6.

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Rosa

— Cara ? Tu dors ?

La voix lointaine, accompagnée d'un contact hésitant, me tire brutalement de mon sommeil. Je me réveille en sursaut, déboussolée, envahie par une seule pensée : fuir. Mon regard paniqué cherche un point d'ancrage, une assurance que les démons de mes cauchemars ne sont pas revenus me hanter.

Recroquevillée sur moi-même, dos contre la tête du lit, je fixe un point imaginaire. Prisonnière de ma psychose, je murmure en boucle :

— Ne me touche pas... s'il te plaît... arrête... ne me touche pas...

Ma respiration est saccadée, mes mots se répètent comme un disque rayé, jusqu'à ce qu'une voix douce s'infiltre dans mon esprit embrouillé :

— Cara, c'est moi... Benito.

Il avance une main hésitante vers mon épaule, puis l'abandonne, craignant d'aggraver ma panique.

— Écoute, Angelo est sorti pour la journée, et il m'a donné congé — commence-t-il, cherchant à apaiser l'atmosphère — Je suis seul, et je me faisais chier.

Il se gratte la nuque, soupirant légèrement.

— Alors je me suis dit : pourquoi ne pas te faire sortir un peu d'ici ? Sans risque que tu croises Angelo... et qu'il te provoque.

Son ton devient presque encourageant, mais mon silence est pesant. Devant mon mutisme, il se racle la gorge et reprend, visiblement mal à l'aise :

— Ho preparato delle lasagne... et même un tiramisù ! — ajoute-t-il avec une pointe d'enthousiasme, me tendant la main comme une invitation — Allez, viens... ça te fera du bien.

Hésitante, je l'observe, les entrailles nouées. Mon esprit s'emballe, jonglant entre méfiance et désir d'espoir.

Ça doit être un piège.
Il doit avoir une arrière-pensée.

Mais il est le seul à se montrer gentil ici.

Il ment. C'est DeRossi qui l'a envoyé pour amorcer un piège.

Mes pensées se contredisent, m'emplissant de doutes. Pourtant, quelque chose en moi veut lui faire confiance. Avant de le suivre, je murmure d'une voix tremblante :

— Promets-moi que tu ne me feras pas de mal.

Quelle idiote, Rosa.

Il sourit doucement, presque avec tendresse :

— Je te le promets. Autre chose, Cara ?

Je réfléchis un instant. Angelo... ou plutôt le Fou... Je veux être certaine qu'il n'est pas là.

— Le Fou... il n'est vraiment pas là ?

Il rit doucement, ce qui me fait frissonner d'angoisse. Pourquoi rit-il ? Se moque-t-il de moi ? Mais son expression reste bienveillante, son regard sincère.

— Le Fou, hein ? — répète-t-il avec amusement — Je crois que je vais l'appeler comme ça aussi, ça lui va bien.

En temps normal, son commentaire m'aurait arraché un petit rire, chose que je ne lui offre pas à cet instant, étant donné que, moralement et physiquement, je ne suis pas dans le meilleur état.

Benito reprend, plus sérieux :

— Ton Fou n'est vraiment pas là. Tu peux savourer mon repas sans soucis.

Je finis par le suivre au rez-de-chaussée, où la cuisine ouverte donne sur un salon spacieux. Bien que mon estomac crie famine, la faim ne m'a jamais dérangée outre mesure, résultat des punitions alimentaires que mon père m'imposait.

BROKEN [ en réécriture ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant