Il y a bien longtemps, dans un village lointain, vivait une fille du nom de Moïra.
Du haut de ses sept ans, Moïra était une enfant intrépide qui aimait s'aventurer à l'extérieur des murs du village.Ce jour-là, tandis qu'elle jouait avec les autres enfants dans la plaine, elle remarqua au loin deux garçons dépasser la lisière de la forêt et s'enfoncer dans les bois. Sa mère, protectrice comme toute les mères, lui avait toujours interdit de dépasser la plaine. Alors, quand elle les vit franchir la frontière interdite, Moïra se figea, partagée entre le réflexe obéissant de prévenir les adultes et le curieux désir de les suivre. Un bref instant de doute qui sera rompu par l'appel de sa mère pour souper.
Après un bon repas, quelques corvées et la nuit tombée, Moïra raconta à sa mère ce qui s'était passé. Aussitôt, cette dernière affolée, alla prévenir les autres parents. Il ne fallut pas longtemps pour que tous les adultes du villages se réunissent, quand on se rendit compte de la disparition des deux bambins. Ils formèrent des groupes et, équipés de torches, partirent aux quatre coins de la forêt pour retrouver les enfants perdus. Seules les aïeux et les enfants restèrent.
Les adultes du village passèrent des jours à fouiller la forêt, sans jamais trouver la moindre trace des deux garçons disparus. Les rumeurs commencèrent à circuler dans le village, certains accusant les étrangers qui passaient dans la région, d'autres pointant du doigt des créatures surnaturelles vivant dans la forêt.
Pendant ce temps, Moïra ne pouvait s'empêcher de se reprocher la disparition des garçons. Elle aurait dû les avertir, prévenir les adultes dès qu'elle les avait vus entrer dans la forêt. Elle se sentait responsable de ce qui était arrivé, même si elle ne comprenait pas exactement ce qui s'était passé.
Des semaines passèrent, et le village finit par abandonner les recherches pour les deux garçons disparus. Les adultes retournèrent à leurs occupations habituelles, mais un sentiment d'angoisse planait sur le village, comme s'ils savaient tous qu'il y avait quelque chose de terrible qui se cachait dans la forêt.
La petite fille, qui était incapable de fermer l'œil la nuit et qui repensait à cet incident à chaque fois qu'elle se promenait dans la plaine, avait depuis lors l'impression d'être observée. Elle n'osait plus sortir seule, ni s'approcher de la forêt.
L'angoisse persistait. La petite Moïra sentait toujours une présence étrange qui la suivait partout. Quand la nuit tombait, elle entendait des voix chuchotant son nom. Parfois, elle croyait même voir deux ombres se dessiner sur les murs de sa chambre. Elle avait beau crier, personne ne venait à son secours.
Une nuit, alors qu'elle était sur le point de se rendormir, elle entendit une voix familière l'appeler dehors. C'était la voix de l'un des deux garçons disparus. Elle se leva et se dirigea vers la fenêtre. À travers les carreaux, elle vit les deux garçons, souriants et joyeux, lui faisant signe de les rejoindre.
Moïra ne put s'empêcher d'ouvrir la fenêtre et de sortir. Les garçons l'attendaient, et ils lui prirent la main pour la guider vers la forêt. Moïra ne résista pas, hypnotisée par leur sourire et leur voix douce. Elle les suivit, sans se poser de questions.
Ils marchèrent pendant des heures, jusqu'à arriver à une vieille cabane abandonnée, cachée derrière un amas de branches. Les garçons ouvrirent la porte et firent signe à Moïra d'entrer. Elle les suivit, en se demandant ce qu'elle faisait là. La cabane était sombre et humide. Les murs en bois pourri étaient envahis par des champignons et le sol craquait sous les pieds de l'enfant. Les garçons se dirigèrent vers une étagère poussiéreuse remplie de pantins en tous genres et en sortirent deux pantins de bois usés et grimaçants. Ils étaient si réalistes qu'elle sentit une bouffée de terreur la saisir en les voyant.
Les deux pantins étaient l'image même des deux garçons disparus, la ressemblance était frappante. Elle se mit à trembler, des larmes coulèrent sur son visage et elle recula d'un pas, voulant partir en courant. Elle se retourna vers les garçons, prête à hurler, mais ceux-ci avaient disparu. Elle était seule, entourée de ces pantins sinistres semblant la fixer, leurs yeux noirs la transperçant de part en part.
Soudain, elle entendit une voix rauque et profonde, provenant de l'extérieur de la cabane :
- Je vois que mes pantins vous plaisent, dit la voix.
Moïra sentit ses jambes flageoler. Elle aurait voulu fuir, mais ses pieds semblaient cloués au sol. La porte de la cabane s'ouvrit, laissant entrer un homme grand et trapu. Il était vêtu d'un pantalon en toile cirée et d'une chemise à carreaux, tachée de sang.
Il se mit à rire d'un rire gras et répugnant, qui fit frissonner Moïra de la tête aux pieds.
- Ne t'en fais pas, tu vas devenir leur amie toi aussi, ajouta-t-il en lui attrapant le bras.
Moïra se débattit, mais l'homme était plus fort qu'elle. Il la tira vers la sortie, en direction de la forêt.
- On va faire de toi une belle pantin, ma jolie. Tu verras, tu seras encore plus belle que les autres.
Moïra se débattait de toutes ses forces, mais l'homme avait une emprise de fer sur elle. Il l'emmena vers une petite clairière, où un grand feu était allumé. Autour du feu, d'autres hommes étaient présents, tous avec des têtes de pantins.
L'homme qui avait attrapé Moïra la poussa vers un poteau, où des cordes étaient attachées.
- Attachez-la, ordonna-t-il. On va commencer le travail.
Les pantins s'approchèrent d'elle avec des outils tranchants à la main. Moïra hurla, mais personne ne pouvait l'entendre. Les hommes commencèrent à la découper, morceau par morceau, dans un vacarme de cris et de rires.
Quelques heures plus tard, elle rouvrit les yeux, pensant avoir rêvé. Elle n'avait plus mal et souriait à nouveau. Loin de ce cauchemar, elle pouvait de nouveau observer paisiblement la forêt de puis sa fenêtre, du haut de son étagère.
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Contes horrifiques
Short StoryDes histoires un peu plus sombres que les contes modernes, pour rappeler aux enfants les frissons des contes d'antan.