Chapitre 13 : Cinn

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Après qu'elle eut fui sa maison, Jade se retrouvait sans rien. Pas un sou, pas de famille ni amis sur qui compter, elle ne possédait qu'un simple sac de provisions qui s'épuisait rapidement.

Le sort semblait s'acharner contre elle: cinq jours qu'elle marchait, et pas la moindre trace de vie humaine.
Elle ne pouvait pas non plus compter sur ses facultés magiques qui l'avaient abandonnée depuis longtemps, par manque d'énergie.
Bien que Jade refusait de croire que la déesse Artemis l'avait laissée tomber, il fallait se rendre à l'évidence... La divinité semblait s'être totalement désintéressée d'elle.
"Après tout, je ne suis qu'une pauvre paysanne, parmi tant d'autre... Comment un être aussi grandiose qu'elle pourrait daigner s'intéresser à moi? Peut être m'a-t'elle menti? Peut être ne suis-je pas sa fille?" songea-t'elle pour la centième fois.
Ce doute la rongeait jours et nuits. Si bien que, tenaillée par la faim et l'angoisse, elle passait ses nuits à se lamenter sur son sort, et ne dormait quasiment plus.
La petite se redressa brusquement, des perles de sueur coulaient le long de son front. Ses yeux étaient écarquillés, et on lisait la terreur à l'intérieur. Elle venait de faire un nouveau rêve. Encore un rêve prémonitoire. Ce don de voir l'avenir à travers ses songes était horriblement pesant. Stressant. Elle se souvenait des crises qu'elle piquait lorsqu'elle en faisait. Ils lui faisaient perdre la raison, elle était en pleine crise de larmes, elle devenait folle, presque.
Elle ramassa ses quelques affaires, jeta le sac sur son dos et courut à travers la forêt plongée dans la pénombre, à la recherche d'un point d'eau. Elle ne se préoccupait même pas des craquements, hululements, qu'on pouvait entendre. Elle piqua un sprint et s'affala devant le ruisseau le plus proche. Jade se passa l'eau glacé sur son visage déjà trempé, tout en essayant de se calmer. Comme toujours, ses rêves portaient sur l'apocalypse, une mort imminente ou un funeste présage. Rien de rassurant lorsqu'on se trouvait seule au milieu d'une forêt.
Soudain elle aperçu, dans le reflet de l'eau, une ombre traverser les arbres. Jade se retourna lentement et sortit un couteau de son sac.
Elle attendait, arme pointée, aux aguets.
Une jeune fille d'une douzaine d'années émergea brusquement des buissons, arc bandé. Jade eut un sursaut, s'apprêtant plutôt à voir une bête sauvage.
- Je te conseille de lâcher ton poignard, lui dit l'étrangère.
Bien que méfiante, elle lui obéit, voyant qu'elle n'avait pas l'avantage face à un arc.
- Que fais tu ici? Tu es sur le terrain des Chasseresses, et nous avons donc le droit de te mettre à mort, jeune insolente.
Jade releva un sourcil, étonnée. Qui était cette fille?
- Qui es tu? la questionna-t-elle.
Apparemment agacée, la jeune fille lui répondit à contre cœur.
- Mon nom est Cinn, étrangère. Les gens d'une race inférieure comme la tienne ne connaissent malheureusement pas notre existence, ou choisissent de l'ignorer. Vous êtes bien stupide, ajouta-t-elle avec une moue dégoûtée.
Jade se sentir insultée, et releva fièrement la tête, décidée à montrer à cette gamine qu'elle ne s'adressait pas à n'importe qui.
- Je suis Jade Kay, du clan Elfe, et ne suis nullement inférieure à toi. La preuve, tu me menace de ton arme alors que je suis sans défense. Tu as intérêt à changer de ton, je ne suis guère stupide.
Cinn, piquée au vif par sa remarque, abaissa son arme.
- Mais que fait une Elfe aussi loin de chez elle? La belle vie ne lui convient plus? demanda la jeune femme aux cheveux noir de jais, une pointe de moquerie dans la voix.
Voyant qu'elle avait réussit à bloquer Jade, elle reprit :
- Je n'ai guère envie d'écouter tes lamentations. Tu t'expliqueras au campement.
La blonde aux yeux verts feuilles bouillonnait intérieurement, mais de nature plutôt douce, réussit à se calmer et suivit Cinn à travers les arbres. Après tout, c'était soit ça, soit mourir de faim au milieu de nul part.
- Où allons-nous? demanda Jade au bout d'un moment.
Cinn se retourna, faisant claquer ses cheveux ébène. Elle la dévisagea comme si elle était une attardée mentale.
- Au repère des Chasseresses d'Artemis, bien entendu.

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