Dure d'être gardienne

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Je sautille sur ma ligne de buts, en tapant mes mains. Je vois mon mec en discussion avec Victor. Maintenant c'est lui qui papote au lieu de jouer.

Enfin, il prend sa course d élan. Toujours la même, il veut la placer dans la lucarne gauche. J'ai assisté à beaucoup de ses matchs et je le connais par cœur. Je m'étonne encore comment Aaron peut se laisser surprendre.

Normalement, c'est une frappe roulée pour la mettre hors de portée du gardien trop avancé. Mais en restant, sur ma ligne, je l'oblige à tirer plus fort et donc avec moins d'effet. Je vais le piéger.

Du coin de l'œil, je vois Victor qui se déplace sur la gauche. Mais, je ne fais pas plus attention, c'est Nathan le tireur.

Mais je reste concentrée sur Nathan. Il m'observe et il me voit campée sur ma ligne de but.

Il fait une moue, je l'ai piégé. Il commence sa course, je m'avance rapidement de deux ou trois mètres. Trop tard pour qu'il change son tir.

La balle part comme prévu en hauteur direction l'angle gauche de mes cages vite, et avec moins d'effet. En ayant anticipé, j'ai gagné quelques fractions secondes précieuses. Un pas chassé sur la gauche, en pliant au maximum mes jambes, je me détends brusquement. Comme des ressorts, muscles tendus, je me détends. Comme on m'avait appris plus jeune, et comme font les gardiens, pour aller chercher ses ballons, j'utile le bras droit. Main ouverte, pour gagner quelques dizaines de millimètres. Mes doigts touchent le ballon. D'un mouvement de cuillère, je dévie le ballon.

Mes yeux fixent le ballon qui s'éloigne de mes buts pour revenir sur le terrain longeant la ligne. Je souris en retombant au sol, en me réceptionnant sur mes mains comme une chatte.

Mon sourire se fige, car je vois Victor s'élançait en direction du ballon.

Je me redresse d'un bond, mais je suis trop loin de la balle pour l'attraper avant. L'angle est étroit pour marquer. Je m'élance comme sur son tir précédent, bras écartés.

Il y met toute sa force.

« Ungggghhh... » Je serre les dents pour ne pas hurler, tellement j'ai mal. Je viens de prendre le ballon en pleine poitrine. Putain, je déguste. Mes jambes flageolent mais je reste miraculeusement debout. Les yeux embués de larmes de douleur, je n'arrive plus à distinguer ni Victor, ni le ballon.

Quand je le vois, c'est qu'il n'est plus qu'à quelques centimètres de mon visage. Trop tard pour mettre les mains.

« Arghh... » Je prends un boulet en pleine tête. Un voile noir devant les yeux, je tombe à la renverse. Le dos puis l'arrière de mon crâne heurtent le sol terreux.

J'ai les oreilles qui bourdonnent et comme l'impression d'avoir la tête prise dans un étau. Je place mes mains et mes avant-bras sur le visage, comme le protéger et pour soulager la pression douloureuse qui vrille ma tête. Pudiquement, ça cache mes larmes. Pudeur, encore qui m'empêche de poser mes mains sur ma poitrine. Mes seins martyrisés, dans le soutien-gorge de sport, hurlent leurs douleurs intenses dans mon cerveau.

Des pas sourds s'approchent de moi. Je tourne la tête sur la gauche, et je le vois ; le ballon est là. En dehors de mes cages, hors des limites.

Je souris ou plutôt je grimace. J'ai réussi, aucun des mecs ne m'a marqué de buts.

Rien à dire, je suis une bonne gardienne. Mais c'est dure.





C'est aussi du vécu. Se prendre des ballons, quelquefois très forts et à bout portant, fait partie du poste. Il faut avoir un grain de folie. Et en tant que goal, lors de matchs avec les garçons, je me suis prise de sacrés boulets et pas mal de chocs. 

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