𝟕 - 𝑙𝑎 𝑔𝑟𝑒𝑛𝑎𝑑𝑒

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Quelques jours plus tard, Richiko était de nouveau sur pieds, aussi maladroitement qu'elle l'était avant ce maudit incident. Elle marchait encore comme un vieillard qui a perdu sa canne mais le médecin qui s'occupait d'elle avait estimé qu'elle pouvait partir. Le jour de son départ, le personnel soignant lui avait dit de bien faire attention à ses bandages, de manger sainement et d'être sage.

Des conseils étranges, mais pas si bizarres quand on savait que l'hôpital appartenait à la famille de sa mère, les Shinoda. Voilà un détail qu'elle avait complètement oublié de préciser à Mikey et les autres. Elle s'était arrêtée tout net en pleine rue, quand elle s'en était rendue compte, bloquant le passage à quelques passant dans le même temps. Puis elle reprit son chemin, se disant finalement que ce n'était pas grand chose.

Car plus important, elle avait un rendez-vous aujourd'hui. Et étonnamment, c'était avec son père dont elle n'avait pas aperçu un seul cheveux depuis quelques semaines. Richiko avait brillamment réussi — elle s'en félicitait encore — à négocier une entrevue, ou plutôt un déjeuner. Ce fut loin d'être une partie de plaisir ; presque aussi difficile et douloureux que de changer ses pansements infectés.

Mais c'était acté et la jeune fille avait décidé qu'ils se retrouveraient dans un restaurant familial, non loin du carrefour de Shibuya.

Le visage pas loin d'être momifié, Richiko avait choisi une table un peu éloignée de l'entrée, pour on-ne-sait quelle raison. Au bout d'un moment, après avoir longuement léché la carte des yeux, un serveur apparût presque précipitamment à sa table en sortant son carnet dont quelques pages avaient déjà été arrachées. Il commença à demander :

— Qu'est-ce que-

Ce jeune homme, qui avait la tête à l'ouest jusqu'à ce qu'il aperçoive les grands yeux de Richiko le dévisager, sembla soudain fauché par une surprise qui le fit suer légèrement. Il articula dans un mauvais, très mauvais anglais :

Oh exukiuse me, I don'tu speaku englishu.

— Moi non plus ? rétorqua Richiko en plissant les yeux de méfiance.

— Waw, mais vous parlez super bien japonais.

— Merci ?

— D'où vous venez ?

— Du ventre de ma mère ?

— Non, je veux dire, reprit-il en secouant la tête. Quelle est votre nationalité ?

— Japonaise ? grimaça Richiko. J'ai du mal à saisir où vous voulez en venir.

Elle le fixait avec tellement d'incompréhension que le serveur déglutit.

— Nul part. Bref, qu'est-ce que je vous sers ?

Sans prendre en compte le regard perplexe du garçon qui la fixait, Richiko commanda — et dans un japonais sans accent ! — deux ou trois menus qui pourraient faire taire son ventre qui criait famine. En partant, le serveur l'observait encore de ses yeux emplis d'une curiosité bizarre mais Richiko tapait des pieds dans la banquette sans le regarder.

Lorsqu'elle eut reçut sa — ou plutôt ses — commande, la porte du restaurant claqua, avec un son d'émission TV surjouée et abrutissante sur les bords. Elle regarda un homme grand et séduisant pénétrer dans le restaurant, attirant quelques regards.

Tout essoufflé, comme un soufflé raté et tout transpirant, il était arrivé en se dandinant sans prétention dans un costume à peine fermé. La sueur qui émanait de son corps entier donnait l'impression qu'il venait de tirer son coup, juste avant d'entrer dans ce restaurant, soupirant de satisfaction. Il essayait tant bien que mal de boutonner sa chemise toute blanche, tout rayonnante, tandis que ses boutons agissaient de manière chaotique.

science infuse | tokyo revengersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant