Chapitre septième : littérature passionnée.

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Elle est passionnée.
Elle lit des poèmes, des contes, des essais philosophiques avec le même entrain, comme transcendée par les mots qui s'offrent à elle. Elle les accepte avec une folie joyeuse et surprenante. Elle s'exclame des drames littéraires, analyse les œuvres comme un propre auteur envers son œuvre. Elle observe ses élèves avec ce regard d'intérêt naïf qu'elle porte à l'enseignement et la transmission des savoirs littéraires ou autres classiques.

Elle est passionnée.
Elle porte des robes fleuries, des jupes à dentelles, des pantalons tailles basses. Elle a un style maintenant démodé. Mais elle le porte tout de même. Elle est gracieuse. On pourrait dire qu'elle se fait vielle. C'est faux, elle se fait mûre. Elle est mère de famille. Elle a de la compassion dans les yeux, de l'amusement, de la tendresse aussi parfois. Elle rigole facilement, elle est ouverte à toutes opinions. Elle est curieuse, elle veut savoir toutes les blagues, tous les murmures qui se transmettent dans sa classe.

Elle est passionnée.
Elle est gentille. Elle s'intéresse à toutes les interprétations. Cela l'amuse et l'intrigue. Elle n'a pas l'arrogance de penser qu'elle sait tout. Elle apprend toujours et encore de ses élèves. Elle se déplace avec énergie, presque en sautillant, balayant la salle du regard et s'arrêtant sur chacun. Car chacun a un avis. Et elle demande à chacun individuellement "Et qu'en pensez-vous ?". Sa voix est belle, douce, presque maternelle. Sa bienveillance est telle qu'une irrépressible envie se développe : celle de lui répondre, de lui raconter sa vie, lui expliquer son œuvre préféré, de pleurer la situation tragique d'un personnage, sans honte. Se laisser bercer par sa voix, écouter avec curiosité son avis, sa réponse, rigoler à ses blagues. A-t-elle plutôt une présence réconfortante et nostalgique ou bien une présence de confiance et d'excitation ? Pouvons-nous nous installer chaudement devant un film d'auteur, thé au lait dans les mains ? Ou serions-nous plutôt des lecteurs et lectrices de poèmes et nouvelles en journée dans le jardin de roses, thé et gâteaux sur la petite table d'extérieur ? Serions-nous famille ou meilleurs amis ? Aucun des deux. Elle est là mais elle est si loin. Elle est assise au bureau sur l'estrade, les élèves, plus bas, ne sont pas à la même hauteur. Il n'est pas d'usage de se familiariser avec un professeur. Alors c'est peut-être pour ça qu'elle est si amicale. Elle ressent la différence. Elle la ressent, mais ne la conçoit pas. C'est pour cela qu'elle regarde les élèves, qu'elle leur parle, que, parfois, elle descend de l'estrade et marche entre les rangs. Elle est jeune. son esprit est vif, parfois elle oublie, elle n'est pas toute rigoureuse, mais elle finit toujours par parvenir à faire ce qu'elle souhaite, suivre le fil conducteur. Son enthousiasme est son guide.
Elle se retrouvera à la fin, encore une fois, passionnée.

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