La pénombre bordait la pièce, alors qu'Amaury se redressait vivement.
"— Attends, tu déconnes ?
— Est-ce que tu m'as déjà vu plaisanter Amaury ? S'il te plaît, ne rends pas la chose plus difficile qu'elle ne l'est déjà.
— Mais tu m'avais dit que tu étais né ange, que t'avais pas de parents et tout ça ! Est-ce que tu m'as déjà dit la vérité, ne serait-ce qu'une fois ?"
Et voilà, Amaury recommençait à s'énerver. L'ange aurait dû le prévoir, ça aussi. Toujours au sol, fixant l'humain maintenant assis sur son lit, Nestor se demandait quand commencer. Il savait que même s'il ne pouvait plus pleurer, ça n'empêchait pas à l'angoisse de revenir et à sa voix de craquer. Prenant une grande inspiration — quelque peu tremblante — il réunit assez de courage pour répondre.
"— Je t'ai toujours dit la vérité, Am'. Tout ce que je te cache, c'est pour me et te protéger. Je n'ai pas envie que tu me regardes avec pitié.
— Bon, balance ton histoire dramatique histoire que je dorme bientôt.
— Ça veut dire que tu pourras me pardonner après ?
— Que je te pardonne ou pas, tu vas me coller aux baskets, alors bon...
— J'ai une dernière demande, demanda presque timidement Nestor, qui continua après un hochement de tête de l'humain. J'aimerais que tu ne m'interromps pas. Je répondrai après à tes questions, si tu en as.
— Tu fais un exposé ou tu racontes ta vie, là ? Accouche, grogna Amaury, apparemment toujours en colère."
L'ange ferma les yeux, et se massa les tempes quelques instants. L'angoisse était plus difficile à gérer que prévue. Quand il les rouvrit, ses pupilles se baladait rapidement entre les quatre murs de la chambre. Cactus ayant un nouveau pot toujours sur la même fenêtre. Bureau toujours aussi désordonné. Poster manquant de se décrocher. Lit défait avec des draps très peu assortis. Et surtout, humain sur ce même lit semblant à la limite d'aller l'envoyer se faire voir. Essayant de canaliser sa vision et ses tremblements, il déglutit et commença.
"— Je suis né le 25 décembre 1987. Ce n'était pas la pire période, mais sûrement pas la meilleure. Y'avait cette espèce de compétition constante entre tout le monde, et même si la guerre était un lointain souvenir, les grands-parents, eux, ne l'avaient jamais oublié. J'ai grandi là dedans, et j'avais à peu près dix ans quand je me suis rendu compte que ma famille n'était pas comme tout le monde, en allant chez un ami. Je savais que mon père passait plus de temps au bar qu'à la maison, et que ce qu'il buvait n'était sûrement pas de l'eau, mais je n'avais vraiment jamais compris que... tu sais... quand il frappait ma mère, il ne faisait pas semblant."
Première pause. Nestor s'était stoppé de lui même, se rendant compte que ses propos commençaient à n'avoir plus aucun rapport entre eux, le stress le faisant légèrement bégayer. Maintenant, il fixait le mur, ne voulant pas voir la réaction d'Amaury. Le regardait-il avec pitié ? Sûrement, comme tout le monde au paradis, quand ils avaient appris. Ça l'avait étonné au début. Pendant son enfance, les femmes battues n'étaient pas banales, mais n'étaient pas une honte non plus. Il inspira grandement, puis repris.
"— Si ça t'inquiète, il n'a jamais levé la main sur moi, même si ça m'étonnerait, que tu t'inquiètes pour moi. Bref, j'étais seul, ma mère allait de plus en plus mal tout en essayant d'être présente et mon père faisait la tournée des bars, goûtant à tous les mélanges d'alcool possible. Et puis, je suis rentré au collège — la voix de Nestor craqua, brisant quelque peu le dernier mot. Il se racla la gorge avant de continuer — je n'ai jamais eu honte de mon prénom, tu sais. Comme tous les enfants, j'avais eu cette phase de refus envers lui, mais pas au point de le renier ou de le cacher. Mais les enfants sont stupides, et fiers. J'ai toujours eût de bonnes notes sans rien faire, et je suppose que c'est pour ça qu'au début, ils me frappaient au détour d'un couloir. Puis..."
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Il l'a maudit 5 fois
Paranormal« Tu es mort comment en fait ? » « Il ne vaut mieux pas que tu le saches... » Amaury est un adolescent avec une vie qu'on peut qualifier de 'banale'. Un groupe de pote, une petite amie qui change toutes les semaines, une mère qui le surprotège...