Comme prévu, une fourgonnette s'était arrêtée à l'arrière de la quincaillerie, qui proposait également la location de petits équipements industriels. Cela intéressait les trois hommes qui baissèrent leurs cagoules en sortant de la voiture, laissant les doubles portes arrière ouvertes et déployant une rampe. Cependant, ils ne remarquèrent pas la présence d'Antonin, dissimulé derrière une pile de palettes. Antonin sortit discrètement et retira simplement la clé du contact pendant que les trois hommes faisaient le tour pour forcer la porte de l'entrepôt. Leur amateurisme était affligeant. Garée près de la route pour pouvoir fuir rapidement, leur approche prolongeait le temps nécessaire pour charger les objets et effectuer les allers-retours. Selon les consignes données, les policiers devaient intervenir dès que l'effraction serait commise, en flagrant délit.
« Go ! »
Les voleurs furent rapidement plaqués au sol et menottés à l'aide d'attaches en nylon autobloquantes avant même d'avoir pu poser un pied dans l'entrepôt. Rapidité et précision, c'étaient là les spécialités de l'équipe. Ces individus stupides étaient venus armés d'un fusil de chasse, ce qui ne jouait pas en leur faveur auprès des forces de l'ordre. Antonin s'éloigna pour prévenir la gendarmerie, puis il remercia son équipe et les envoya poursuivre leurs autres rondes, pendant qu'il patientait tranquillement en sirotant son café dans son thermos. Une quinzaine de minutes plus tard, les gendarmes arrivèrent et emmenèrent les malfrats. Ils informèrent Antonin qu'il s'agissait d'ouvriers roumains travaillant illégalement, qui se fournissaient en matériel en cambriolant des commerces. Cette information ne le surprit guère. Il resta sur place jusqu'à l'arrivée du propriétaire, à qui il remit un constat d'arrestation ainsi que les coordonnées du gendarme à contacter pour obtenir une copie de celui-ci. Une réparation mineure, mais sécuritaire, fut effectuée et photographiée pour être envoyée à l'assureur qui le dédommagerait sans impact sur sa prime d'assurance.
Antonin remonta dans sa voiture et, en regardant l'heure, décida de se diriger vers un bar situé plus bas dans la vallée. Il espérait y trouver de la compagnie pour finir la soirée, ou peut-être simplement profiter d'une aventure éphémère sur le parking. Il n'était pas très regardant lorsqu'il était deux heures du matin.
Quand il se gara, il ne restait plus qu'une voiture et personne à l'horizon lorsqu'il ouvrit la porte.
« Salut Anto ! » sourit la barmaid.
« Salut Aurélie », dit-il en lui rendant son sourire.
« Tu te souviens enfin de mon prénom ? »
« Je n'avais pas les idées claires ce matin, la nuit a été courte et, comme tu peux le constater, je viens de finir de bosser. »
« Mon pauvre chou. Qu'est-ce que je peux faire pour toi ? Je vais bientôt fermer. »
« Tu as besoin de compagnie ? »
« Je t'offre un coup, et plus tard tu m'en offres un en retour ? » demanda-t-elle en s'accoudant au comptoir, son décolleté laissant entrevoir une nuit bien remplie.
Antonin savait que flirter avec Aurélie était simple, sans complications ni prises de tête. Si quelqu'un lui plaisait et n'était pas trop timide face à son tempérament, il avait toutes les chances de passer une nuit sexuellement intense. Aurélie n'était pas du genre farouche. Amoureuse de la vie, elle saisissait toutes les opportunités qu'elle lui offrait. Elle avait un faible pour les femmes en moto, mais pas les touristes, les vraies bikers, tout comme celles qui conduisent des camions. Les femmes viriles, tatouées de préférence, c'était son truc. Ça et les cicatrices. Alors, quand Antonin lui montra sa cicatrice de Kalachnikov sur l'épaule en tirant sur son tee-shirt, Aurélie n'hésita pas. Elle enjamba le comptoir et s'écarta les cuisses, pour ainsi dire. Aurélie était loin d'être compliquée.
Antonin, aidant Aurélie à fermer le bar, la suivit chez elle où ils se dirigèrent directement sous la douche, sautant les préliminaires. Il était impatient de se coucher. La journée avait été longue.
Avant de le chevaucher comme le Ghost Rider sur sa moto, Aurélie prit le temps de caresser et lécher sa cicatrice avec attention, comme à chaque fois. Parfois, Antonin se sentait coupable d'être un salaud. Nathalie serait amplement à la hauteur de ses critères et de ses besoins. Mais il leur manquait quelque chose, quelque chose d'indéfinissable qui lui ferait ressentir ces fameux papillons dans le ventre que l'on est supposé avoir lorsque l'on est amoureux. Car, au fond, c'était là le problème d'Antonin. Il n'avait jamais été réellement amoureux.
Antonin appréciait Aurélie, qui était l'exact opposé de Nathalie. Alors que Nathalie était sportive dans le sens du yoga et du jogging, Aurélie était plutôt brutale et musclée. Soulever des caisses de bouteilles, des fûts, ça forge des muscles et il en faut pour faire face à ceux qui ont mauvais caractère à cause de l'alcool, ce qui est souvent le cas. Alors que Nathalie distribuait des punitions et des devoirs, Aurélie distribuait des punitions et des coups. Mais là où les deux se rejoignaient, c'était au lit. De sauvages, elles devenaient câlines une fois que tout était fini, se blottissant contre lui en ronronnant. Antonin se retrouvait à la fois en Aurélie, avec son amour un peu brutal et sans prise de tête, et en Nathalie par ce qu'elle projetait et ses aspirations.
Un rayon de soleil vint réveiller Antonin, donnant l'impression qu'il avait à peine fermé les yeux. Il marmonna en observant sa voisine endormie, la tête enfouie sous la couette. Antonin se leva avec précaution, veillant à ne pas la réveiller. Il s'habilla tout aussi discrètement et, avant de partir, il laissa un mot affectueux sur le miroir de la salle de bain. Il savait que les femmes appréciaient ce genre d'attention, pour éviter qu'elle pense qu'il était parti après avoir simplement assouvi ses pulsions. Malgré son attitude de dur à cuire, Aurélie avait une âme romantique. Il se souvenait d'une journée où il avait eu la chance de passer une nuit complète avec elle, et le lendemain, étant son jour de congé, Aurélie avait révélé une toute autre facette d'elle-même. Douce, affectueuse, amoureuse, elle riait en prenant son petit déjeuner. Antonin se demandait s'il était le seul à l'avoir vue dans cette véritable lumière.
Après avoir quitté le logement d'Aurélie, Antonin se rendit chez lui pour se changer et récupérer son courrier, puis il se dirigea vers ses bureaux, faisant un arrêt à la boulangerie pour faire le plein de viennoiseries. Un sourire satisfait aux lèvres après avoir parcouru les installations et salué tous les employés présents, il déposa le reste des viennoiseries dans la salle de repos avant de se rendre à son bureau. Après avoir saisi et validé les heures travaillées, Antonin passa un peu de temps à étudier ses chiffres et à ajuster son bilan prévisionnel. L'entreprise se portait bien. La plupart de ses employés étaient d'anciens militaires, ils appréciaient le cadre qui leur permettait de se réinsérer à la vie civile après avoir été en zone de guerre mais surtout l'environnement offert par l'entreprise, entourés de personnes ayant vécu les mêmes expériences. Le trouble de stress post-traumatique, le TSPT, pouvait briser même les individus les plus résistants, et le meilleur moyen de s'en sortir était de trouver du soutien auprès de camarades d'armes. C'était la vision d'Antonin, et jusqu'à présent, cela fonctionnait. C'était seulement avec eux qu'il pouvait baisser sa garde et être lui-même, sans jouer un rôle.
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Second chances Tome 1/6
RomansaBethany et Kara connaissent l'envers du décor, vivre à Los Angeles n'est pas forcément glamour et glorieux. Profitant de vacances en France, elles rencontrent deux anglaises, Abigail et Tilly, errant sur les routes, recherchées par la police britann...