Nouvelle

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Quand mes parents m’ont parlé d’une psychologue, j’avais tout de suite stressée. Je  pensais qu’elle allait me poser un tas de questions sur mes rêves et sur mes crises  d’angoisse. Et je n’avais pas spécialement tort. Elle m’observait derrière ses lunettes rondes  qui cachaient ses petits yeux verts
En entrant dans son cabinet il y a 15 min, les tableaux accrochés au mur, la peinture  jaune, son bureau et ses fauteuils, m’inspirait une impression de déjà-vu. J’avais essayé de  chercher où je pouvais les avoir vu, mais, au fond, je connaissais déjà la réponse : j’étais  venu ici dans le monde des rêves.
Elle me tira de ma rêverie en évoquant mes crises d’angoisses. Je frissonnai en entendant le  mot. Elles étaient bien plus fréquentes qu’il y a deux ans, quand j’ai commencé à faire des  cauchemars, pour le moins… étranges.
Elle m'évoqua différentes “techniques” pour les calmer et je soufflais, exaspérée. J’avais déjà  tout essayé. Il n'y avait qu’une solution qui les calmait : la musique. Je lui expliquai et elle me  demanda s’il y avait une personne avec qui je me sentais bien. Avec qui je pourrais parler de  ces cauchemars en toute aisance.
J’hésitais et elle le remarqua. Elle prit une voix ridiculement douce et me sortit une  tirade sur elle et mes parents qui ne voulaient que mon bien et m’aider
- Mais je ne veux pas être aidée ! m'écrirai-je en me levant du fauteuil, la faisant  sursauter. »
Je me figeai, me rendant compte que j’avais dépassé les bornes. Je m’excusai  rapidement et lui dis au revoir, avant de traverser les deux portes et de rejoindre mes  parents dans la salle d’attente. Ils me lancèrent un regard surpris, auquel je ne répondis pas.  Je sortis du bâtiment, suivis de mes parents qui me demandaient ce qu’il c’était passé. Je  montai dans la voiture. Mes parents m’imitèrent et se tournèrent vers moi, inquiets.
Et c’est là que je me rendis compte de mon erreur. Je voulus les serrer dans mes bras et  leur dire que je ne leur causerais plus de soucis. Je leur en causais déjà trop. Mais je ne dis  rien. J’attachai ma ceinture et je respirai profondément l’odeur familière du cuir des sièges de  la voiture. Je détournai le regard et dit simplement que je voulais rentrer et sortir prendre l’air  pour me libérer l’esprit. Ils échangèrent un regard et attachèrent à leur tour leur ceinture,  avant de démarrer. Le trajet se fit dans un silence pesant. J’étais accoudé à la vitre,  regardant le paysage dehors.
Une fois arrivé, la voiture se gara et je descendis, sans claquer la portière, comme à  mon habitude. Je dis à mes parents que je sortais et partis avant qu’ils ne me disent de  rester. Je montai la côte de notre allée et une fois en haut, mis mes écouteurs pour me  diriger vers le château d’eau.
Je montai les escaliers en colimaçon pour arriver au sommet du château d’eau beige et je  m'assis au bord, laissant mes jambes pendre derrière la barrière de sécurité. Je fermais les  yeux et enlevais un écouteur pour profiter du moment.
L’été était finalement arrivé, et avait forcé mes parents à échanger mes gros pulls et mon  manteau d’hiver contre une veste en jean et des tee-shirts à manches courtes. Le soleil  descendait rapidement, et le crépuscule allait arriver d’ici une trentaine de minutes.
Après quelques minutes, je tressaillis en sentant une main sur mon épaule. Je me  crispais et levais lentement la tête pour me retrouver nez à nez avec Raphaël.
« Salut, toi, lança-t-il d’une voix chaude en m’embrassant le front. Tout va bien ? Tu  n’as pas peur, d’habitude : tu me sens arriver ! (Il s'assit à ma droite et je soupirai.) Oulah !  Toi, il s'est passé quelque chose ! (Je lui lançai un regard insistant qui voulait tout dire et il  fronça les sourcils.) Ou plusieurs… raconte. »
Je lui racontais ma journée et décrivis mon impression de déjà-vu chez la psy et où je  l’avais vu. A la fin de mon récit, il fronça les sourcils.
Je détournai les yeux et marmonnai mon mécontentement. Je sursautai quand je  sentis sa main en dessous de mon épaule gauche. Il m'emmena contre lui et m'assura qu’il  me croyait.

Je me détendis et me laissa aller contre lui. Il m’embrassa le haut de la tête et je  souris.
Il murmura mon prénom après quelques minutes et pointa l'horizon du doigt. Je me  dégageai et ne fut pas déçue : j’avais beau détester l’été, les couchers de soleil étaient  toujours magnifiques en cette saison. Je laissai échapper un soupir d’admiration et tournai la  tête vers Raphaël. Il fermait les yeux et ses cheveux bruns dansaient au rythme du vent  frais. Je souris et regardai à nouveau le soleil qui invitait doucement la nuit à arriver.

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