Chapitre 23 - Un peu de réconfort

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Evening in Roma - Dean Martin

Cette première et dernière nuit passée avec Sourire fera sans doute partie des instants inoubliables de cette année en Italie. J'ai découvert quelqu'un d'affectueux, romantique et d'attentionné. Tout le contraire de ce qu'il a bien voulu me montrer ces cinq derniers mois. Je le croyais détaché de tout, incapable de s'engager ou de prendre soin des autres. Je me suis trompée sur toute la ligne.

La soirée fut remplie de rires, de bienveillance et, il faut bien le dire, de sentiments. Cependant, au moment de chercher le sommeil, Sourire se tournait nerveusement d'un côté, de l'autre, tout en soupirant à plusieurs reprises. Je me suis alors invitée dans ses bras pour tenter d'apaiser ses tourments que je sentais s'emmêler dans son esprit. J'attendais qu'il soit prêt à se livrer, sans le forcer, simplement en étant là. Avec lui.

— Tu sais, Piccola, a-t-il fini par lâcher, j'ai conscience d'avoir été un con.

Lorsque la lumière est éteinte, on dirait que nos pensées les plus sincères sont davantage avouables. Sous la couette, dans le noir, nous avons conscience que la personne est proche de nous, prête à recevoir nos confidences, mais nous n'avons pas à affronter son regard, ni son jugement.

— Pourquoi tu dis ça ?

J'ai posé la question tout en sachant plus ou moins où il voulait en venir.

— Je t'ai évitée volontairement depuis que l'on s'est rencontrés. Et j'ai eu raison ! Regarde-nous, dit-il en resserrant son étreinte, si on avait passé plusieurs nuits comme celle-là, ç'aurait été fatal.

— C'est-à-dire, fatal ?

Il a fallu lui sortir les vers du nez !

— Je serais tombé amoureux de toi.

Je ne m'attendais pas à tant de franchise de sa part. J'ai laissé planer quelques secondes de silence, où seuls les rires sourds des noctambules visitant Rome se faisaient entendre. Je voulais prendre le temps de formuler ma réponse, de ne pas gâcher ce moment.

— Je ne t'en veux pas, ai-je murmuré. C'était ta façon de te protéger. J'avoue que j'ai parfois eu du mal à te suivre, mais avec le recul, je comprends mieux le choix que tu as fait. Tu t'en vas vivre à Milan, je vais partir de Rome fin juin, on ne pouvait pas se projeter ensemble quoi qu'il en soit. L'essentiel est qu'on ait de jolis souvenirs tous les deux et qu'on reste bons amis.

— Rassure-moi, tu ne dors pas nue avec tous tes amis ?

J'ai éclaté de rire et embrassé son épaule.

Face à ses gestes de tendresse, je me suis montrée douce et câline, telle que je l'étais avant. Telle que je l'ai toujours été. Les premiers temps, suite à la trahison de Lâche, j'étais persuadée que je n'aimerais jamais plus, que la cicatrice qu'il m'avait laissée serait trop profonde pour se refermer totalement. Je pensais que la coquille que je m'étais créée serait bien trop épaisse pour être de nouveau percée.

Grâce à Sourire, je me rends compte que c'est faux, que ce cœur qui a tant souffert est toujours capable d'aimer et de recevoir de l'amour. Ce n'est pas lui qui prendra la place de l'homme de ma vie, mais il m'aura ouvert les yeux sur un avenir que je me refusais d'envisager.

Peut-être que Sourire a été le tremplin dont j'avais besoin pour reprendre mon élan et remonter la pente. Elle me semblait pourtant infranchissable. Une fois nos esprits libérés du poids des aveux, c'est l'un tout contre l'autre que nous nous sommes endormis.

Le réveil n'est pas facile. La parenthèse doit se refermer et il faut se dire au revoir.

— Je n'ai pas besoin de te préciser que tu seras la bienvenue à Milan, dit-il tout en rangeant sa trousse de toilette dans son sac à dos.

Ça ira mieux à RomeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant