[L.1] LOVE & ART

Chapitre vingt-deux : Eryne

Tu es là. Juste là. A quelques mètres de moi. Tu es dans ce lit. Dans un autre lit. Pourquoi j'aimerais que tu sois dans le mien ? Je ne sais plus où j'en suis, ce que je veux mais ces images reviennent comme une chanson qui tourne en boucle. J'ai l'impression d'être enfermée dans notre musée. Le musée de notre relation. Je nous revois. Je te revois. Ce premier soir, celui où tu m'as approchée. Puis celui où tu m'as demandé comment tu devais m'appeler. J'étais loin de m'imaginer où toutes ces belles paroles m'emmèneraient. A ce moment, je t'ai simplement trouvé beau. Je voulais juste jouer avec toi sans me douter de tous les secrets que tu cachais. Sans me douter que tu voulais jouer toi aussi. Mais j'ai perdu.

Oui. Voilà ma conclusion. J'ai perdu et je me perds. J'ai perdu et tu as gagné. As-tu vraiment gagné ? Sommes-nous dans ce jeu où il y a vraiment un gagnant ? Parce que je serai prête à prier n'importe quel Dieu, à me mettre à genoux devant n'importe quel autel en implorant le savoir. Savoir ce que tu veux. Savoir ce que je veux. Savoir ce que nous allons devenir, être. Savoir ce que nous sommes. Quelqu'un détient-il cette connaissance ? Je serai prête à aller voir une voyante pour qu'elle m'aide à savoir quel chemin prendre. La raison ou les sentiments ? Le cerveau ou le cœur ? Et si mon cerveau et mon cœur ne répondent plus, qui prend le contrôle ? Ma survie ? Que me dicterait ma survie ? Toi ou moi ?

Toi. Sans hésiter. J'ai sacrifié mon corps, mon honneur, mon orgueil pour toi. J'ai tout sacrifié pour toi. Je me suis abaissée. Je me suis laissée dominer. J'ai attendu le saint Graal. J'ai attendu Peter pour toi. Toi qui me regardait avec mépris. Toi qui me parlait comme à une chienne. Toi qui me touchait comme on touche un linge sale.

Alors j'ai eu envie de te détester. J'y ai mis tout mon cœur. Tu te rends compte de ce que ça signifie ? Mon coeur. Mon putain de coeur que je t'aurai donné. Je l'ai laissé me taillader pour toi. Je l'ai laissé me soumettre pour toi. Et moi ? Qu'est-ce que je suis ? Qu'est-ce que j'en tire ? Ton amour ? Je veux me convaincre que je n'en veux pas mais la réalité fait mal. Je souffre chaque jour pour toi. J'ai souffert pendant des heures pour toi et tout ce que j'ai, c'est juste de la condescendance. Tu mesures ce que je t'offre ? Tu mesures que mon amour n'a aucune limite ?

J'ai envie de te tuer pour me faire ça. J'ai envie de te fuir pour ne plus rien ressentir. J'ai envie de te briser pour te faire ramper. Je mérite que l'on rampe pour moi. Je mérite que tu rampes pour moi. Peter est là mais c'est pour toi que j'ai souffert. C'est pour toi que mon cerveau s'est éteint. C'est pour toi que mon coeur à tenu. Bordel que ça fait mal de réaliser à quel point je tiens à toi. J'ai envie de vomir tellement je me fais honte. Comment ai-je pu m'abaisser à ça ? A un homme ? J'étais une femme indépendante, ma seule drogue était l'argent et maintenant tu es le connard qui guide mes actes. Je voudrais souffrir pour ne plus y penser, me brûler pour me punir de ressentir de tels sentiments à ton encontre. Je te déteste. Je te déteste mais je veux que tu restes.

Je suis brisée parce que je vis.

Je n'ai pas dormi de la nuit et je me suis tellement retournée dans les draps de Peter que j'ai réussi à les enlever de la couette et du matelas. A peine la lumière du soleil traverse la fenêtre, je sors du lit et enfile un short en jean avant de sortir de la chambre. J'ai pris une décision. On efface tout et on recommence. Je ne pourrais pas survivre si Nate part de cette maison et on va être obligé de se côtoyer donc on va établir des règles pour éviter que ce qu'il s'est passé cette nuit se reproduise.

J'attrape le gâteau dans le four et une petite cuillère puis m'installe autour de la table de la terrasse.

J'ai déjà mangé un bon quart du gâteau devant mon livre lorsqu'il arrive en jogging et avec un tee-shirt. Il s'installe en face de moi et allume une cigarette. De si bon matin, je ne sais pas comment il fait. Je pose mon livre et il me regarde. Apparemment, lui aussi n'a pas vraiment dormi.