chapitre 5

54 7 0
                                    

La convocation pour le Tribunal trônait sur la table basse du salon après être passée entre toutes les mains, ses parents, son frère et sa sœur ainés. Aucun des membres de la famille n'avait imaginé que l'oncle Charlie agirait avec autant de célérité, ni autant de sévérité. Ce n'était qu'une mauvaise blague ou un vilain cauchemar! Pourtant la convocation était là, bien réelle, impérative.


- Mademoiselle Candice Grandbois devait se présenter devant la Commission de Rééducation, le lendemain à huit heures.


- Je viens d'appeler mon avocat, lança le père avec autorité, il m'a dit que tu devais impérativement te présenter devant tes juges, afin de ne pas risquer d'augmenter ta sanction. Il pense que tu t'en tireras avec quinze jours de camps.

Devant le visage décomposé de sa fille, l'homme expliqua avec douceur:

- Ce n'est pas grand chose, un genre de colonie de vacances améliorée où on te rappellera les règles de politesse, tu n'as rien à craindre.

- Alors pourquoi ne peut-on pas négocier avec l'oncle Charlie? s'inquiéta la mère. Candice n'a rien fait de grave, je ne comprends pas son acharnement contre elle.

- C'est un tyran, s'exclama le fils ainé avec vigueur.

- Oui, cette convocation est un abus de pouvoir, poursuivit la sœur cadette.


Le soutien sans faille que lui apportait sa famille aurait dû rassurer la jeune fille, pourtant il n'en était rien. Candice n'avait pas oublié le regard glacial que le vieil homme lui avait adressé lorsqu'elle avait troublé de son éclat de rire la fête de l'aïeule. Elle ne parvenait pas à chasser la peur qui l'habitait depuis ce fâcheux incident. Elle savait qu'elle n'échapperait à la vengeance de l'oncle Charlie.

- Ne t'inquiète pas, ma chérie, nous serons auprès de toi demain, sois courageuse et essaie de dormir.

- Oui, vous avez raison, je vais me coucher.


Candice embrassa ses parents en regrettant de ne plus être la petite fille qui se serrait dans les bras maternels. Elle avait grandi, désormais elle devait assumer seule ses erreurs et ne plus se cacher derrière ses parents, elle qui avait toujours eu hâte de fuir le nid familial. Lorsque la porte de sa chambre se referma sur elle, elle ne put retenir ses larmes, un mélange de peur et de colère lui tournait la tête. Elle préféra avaler le comprimé de sédatif que lui avait donné sa mère. Il fallait qu'elle dorme pour affronter l'audience du lendemain. Heureusement qu'elle avait toujours sous la main une pilule magique destinée à apaiser tous les maux de la vie. Mal à la tête, un comprimé blanc, mal au ventre, un comprimé rose, angoisse une gélule verte, sa mère avait un placard rempli de ces précieuses boites, elle y ajoutait pour son usage personnel quatre ou cinq produits destinés à freiner le vieillissement cutané.

Candice se glissa sous ses couvertures, rassurée par la présence d'une dizaine d'animaux en peluche, doux souvenir de son enfance, il y avait son précieux lapin usé et délavé qui la suivait depuis sa naissance, un ours brun, une souris rose, un monstre, un cœur et d'autres encore qui avaient chacun une histoire, intimement mêlée à la sienne. Apaisée, la jeune fille chassa ses appréhensions de son esprit, c'était une fille solide, réputée pour son courage et son obstination, elle ne devait pas montrer à ce vieux débris de Charlie qu'elle avait peur de lui! Et sur ces bonnes résolutions, elle s'endormit.

Le passé est-il parfait ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant