CHAPITRE VINGT-HUIT

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CAMERON 

Je ne l'ai pas vu de mes propres yeux mais je sais qu'elle est là, à Seattle, pas très loin de moi. C'est comme si j'avais un radar dans le corps qui m'indiquait qu'Emery est à proximité. Je n'ai pas besoin de la voir pour en être certain. J'ai l'impression de sentir sa présence à chaque coin de rue. Comme elle l'a déjà fait si souvent avant, elle s'imprègne de mon espace vitale et s'approprie l'air qui est normalement le mien. Je ne peux pas faire comme si je ne ressentais rien. Je me mentirai à moi-même.

Elle est ici, je le sens jusque dans mes tripes. J'ignore quand elle est arrivée mais je sais qu'elle n'est pas loin. Mon instinct me le crie depuis hier déjà. Je suppose qu'Evy lui a conseillé de ne pas précipiter son départ mais qu'Emery n'en a fait qu'à sa tête. Je la connais encore assez bien pour savoir qu'elle a probablement dû prendre le premier vol pour rejoindre sa mère à Seattle. Emery est trop protectrice avant son petit monde pour atteindre que les choses s'arrangent sans elle.

Contrairement à ce que je pensais, le fait de la savoir à quelques kilomètres de là me tue. J'avais imaginé que ce détail me perturberait le temps de quelques heures et puis que je finirai par m'y faire et passe outre. Je crois dur comme fer que sa présence ici ne m'atteindrait pas.

Seulement, je m'étais lourdement trompé. Je n'arrête pas d'y penser et je ne peux pas m'en empêcher malgré tous les efforts du monde. J'ai été à côté de la plaque toute la journée. Tout le monde au salon a été contraint de s'y reprend à deux fois pour m'interpeller. C'est comme si je n'étais pas vraiment présent. Mon esprit me joue des tours et influe sur ma capacité d'attention aux autres.

Allez, reprend-toi, ducon.

Il est déjà vingt-et-une heure et je suis toujours dans mon bureau à rêvasser devant une tonne de papiers à remplir. J'aurai dû finir ça depuis une bonne demi-heure déjà mais j'ai passé le plus clair de mon temps à ressasser tout un tas de choses vis-à-vis d'Emery. Je suis loin d'avoir terminé mon travail et je vais y passer la nuit si je ne m'active pas plus que ça.

Je me replonge tant bien que mal dans les documents administratifs éparpillés sur mon bureau. Je profite du silence qui règne dans le salon après sa fermeture pour me concentrer sur ma tâche. Les lieux sont vides. Tout le monde, employés et clients, sont parti depuis bien longtemps. Je dois à tout prix sauter sur cette occasion pour rattraper mon travail en retard.

Malgré tous mes efforts, mon entreprise est vaine. Je me trouve dans une situation telle que je suis incapable de me concentrer sur quoi que ce soit d'autre que sur ce qui se trame dans ma tête. Je ne mets pas bien longtemps avant d'abandonner.

Poussant un lourd soupir, je m'affale de nouveau dans mon siège, lève les jambes pour les laisser retomber lourdement sur le bureau et sors mon téléphone de ma poche. Je perds plusieurs minutes de mon temps à faire un tour sur les réseaux sociaux. Je réponds à quelques messages de ma mère ou de mes collègues.

Très vite, mes doigts pianotent sur l'écran pour ouvrir l'application photo. J'ouvre l'album qui m'intéresse et me replonge dans des souvenirs qui datent de longtemps. Je ne devrais pas faire ça mais il faut croire que j'aime me faire du mal. Je fais défiler les quelques photos que j'ai gardé d'Emery alors que mon coeur me semble être plus lourd que d'habitude.

Elle paraît si insouciante et amoureuse sur ces photos. Elle n'a pas vraiment changé physiquement mais elle semble plus libérée et moins adulte sur ces clichés. Elle sourit à chaque fois, que ce soit à pleines dents ou du bout des lèvres. Quelque chose de lumineux brille dans son regard quand elle fixe l'objectif. Elle dégage un charme que nulle autre ne pourrait concurrencer. Ces photos sont les preuves incontestables de sa beauté.

THE WAY - LE DILEMMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant