Cuillère en bois (85)

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La lumière qui lui transperça la rétine quand Harry souleva les paupières l'aveugla tant qu'il papillonna des yeux longuement avant de parvenir à soutenir cette sensation. Une main dans la sienne compressa soudainement se doigts si fort qu'il crut qu'ils allaient se briser, accompagné d'un cri jubilatoire :

- Harry, Harry tu m'entends ?! hurlait la voix d'Hermione alors qu'il voyait se dessiner son visage penché sur le sien

- Pourquoi tu hurles ? prononça-t-il faiblement

- Tu.. Es.. Un... Parfait... CRETIN ! Harry Potter ! cria soudain la voix de Ginny en lui assénant des coups entre chaque mot, On n'arrête pas de respirer si on est encore vivant !

- Mais qu'est-ce que tu.. balbutia Harry surpris de voir la rousse

- Je suis allé la chercher, admit une voix sur sa droite

Immédiatement Harry se redressa pour voir le propriétaire de cette voix, ainsi que de la main dans la sienne, lui tombant à moitié dessus dans l'équilibre précaire que sa rémission lui imposait :

- Drago ! Tu vas bien ? s'exclama-t-il à son tour

- Bien mieux, maintenant ...

Il souleva alors sa manche pour qu'Harry puisse voir que le noir qui le tuait encore quelques heures auparavant avait déserté son bras, au profit d'un fin trait d'un rose discret, en forme d'éclair.

Harry, extatique, le redessina du bout de son index, comme pour s'assurer que tout ceci était bien réel, alors il plongea son regard dans le sien, empreint d'une joie incommensurable. Mais le serpentard lui rendit un regard bien plus suspicieux, avant de le saisir par la mâchoire dans un mouvement brusque qui surprit l'auror :

- Mais elle a raison, Harry, on n'arrête pas de respirer si on n'est pas mort.

Et il l'embrassa à lui couper le souffle. Quelle ironie.

Harry sentit alors que son baiser était salé, Drago avait pleuré. Alors sans cesser de l'embrasser, l'auror passa son pouce sur les joues de son partenaire, pour en retirer les dernières traces de larmes.

- Hum hum... se manifesta Ron un peu gêné

- Ron !! le reprit Hermione avec un regard noir

- Bah quoi ! Moi aussi je suis content qu'il aille bien ! Pas vrai Harry chou ? dit-il en s'approchant les lèvres protruses vers son meilleur ami

Hermione lui aplatit alors la paume de sa main droite à l'arrière du crâne, et Harry éclata de rire. Ron aussi. Même Ginny esquissa un sourire d'amusement.

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Le jour qui avait suivi la fin de la marque des ténèbres Luna et Maisy s'étaient lancées dans un voyage pour restituer les créatures magiques à leurs habitats d'origine, Ron et Hermione étaient rentrés chez eux (non sans qu'Harry n'ait immensément remercier sa meilleure amie d'avoir sauvé son petit-ami) et Ginny était retournée à l'école, avec un magnifique rapport sur la prise en soin des sorciers parasités. Alors Harry avait pris des vacances. Une « convalescence » recommandée par sa médicomage personnelle.

Il avait pris quelques affaires, sa baguette, son courage et son Drago, et ils étaient partis. Drago ignorait la destination, et il regarda Harry avec une certaine appréhension en apercevant le petit panneau « chaumière aux coquillages ».

- Tu crois que je suis une sirène ? lui demanda-t-il alors avec un sourcil arqué

Harry rit en roulant des yeux, et le poussa à l'intérieur pour découvrir avec amusement l'air sceptique de Drago se transformer à la découverte du charme de la petite bicoque.

- Après si tu ne penses pas qu'un petit séjour à deux en bord de mer peut te faire du bien... On peut s'en aller, le taquinait Harry

- Mais qui a bien pu dire une chose pareille ? soupira Drago l'air innocent en l'attrapant par les hanches pour l'embrasser

Alors le brun l'emmena s'installer dans la chambre la plus grande, jeta leurs affaires au sol et roula avec lui sur le lit. Ils allaient avoir du temps, pour s'appréhender, se découvrir, s'apprivoiser, s'aimer... C'est tout ce qu'Harry demandait après cet été fou

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A la fin du troisième jour de leur exil volontaire, alors que le coucher de soleil fondait sur la mer calme dans des reflets orange et or, Harry décida qu'il était temps de lui montrer.

Il fit sortir Drago dans l'air frais du soir, l'entraînant derrière la maison, là où il était. Là où il l'avait laissé, il y a maintenant un peu plus de deux ans. Drago s'immobilisa, il ne posa pas de questions, il n'avait pas besoin, l'épitaphe parlait d'elle-même.

« Ci-gît Dobby, elfe libre »

Après son étrange rémission, Harry avait raconté, comme il était mort, et que Dobby lui était apparu. Drago avait été si ému qu'il avait pensé à la chaumière : il devait l'y emmener.

Harry laissa le serpentard se recueillir le temps qu'il voudrait. Il l'attendrait à l'intérieur. Et le serpentard resta longuement debout face à la petite tombe. Puis il finit par s'y agenouiller, et garda cette position de longues minutes durant.

Quand Drago revint, la nuit était déjà installée dans le ciel, il passa la porte, le visage mouillé, mais apaisé, et il marcha droit sur Harry. L'auror ne bougea pas, laissant l'autre tomber lourdement sur son épaule, et l'étreindre à lui en briser les côtes.

Puis Drago se détacha, évita son regard, et fit demi-tour vers leur salle de bain. Harry ne le suivit pas, pas immédiatement du moins, il le laissait digérer cela seul d'abord.

Le gryffondor se tourna dans la cuisine, regardant à travers la vitre la petite tombe. Au milieu des chaussettes qu'il laissait, lui ou ses amis, chaque année, reposait à présent une petite cuillère en bois.

L'affaire GoldsteinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant