La cité morte

23h00

Gaelle se retourna pour voir une ombre recouvrir la surface de la lune. Des filaments étranges se distinguaient de l'humanoïde qui se trouvait en face d'elle. 
Son cœur battit à tout rompre, l'adrénaline qui pulsait dans ses veines faisait taire toutes formes de douleur. Elle recula toujours au sol, râpant encore plus ses mains sur les débris de verre. L'ombre se rapprochait. Gaelle tâtonna près d'elle, cherchant sa lampe torche qu'elle avait échappée plus loin dans sa chute.

— Laissez-moi, s'étrangla-t-elle.
 

Elle sanglota tout en implorant les forces supérieures de l'aider dans ce moment où sa vie ne tenait plus qu'à un fil. Le liquide chaud de son sang se répandait sur ses jambes. Elle savait. Elle savait que ce n'était que le début de son calvaire. Si elle avait à faire à un dérangé, il prendrait son temps. 

Elle s'empara du plus gros bout de verre qu'elle trouva en tâtonnant, prête à défendre sa vie même si elle n'avait pas tellement confiance en ses capacités de lutte face à la bête qui se muait toujours dans l'ombre. 
L'ombre vagissait. Elle ne parlait pas, mais émettait des bruits étranges. 


Gaelle retrouva la lampe, la braqua sur l'ombre et faillit la lâcher de nouveau quand elle s'aperçut que l'ombre n'était autre que sa meilleure amie, Tamal, les yeux écarquillés par la terreur, la bouche scotchée avec de l'adhésif noir. 


— Qu'est ce que c'est que ce bordel ? 
 Tamal lui tendit ses deux mains qui étaient enroulées dans des sacs et attachées aux poignés.
Son amie continuait ses bruits de bouche. Ses yeux dégoulinaient de maquillage noir. Gaelle se redressa vivement, arrachant le scotch de la bouche de Tamal, qui se mit à sangloter de plus belle.

— Putain, mais qu'est ce qui t'es arrivée ?!

— Je.. Je sais pas.. Gaelle. J'ai trop peur. 

— Tamal, pourquoi tes mains ... et ta bouche sont comme ça ? 

— J'attendais.. à l'entrée de la ville.. à l'est.. Et, et.. J'ai reçu les instructions... 

 

Gaelle s'empressa de libérer les poignées de son amie. La panique s'empara de cette dernière. Elle commença à suffoquer. Gaelle la secoua sans ménagement, étant, elle aussi, en proie à une terreur profonde.


 — Putain Tamal ! Explique-moi ! Calme-toi ! 

— J'avançais dans la rue... J'ai entendu du bruit derrière moi. Quand je me suis retournée, je n'ai rien vu. Mais j'ai senti une énorme douleur à la tête.... Je... Je me suis réveillée là-bas... 

 

Tamal pointa du doigt un renfoncement du rond-point que Gaelle n'avait pas vu. Tout son corps fut pris d'un tremblement soudain. Un pentacle inversé était au-dessus de l'espèce de grotte d'où Tamal était sorti. 

 Le portable de Gaelle sonna. Elle se rendit compte que son live tournait toujours. Cinquante messages apparaissaient, elle ne pouvait pas tous les lire. 
 

—meuf !? 

— Tu crois qu'il faut appeler la police ? 

— Elle a hurlé, j'crois 

— Sérieux ? 

—... 


Et puis un au milieu de tous, child_of_the_night :


— Bienvenue. 

— Putain, mais il veut quoi lui ? dit Gaelle à voix haute. 

— Meuf t'es vivante ? 

— Ouaaa tu nous as fait peur ! 

— Je me suis fait peur aussi. Restez connecté. C'est pas fini. Ma pote Tamal m'a rejoint dans un sale état...
 

Elle remarqua alors que son portable clignotait en bas de son écran, signe qu'elle avait reçu un message. Une autre indication.


 — Je dois vous laisser pour la nouvelle info. Je vous reprends tout à l'heure. 

 

Gaelle quitta son live, pour se rendre compte qu'elle avait franchi les 3000 abonnés. Ils étaient exactement 3150. 
 

— Putain j'ai dépassé les 3000 meuf !? 

— Quoi ? déglutit Tamal, qui tremblait toujours de partout. 

— Bah j'ai plus de 3K sur le réseau ! 

— T'es pas sérieuse là ?!

— Bah si, matte !

— Non, mais je m'en fous ! Putain ! Je t'explique qu'un malade vient de me faire ça et toi.. toi tu penses à ça !