avais aussi toujours voulu voir mes parents se séparer, ils n'étaient pas faits pour être ensemble. C'était clair, mais soyons honnête, à cette époque qui aurait osé divorcer ? Je ne parle même pas de la peur ou de l'illusion dans laquelle on est plongé, mais plutôt de cette pression sociale qui vous oppresse vous femme algérienne d'une grande famille. À cette époque il ne faut pas se marier trop tard pour honorer ses parents, il ne faut pas divorcer pour ne pas décevoir ses parents, il ne faut pas que les autres puissent parler de sa famille pour ne pas être victime de mauvais commérages. Pourtant, c'est le divorce qui aurait pu éviter une perte de temps qui se compte en années, éviter un traumatisme, éviter une si grande douleur, éviter une déchirure familiale entre père et enfants éventuellement, et cela aurait pu favoriser un possible autre mariage, parce qu'honnêtement il n'est pas facile de refaire sa vie la quarantaine passé avec 4 enfants et un corps aillant subit les passages du temps et des grossesses.
Et il est difficile de reprendre confiance en soi et en l'homme après une telle trahison et d'aussi grosses blessures morales et physiques.
Pour revenir à moi, enfin nous, enfin les enfants quoi. Nous subissons puis, en grandissant, faisons subir. Pour illustrer cela, je prendrai mon cas. J'ai, durant toute mon enfance, subit les vices d'un hommes malsain, mauvais, diabolique. Les vices de mon père.
D'aussi loin que je me souvienne, il a toujours frappé ma mère. Je ne me souviens pas du degré de violence, mais je me souviens de la peur que je ressentais. Je me souviens de nous en pleure, de mon grand frère qui, déjà petit (environ 6 ans), nous serrant ma sœur et moi dans ses bras en nous répétant : « ne vous inquiétez pas les filles ça va aller, j'ai l'habitude, c'est bientôt finis ». Je me souviens avec une précision particulière de ces mots. Il m'avait à la fois réconforté et terrifié. Pourquoi avait-il l'habitude ? Pourquoi nous ? C'est ça une famille ? Je ne veux pas de famille dans ce cas.

Et après toute les épreuves vécus, comment rester saint d'esprit. Alors pour essayer de s'en sortir on enchaine les Psy. On nous promet d'aller mieux, on nous donne des antidépresseurs, des somnifères.   Mais en réalité, avons-nous juste une garanti de s'en sortir sans traumatismes à vie ?
Je ne crois pas, parce que chaque épreuve vécue à des répercussions. Sur nous, sur nos enfants, sur notre façon de vivre. Nous en sortons endurcie mais surtout méfiant, envers les autres et envers la vie.
Alors il faut réapprendre à vivre Il faut tout recommencer depuis le début, enfaite c'est comme une deuxième naissance, sauf que là on sait. On est conscient de la douleur de la vie, on sait comment parler, marcher, mentir, etc... A partir de ce moment-là, on comprend qu'il faut renaître différemment de la première fois. Il faut naître avec une méfiance.

Mais une question subsiste en vérité, comment ne pas répéter les mêmes erreurs ?
C'est effrayant, on espère vraiment vivre une vie paisible, enfin.

C'est difficile. Je veux dire, se reconstruire implique tellement de chose. Déjà, lorsque nous nous reconstruisons nous nous basons sur des ruines existantes, mais alors se pose la question suivante : Qui étions nous à l'origine ? Cette question entraine avec elle une longue et périlleuse recherche. On se plonge dans nos souvenirs essayant de démêler le vrai du faux, essayant de tirer le bien du mal. En bref, nous essayons d'en tirer le meilleure pour avoir des bases solides et un tant soit peu, saine.
Ensuite, lorsque la première partie de processus est complète, il faut réfléchir à notre nouvelle identité. Quel genre de personne nous voulons être ? Quel type de caractère nous siéra le mieux ?

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 03, 2023 ⏰

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