Chapitre 21

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Les quatre filles descendirent des voitures et s'approchèrent en se tenant par la main, sous le regard à la fois inquiet et amusé de Pierre, Caroline et Sophie. Les deux Anglaises prirent place à l'extrémité de la table, à côté de Kara et Bethany, afin de pouvoir engager la conversation et d'avoir leurs traductrices à portée de main. N'ayant pas pu participer à la préparation du dîner, Tilly donna un petit coup à Kara pour attirer son attention et demanda si elles avaient de la farine, des œufs et de la levure. Kara confirma et traduisit que Tilly prévoyait de préparer du pain et des croissants faits maison pour le petit-déjeuner du lendemain.

« Oui, Madame ? » demanda-t-elle en regardant Sophie.

Sophie demanda à Kara de traduire qu'il n'était pas nécessaire de s'en préoccuper, qu'ils étaient ravis de les accueillir. Bien entendu, Kara ne traduisit pas cette partie, ce qui provoqua un éclat de rire chez Bethany.

« Oui, bon crescent *», sourit Tilly, fière de montrer ses talents.

« Que lui as-tu traduit, ma fille ? » s'inquiéta Sophie.

« Que nous avons hâte d'y goûter », plaisanta Kara en rigolant.

Kara et Bethany firent de leur mieux pour mettre les filles à l'aise, malgré la barrière de la langue. Le langage universel de la charité et de la gentillesse eut l'effet escompté. Pierre proposa une petite marche à Kara, comme lorsqu'elle était petite, afin de discuter avant qu'il ne reprenne la route tôt le lendemain matin. Bethany, de son côté, alla faire la vaisselle avec les filles, laissant Sophie et Caroline profiter du reste de la soirée. Bethany continuait de persuader Abigail de rentrer chez elle avec Tilly, pour retrouver ses parents, ce qui faisait d'elle celle qui avait sauvé leur fille.

Pierre prit la main de Kara, comme auparavant, ce geste lui arracha un sourire.

« Je t'aime ma puce, je tiens à ce que tu le saches. Je ne prétendrai pas comprendre pourquoi tu fais ce que tu fais, mais je vois que tu as un bon fond. Tu viens en aide à ces deux filles, et ça me touche de te voir agir ainsi, toi qui étais si réservée. J'ai tellement de mal, tu sais, tellement de mal avec ton métier. Cela me déchire le cœur, ma puce. Depuis que je le sais, ça me perturbe, je n'y arrive pas, c'est tellement incompatible avec... toi. Bethany est plus... Je ne trouve même pas les mots. »

« Papa, je t'aime, mais je déteste être jugée, que nous soyons jugées, Bethany et moi, en fonction de notre travail. Nous ne sommes pas différentes des autres. Beaucoup de personnes détestent leur travail, mais le font parce que c'est une nécessité. Tout le monde a un loyer et des factures à payer, tout le monde a besoin de se nourrir. Notre travail ne définit pas qui nous sommes, c'est souvent une obligation plutôt qu'un choix. Nous voulons reprendre notre destin en main, je te l'ai dit, mais ce n'est pas si facile. Quant à Bethany, tu vois, c'est assez simple. J'ai eu des relations avec des hommes, des femmes, même des personnes transgenres. J'y trouvais du plaisir, je satisfaisais un besoin physique, mais je ne ressentais jamais l'étincelle de l'amour, il y avait toujours un vide en moi. Et puis, il y a eu Bethany. Il y avait les tournages et aussi les moments ordinaires que je passais avec Bethany dans ma vie quotidienne, comme une amie, jusqu'à ce que je réalise récemment qu'elle et moi, c'était une évidence. Bethany dont je me languis de retrouver pour aller regarder un film, boire un verre, aller manger au resto ou simplement rester chez l'un de nous. C'était tellement évident que je ne le voyais pas. Bethany est bien plus qu'une amie ou un plan cul occasionnel, désolée d'être crue, Papa, mais tu vois, elle me fait vibrer. C'est comme si nous étions connectées toutes les deux par un lien invisible qui ne cesse de grandir et de se renforcer au fil du temps. Quand je suis avec elle, plus rien d'autre n'a d'importance que l'instant présent. Je l'aime et je ne peux même pas imaginer l'amour qu'elle éprouve pour moi. Je peux le lire dans ses yeux. Je veux juste que tu saches que nous allons arrêter cette vie, comme je te l'ai dit, et que nous allons ouvrir notre propre commerce. Aie confiance en nous, s'il te plaît.

Second chances Tome 1/6Où les histoires vivent. Découvrez maintenant