Hebdocriture [OS]

Gavoha

          Pour ce premier sujet, nous devions respecter ceci :

Votre personnage devra se nettoyer (douche, bain...). Il vous faut narrer l'histoire à la troisième personne.

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Après vingt et un ans d'existence, le tour de Koban fut venu. Lorsqu'il entendit Maître Hadon prononcer son nom, une vague d'émotions le submergea. Le bonheur d'être élu si jeune, la satisfaction d'avoir été remarqué, mais aussi l'angoisse de ce qui allait lui arriver pendant la cérémonie et la tristesse de devoir partir si tôt.

La foule hurla sa joie, le félicita et l'acclama, sa famille le serrant dans les bras, la fierté illuminant leurs yeux. C'était son moment, celui que tout le monde rêvait de vivre dans la cité. Et il le vivait comme tel. Dans un état onirique, tout devint plus intense autour de lui. Les bruits que faisaient les pieds qui martelaient le sol, les odeurs qui pénétraient ses narines, les tapes amicales de ses camarades et d'inconnus, la couleur des fleurs qui ornaient les cheveux des habitants. Tout était si fort que la scène qu'il vivait devint devint floue, brumeuse.

Il se laissa entraîner par deux escortes envoyées par le Maître Hadon, plongé dans ses pensées toutes aussi nébuleuses que son ressenti. Il avait été choisi, ses efforts pour devenir sage avaient été remarqués, tout comme son dévouement pour la cité. Il traversa la foule hystérique et monta les marches de l'Aletah. Depuis sa plus tendre enfance, il se demandait ce que cela pouvait faire ressentir à celui qui les franchissait. Aujourd'hui, il le savait. Toutes les émotions possibles et imaginables tournoyaient dans sa tête et son cœur, chaque seconde de sa vie défilait férocement devant ses yeux. Mais, en même temps, il ne ressentait rien, il était vide, il ne pensait plus, il n'était qu'une simple poupée guidée vers le Gavoha. C'était une sensation invraisemblable que nul ne pouvait connaître sans être passé par là.

Lorsqu'il reprit ses esprits, Koban était devant de grandes portes. Les grandes portes. Une fois franchies, aucun retour en arrière ne serait possible. Il est déjà trop tard de toute manière. Les deux escortes s'éloignèrent de quelques pas et se positionnèrent à ras des murs, fusionnant avec la décoration. Il inspira une grande bouffée d'air et poussa les deux obstacles. Ils étaient lourds. Lourds de significations. La cérémonie allait commencer.

Il se retrouva dans une grotte. L'air était humide, les parois de pierres suintaient de liquide. Face à lui se trouvait le lac Gavoha. Seuls les élus et le Maître Hadon étaient autorisés à l'approcher. Ne sachant quoi faire, Koban avança de quelques pas avant de se figer lorsque les portes se refermèrent derrière lui. Le maître Hadon sortit de la cachette que lui offrait un pilier de pierre et s'avança jusqu'au bord du lac, sur une pierre surélevée.

_ Viens, mon garçon, l'heure de la purification est venue.

La coutume était telle que seuls l'éclat des gouttes d'eau et la voix du Maître étaient autorisées à  briser le silence qui régnait dans la grotte, sauf si ce dernier sollicitait une réponse de la part de l'élu. Koban avait appris chaque leçon qui lui avait été donnée et les appliqua. Il marcha lentement vers le lac, cachant son angoisse, jusqu'à ce que ses orteils touchent le bord de l'eau. Il se déshabilla ensuite, intimidé par le regard que lui portait le Maître Hadon. Il n'avait pas peur, cet endroit l'apaisait et commençait à endiguer toute trace d'émotion négative. Il pénétra dans l'eau, frissonnant lorsque la fraîcheur atteignit ses hanches.

_ Ô grand et majestueux Elohim, commença à chantonner Maître Hadon de sa voix grave et puissante qui fit vibrer la roche. Entends ma prière.

Koban hésita un instant avant d'entreprendre de se laver. Il se saisit de l'eau dans une main et la passa sur son bras, puis recommença pour s'occuper de l'autre, ses yeux rivés sur sa tâche. Il devait se purifier.

_ Notre élu a franchi l'Aletah et s'est ainsi montré digne d'entrer dans le Gavoha, continua l'homme en levant ses mains au-dessus de sa tête.

Le jeune homme se frotta le torse et les jambes en tremblant. Le faisait-il correctement ? Allait-il être purifié de tout ? Malgré la fierté d'être choisi, la peur le gagnait de nouveau. Après tout, il ignorait ce qui allait se passer, personne ne savait ce qui arrivait aux élus une fois qu'ils franchissaient les grandes portes.

_ De sa pleine volonté, il t'est offert. Notre cité te remercie de ta bienveillance, de ta sagesse et de ta protection.

L'entièreté de la grotte se mit à vibrer. Il arrive. Pour moi. L'angoisse qui s'était emparée de lui s'estompa pour laisser place à la hâte, à l'attente et à l'amour. Un amour inconditionnel qui rendit Koban dans un état onirique une nouvelle fois. Mais contrairement à avant, ça n'était pas la folie du moment qui en était la cause, mais autre chose. Quelque chose de grand, de fort, d'invisible. Koban eut pour dernière sensation une gigantesque main apaisante se posant sur l'entièreté de son corps. Il ne fit pas attention aux vaguelettes qui troublaient désormais la surface de l'eau du lac qui était pourtant si calme, à l'eau qui s'écoulait désormais avec abondance du plafond ni aux grondements qui résonnaient partout et nul part à la fois. Sans même s'en rendre compte, il se retrouva entièrement dans l'eau, la tête immergée. Il ferma les yeux. Il n'avait plus peur. Il l'attendait, il était dévoué, il l'aimait.

_ Empare-toi de l'élu désormais purifié par le lac Gavoha, soumets-le à tes pleins pouvoirs et désirs. Absorbe-le, finit le maître Hadon avec un air grave et sérieux collé au visage, les yeux rivés vers le corps du jeune homme qui se disloqua dans l'eau, telle une feuille de papier.

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Korbann (קרבן) : sacrifice en hébreu.

Haadonn (האדון) : maître en hébreu.

'aletah (עלתה) : montée en hébreu.

gavoha (גבוה) : haut en hébreu.