Roméo
Je profite de mes derniers moments ici. Ils sont tous partis et il ne me reste plus qu'Emilia. Le lycée est terminé, nous prenons tous des routes différentes maintenant. Je suis assez triste en ce moment à cause de ça mais j'essaie de relativiser. J'ai bien dit j'essaie. Parce que je n'y arrive clairement pas.
Tandis qu'Emilia est blottie dans mes bras – on dort de plus en plus ensemble ces derniers temps – je réfléchis à tout ça. Je suis réveillé depuis une petite heure, on a tous les deux un rythme de sommeil très décalé mais je m'y suis habitué. J'aime la voir dans mes bras, calme, apaisée.
Alors qu'elle remue un peu, je crois qu'elle va enfin se réveiller mais non, elle se replace correctement et se rendort, comme si de rien n'était. J'ai une meilleure vue sur son visage dans cette position. Elle est tout simplement sublime - je sais que je ne suis pas forcément objectif quand je dis ça, je suis amoureux d'elle, à mes yeux elle est même plus que sublime. Je l'aime plus que tout.
Après une heure supplémentaire d'attente sans pouvoir bouger puisqu'elle était étendue sur moi, elle émerge du sommeil.
Je dépose un baiser sur ses lèvres en guise de bonjour et je n'ai même pas le temps de faire plus qu'elle me saute dessus. Littéralement.
- Qu'est-ce que tu fais, Emmy ?
- Quelque chose me dit qu'aujourd'hui ce sont les dix huit ans d'une personne spéciale pour moi.
- Ah oui ? C'est qui ?
- Idiot.
Elle me prend dans ses bras et c'est le plus beau câlin auquel j'aie eu le droit de sa part. J'en profite pendant de longues minutes jusqu'à ce qu'elle le rompe et m'embrasse. Je ne sais pas comment elle fait pour être aussi énergique dès le réveil mais j'en profite.
J'ai dix huit ans aujourd'hui, ça ne change pas grand-chose intérieurement, je suis simplement plus libre dans mes mouvements. J'avoue que ça fait quand même un petit truc de se dire que j'ai passé ce cap.
Dès que l'on descend les marches, après encore plusieurs longues minutes dans la chambre. Je suis assailli par mes monstres préférés et mon père. Ils me souhaitent tous un bon anniversaire et me prennent dans leurs bras. Mon père a les larmes aux yeux et le voir comme ça me fend le cœur, je ne sais pas ce que ça fait de voir ses enfants grandir mais ça doit faire quelque chose d'énorme.
Une fois le petit déjeuner pris, je reste un peu à table, à traîner sur mon téléphone. Emilia est partie avec Lisa, elle voulait absolument lui montrer son nouveau livre. Elles doivent être en train de parler dans la chambre. Tout le monde a accepté ma petite amie ici, ça me fait plaisir qu'elle se soit fait une place dans la famille. Je ne sais pas comment j'aurais fait autrement. Je suis heureux qu'elle puisse venir ici quand ça ne va pas chez elle. D'ailleurs, c'est trop fréquent à mon goût. Je sens bien qu'elle ne va pas très bien à cause de ça mais elle n'en parle pas et je ne veux pas lui forcer la main.
J'arrête de faire défiler la page sur mon téléphone quand je comprends que je ne suis pas attentif à ce que je fais, trop perdu dans mes pensées pour ça.
J'ai dix huit ans aujourd'hui et maman n'est pas là, tout comme Carla, Alexis et Rafe. Toutes ces personnes qui comptent pour moi ne sont pas ici. Je ne leur en veux pas, c'est la vie, c'est normal. Mais j'avoue que passer ce moment avec eux m'aurait donné une bonne dose d'énergie.
Ils ne m'ont tout de même pas oublié : dès huit heures, des messages sont arrivés en masse sur le groupe, mon téléphone n'arrivait plus à suivre leur débit. Ils m'ont fait rire.
Maintenant je pense à maman, à l'émotion de papa. Je sais que lui aussi aurait voulu qu'elle soit avec nous aujourd'hui.
Je suis interrompu dans mes pensées par des bras familiers qui m'entourent.
- A quoi tu penses ?
- Ça va, ne t'inquiète pas.
- Tu es sûr ? me chuchote-t-elle à l'oreille cette fois.
- Juste un peu mélancolique, ça va passer.
- Je vois. Je suis là pour toi si tu veux parler.
- Merci.
Nous n'avons fait que chuchoter alors que nous n'avons rien à cacher. Dès qu'elle est près de moi, je me sens mieux. Sans que je ne m'en rende compte, un sourire s'est gravé sur mon visage. C'est le pouvoir d'Emilia.
Mon père passe à côté de nous et nous sourit lui aussi, tout le monde va à peu près bien aujourd'hui ça fait plaisir.
Même si je ne fais pas de grande fête ou quoi, Emilia voulait quand même marquer le coup. Elle m'emmène au cinéma, je sais qu'elle ne raffole pas trop de ça et qu'elle le fait uniquement pour moi. J'ai voulu l'en dissuader mais elle a encore eu le dernier mot.
A la fin de la séance, lorsque nous quittons la salle obscure et retrouvons la lumière du jour, je suis heureux. Je voulais tellement voir ce film et je suis scotché. Partager ce moment avec Emilia amplifie mon bonheur. Même ici nous ne nous sommes pas quittés. J'ai toujours ma main dans la sienne et jamais je ne la laisserai partir.
Nous rentrons tranquillement à la maison, apaisés. J'aime ce calme qui nous entoure, aucun de nous ne parle mais on se comprend. Tout est parfait, rien ne peut gâcher cette journée. Absolument rien.
Emilia part dans un peu plus d'une heure, elle dort chez elle ce soir à mon plus grand regret. Allongée sur moi, un livre devant elle, est elle absorbée par son bouquin. Je ne peux pas en dire autant. J'ai bien le livre dans les mains mais je suis trop distrait par ma copine. Je ne peux m'empêcher de jouer avec des mèches de ses magnifiques cheveux, c'est plus fort que moi.
J'ai beau essayer de plonger dans ma lecture, son visage m'appelle.
Je finis par l'embrasser, elle grogne un peu de mécontentement au début mais finit par en redemander, tout ce que je voulais.
Après quelques minutes dans mes bras, elle me réprimande :
- A cause de toi j'ai perdu ma page.
C'est vrai qu'elle n'a pas eu le temps de mettre son marque-page.
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Le dernier mot - Tome 1
RomanceUne rencontre dans le bus. Une passion commune qui va les rapprocher. Roméo va de mieux en mieux depuis la dure épreuve qu'il a vécue il y a trois ans. Il faut dire que la musique l'a beaucoup aidé. Entre ses amis, sa famille qu'il chérit plus que t...