Fiction OrelxGringe - Le garçon venu d'ailleurs.

Partie 12 - Le laboratoire.

Quand il se réveilla le lendemain, il se sentit enveloppé d'une douce chaleur jamais encore ressentie jusqu'ici dans sa vie. Il ouvrit les yeux doucement et ceux-ci se posèrent... sur les cheveux du plus jeune. Il eut l'impression que son cœur allait sortir de sa cage thoracique en se rappelant qu'ils avaient dormi ensemble et, surtout, en se rendant compte d'à quel point ils avaient l'air de s'être rapprochés durant la nuit. C'est vrai que le canapé n'était pas bien grand. Il baissa les yeux en se sentant tenir quelque chose et son cœur sauta à nouveau dans sa poitrine en voyant que c'était son bras qui entourait la taille d'Aurélien, celui-ci étant allongé devant lui en cuillère. Bordel. Le plus jeune semblait encore profondément endormi et il le lâcha, doucement, afin de ne pas le réveiller. Pas sans avant caresser avec délicatesse son ventre par-dessus le tee-shirt qu'il lui avait passé pour la nuit. Il se demandait si sa blessure était guérie déjà. Aurélien poussa un minuscule soupir dans son sommeil et il vint s'asseoir sur le rebord du canapé afin de l'observer un moment en silence. Cette chaleur... Si, il l'avait déjà ressentie. Bien sûr que si. C'était la même qu'à chaque fois que le plus jeune lui souriait, le remerciait, lui parlait simplement... Il en était tombé fou amoureux, ça ne faisait aucun doute dans son esprit. Mais Aurélien était un Jug. Un Jug doté de raison, d'accord, mais un Jug tout de même...! Il se prit la tête dans les mains et poussa un long soupir de frustration. Pourquoi tout devait-il toujours être aussi compliqué ?

***

« Oh, regarde ! On dirait qu'elles me disent bonjour ! »

Il sourit, fortement attendri, en voyant Aurélien agenouillé devant ses plantes, un grand sourire sur les lèvres. Celui-ci avait une main avancée vers elles, sans jamais les toucher pour pas leur faire de mal, et il se mit à réfléchir soudain. Pourquoi ses plantes réagissaient-elles comme ça à son contact ? À sa présence, en tout cas. Il avait décidé d'amener Aurélien dans son labo cet après-midi, après qu'ils soient allés chercher à manger près de la rivière le matin-même. Il ne savait pas pourquoi, mais il avait soudainement eu envie de lui montrer ce dernier. Lui montrer que lui aussi, même si bien sûr il n'avait pas les capacités de Julien ni les instruments adaptés pour, il pouvait faire des recherches. Il pouvait découvrir des choses, comme Aurélien lui avait dit que ce dernier avait fait, ce qui l'avait poussé à se rendre avec lui dans le District Z : il a fait une découverte, il devait leur montrer. La voix d'Aurélien retentissait dans son esprit tandis qu'il l'observait en silence et celui-ci dut sentir son regard sur lui à un moment donné car il le vit se tourner vers lui. Aurélien lui lança un regard étonné et il sortit de sa contemplation en l'entendant l'appeler :

« Guillaume...? Est-ce que ça va ? Est-ce que... je n'aurais pas dû m'approcher autant de tes plantes ? Je suis désolé...

— Mm ? Oh non, non pas du tout...! dit-il précipitamment en voyant le plus jeune reculer sa main et même se relever, alors il le rejoignit au centre de la pièce. C'est pas ça du tout, Aurél. Tout va bien.

— Alors... Qu'est-ce que c'est ? Est-ce que j'ai fait quelque chose de mal ?

— Non. Non, pas du tout. C'est juste que... c'est la première fois qu'elles réagissent comme ça. Je veux dire... comme si elles essayaient de te toucher, d'atteindre tes doigts pour que tu les caresses...

— Ce n'est pas... normal...? Elles ne réagissent pas comme ça avec toi ? demanda innocemment le plus jeune et il secoua la tête, ce qui amena Aurélien à se perdre dans ses pensées. Tu sais... Julien... Si j'étais avec lui ce jour-là... dans le vaisseau... c'est parce qu'il savait qu'on venait de le découvrir. De me découvrir. Je ne sais toujours pas comment... Mais ce que je sais... c'est qu'au lieu de fuir dans la nature, il a préféré m'amener au District Z. Il disait qu'il venait de trouver la solution à tous nos problèmes. Enfin... ceux des Hauts Placés. Qu'il avait fait une découverte qui changerait le cours de l'Histoire et que la réponse... était dans mon ADN. Est-ce que tu crois... que c'est ça que tes plantes pourraient sentir en moi ?

— Aurél, ces plantes... ce sont des fragments de la vie d'avant.

— Comment ça ? dit le plus jeune en fronçant les sourcils, semblant confus.

— Je veux dire... Mon père s'est cassé à la Citadelle quand j'étais petit, raconta-t-il, pensant d'un air surpris que c'était la première fois qu'il en parlait à quelqu'un et que étrangement, ça ne lui faisait pas du mal mais même plutôt du bien. On lui a proposé un job en tant que scientifique, ingénieur comme Julien sûrement, et il l'a accepté. Et ici, là, c'était son laboratoire. Il faisait des expériences, des recherches, sur le passé. Il était comme obsédé par celui-ci. Il voulait savoir. Comprendre, dit-il avant de rajouter en voyant l'air confus du plus jeune. Comprendre ce qu'il s'était passé, Aurél. Pour qu'on en arrive là. Séparés en deux castes.

— Je... t'ai raconté ce qu'il s'est passé, non ? Du moins... l'histoire officielle de l'intérieur. Je ne sais pas si tout est vrai. Ou bien si c'est seulement une légende... Une histoire que l'on raconte aux enfants pour donner du sens à leur vie... balbutia Aurélien avant que celui-ci ne se perde de nouveau dans ses pensées. Est-ce que... ton père t'a appris ? Tout ça... Les plantes, les recherches...

— Pas vraiment. Mais j'ai appris sur le tas après son départ. Près d'une dizaine d'année plus tard. J'ai découvert ce laboratoire et j'ai décidé de prendre la relève en quelques sortes.

— Est-ce que... toi aussi tu veux partir travailler à la Citadelle ? Comme ton père ? lui demanda Aurélien d'un air hésitant, comme s'il avait peur de le blesser en posant cette question, et il secoua la tête.

— Non, du tout. Par contre, j'aimerai bien faire des découvertes aussi, pour pouvoir les échanger contre de quoi bien vivre avec ma mère. La soigner. À faire des échanges avec Élias, ou bien directement la Citadelle. Et ces plantes peuvent m'y aider. Elles étaient déjà là, en mauvais état mais pas encore mortes. Je les ai étudiées attentivement et leur ADN... n'a absolument rien à voir avec celui des plantes du dehors. Elles sont différentes. Et j'ai compris pourquoi. C'est parce qu'elles viennent du monde d'avant. Elles ont emmagasiné assez de soleil et d'air et d'eau... et tout ce dont elles ont besoin pour vivre, pour des siècles encore. Je n'avais jamais vu ça encore.

— Guillaume, est-ce que... tu veux m'étudier moi aussi ? lui demanda alors Aurélien en se mordillant la lèvre inférieure d'un air ingénu et il écarquilla les yeux d'un air surpris.

— Quoi ? Non, je n'ai jamais dit ça...

— Je sais, c'est moi qui te le propose. Julien... a découvert quelque chose en m'étudiant à la Citadelle. Alors peut-être... que ce qu'il a trouvé, toi aussi tu pourrais le trouver ? On pourrait... sauver les enfants ainsi. Ta mère... Peut-être même tous les Bannis et tous les Hauts Placés. Tout le monde pourrait vivre réunis... Je ne sais pas ce que c'était qu'il a trouvé, il ne me l'a jamais dit, mais je sais que ça se trouve dans mon sang. Dans mon ADN. Si même tes plantes le sentent, c'est qu'il y a quelque chose de spécial dans celui-ci, non ? »

Il regarda d'un air incertain le plus jeune, celui-ci semblant tellement prêt à jouer aux cobayes. Il se dit que c'était ce qu'il avait fait ces derniers mois auprès de Julien, se rappelant des prises de sang quotidiennes dont il lui avait parlé. Il se rapprocha alors de lui et porta une main à son visage pour lui glisser une mèche blanche derrière l'oreille :

« Tu es sûr ? Tu es vraiment sûr que tu veux faire ça ? »

Il ne s'arrêta pas sur le fait que c'était la toute première fois qu'il remarquait cette mèche dans ses cheveux et Aurélien hocha la tête doucement :

« Oui, Guillaume. Si ça peut sauver des vies, je suis prêt à recommencer. »

Il hocha la tête en compréhension, pensant au microscope et au pack de seringues qu'il avait sur le bureau, le microscope étant un souvenir de son père. Ok, il allait étudier Aurélien. À sa demande. Et il espérait vraiment que tout se passerait bien.