Chapitre 97 : Il est de retour

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Je suis d'habitude la première à blaguer, la première à rire, même à la plus stupide des bêtises. Toutefois, je n'ai pas envie de rire et je ne suis même pas sûre de pouvoir rire de nouveau. Gabriel est ici, dans ce lieu où il n'était pas supposé pouvoir venir. Mais il est là. Je ne veux même pas savoir comment il a fait pour entrer, je veux juste savoir comment le faire partir, définitivement.

Les membres tremblants de rage et la terreur martelant mes tempes, je remonte l'avenue, la respiration lourde. Derrière moi, Victoire me suit, accrochée à mon t-shirt. Elle a toujours fait ça quand nous étions petites et que quelque chose l'effrayait. Et savoir qu'elle doit revivre cette émotion m'enrage encore plus. Gabriel n'a rien à faire là !

– Accroche-toi, Alastor.

Eve et Ruben supportent tous les deux le poids d'Alastor dont les bras sont passés autour des épaules de ses amis. Il semble avoir du mal à respirer et alors que je pensais qu'il ne pouvait pas avoir l'air plus exténué... il a maintenant l'air aux portes de la mort.

Tout autour de nous, les Démons s'inquiètes ou paniques, pour les plus émotionnels d'entre eux. Néanmoins, ils nous laissent tous passer. Leurs murmures angoissés s'élèvent en une cacophonie de peur qui domine toute la ville. Derrière nous, j'entends les bâtiments trembler, comme s'ils étaient secoués par des bombardements. Le goudron sous nos pieds se fissure, s'étendant à tout le boulevard, serpentant jusqu'aux immeubles tels des reptiles affamés. Les Démons les évitent en hoquetant de peur, tout comme il évite les branches d'arbres, les lampadaires, ou même les statues qui commencent à céder sous leur propre poids.

– Qu'est...Qu'est-ce qu'il se passe ? bégayai-je devant l'impensable qui se produisait.

– Disons que c'est un peu comme un système immunitaire, déclara Eve. On est en train de subir l'attaque d'un agent extérieur, et l'hôte fait au mieux pour défendre son intégrité.

Je n'ai pas le temps de poser plus de questions que Gabriel se tient déjà à une dizaine de mètres de nous. Je pensais qu'Alastor était mal en point, mais Gabriel a vraiment une apparence épouvantable. Tous ses membres tremblent, sa respiration siffle, de grosses goûtes de sueur perlent sur son front et sa peau de porcelaine prend une étrange teinte violacée. On dirait bien que tout le poids du monde repose sur son dos. Malgré cela, un sourire étire ses lèvres lorsque son regard rencontre le mien.

– Angèle... laissa-t-il traîner d'une voix enrouée. Regarde ce que tu m'as obligé à faire. Ton comportement nous fait tous souffrir.

À ces mots, Alastor tente de reprendre de la contenance, mais ses amis refusent de la laisser se tenir debout tout seul. Derrière moi, je sens Victoire se cacher, sa main agrippant toujours mon t-shirt. La haine pulsant dans mes veines et poussée par toutes ces émotions ravageuses, je dépasse Alastor pour m'avancer vers Gabriel. J'entends le Diable désapprouver mon comportement par un grognement, mais n'y prête pas attention, plongeant mon regard noir dans celui de Dieu. J'aurais voulu que Victoire ne se retrouve pas aussi près de lui, de peur qu'il lui fasse du mal, mais j'ai également peur qu'elle s'éloigne de nouveau, alors j'accepte sa présence réconfortante contre mon dos.

– Tu n'as vraiment pas bonne mine, Gabriel, le raillai-je. Et de près, c'est encore pire.

Un étrange sifflement lui échappe et son visage se tord de douleur avant qu'il ne reprenne son sourire de conquérant.

– Je suis venu pour toi, croassa-t-il. Pour te récupérer.

– Eh bien tu peux repartir, pour toujours.

De l'Autre CôtéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant