Epilogue

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Je m'éloigne de l'orphelinat, le cœur lourd. Ça n'a pas été facile d'annoncer mon départ, les enfants étaient tristes, tout comme mes collègues. Toutefois, lorsque j'ai simplement prononcé les mots : « je dois partir, je suis désolée », Marlène m'a regardé avec intelligence avant de me prendre dans ses bras et de me murmurer : « Ne laisse pas les gens assombrir ton chemin », puis elle est montée dans son bureau avec un énigmatique sourire. Je pensais qu'il y aurait eu de la paperasse, des trucs ennuyants à faire et à envoyer, mais lorsque j'ai demandé à mes collègues ce qu'il fallait que je fasse, ils m'ont assurés que tout était en ordre. Alors je suis partie après un dernier au revoir.

L'adieu le plus dur n'était pas celui de l'orphelinat, aussi étrange fut-il. Celui que je redoutais était celui de mes parents. Je ne voulais pas leur faire de peine, et moi non plus je ne voulais pas souffrir. Mais dès que j'ai franchi le seuil de la porte, je savais que je devais faire vite, autrement, je fondrais en larmes devant eux et je ne voulais pas qu'ils s'inquiètent davantage. Bon, ils ont paniqué lorsque je leur ai dit : « Je dois partir, mais ne vous en faites pas, tout ira bien pour moi ». Ma mère m'a aussitôt assailli de questions, notamment pour savoir s'ils avaient fait quelque chose de mal. J'ai donc passé plusieurs minutes à les rassurer sans jamais leur donner de vrais détails sur où j'allais et pourquoi. Si je l'avais fait, qui sait ce que Gabriel pourrait leur faire dans le but de me faire venir avec lui. Je savais qu'il n'allait pas abandonner là, il était passé au stade « psychopathe sans limite ». Il fut un temps où j'espérais qu'il change, qu'il réalise tout le mal qu'il me faisait, mais... ce temps est révolu. Gabriel n'est obsédé que par ses désirs. Il ne changera pas, non, il préfère changer les autres. C'est pourquoi il y a une dernière personne que je dois voir.

Anaïs est assise à notre table habituelle, dans notre café habituel. Cette habitue me pince le cœur en y repensant... Maintenant, il n'y aura plus d'habitudes.

– Angèle ! s'exclama-t-elle en accourant vers moi pour me prendre dans ses bras.

Je l'étreins à mon tour, comme au temps où nous étions des amies très proches. Nous partons ensuite nous asseoir à la table sur laquelle Anaïs se trouvait quelques secondes plutôt.

– Je vais partir, Anaïs.

– Quoi ? s'étonna-t-elle en me dévisageant bizarrement.

– Tu sais déjà tout ce qu'il y a à savoir. Gabriel est entré en chasse après moi, enfin... plus qu'il ne l'était déjà. Et avant que tu dises quoi que ce soit, l'interrompis-je alors que je voyais qu'elle allait prendre la parole. Gabriel m'a blessé, pas physiquement, mais... blessée quand même. C'est pour ça que je viens te voir, je ne peux pas t'empêcher de le voir, ni même de lui parler, toutefois... je te conseille de ne pas le faire. Ne lui accorde pas ta confiance, il n'en est pas digne. Tu vaux mieux que ça... laissai-je traîner en plongeant mon regard dans le sien qui semblait différent. Il va sûrement t'utiliser pour arriver à ses fins, notamment pour me retrouver. J'ai un véritable psychopathe à mes trousses, et je ne veux pas qu'il te blesse toi aussi. Alors s'il te plaît...

Je suis soudainement interrompue par la sonnerie de son téléphone annonçant un message. Sans pouvoir retenir ma curiosité, je jette un regard à l'écran tourné vers le haut. En voyant le nom qui s'affiche sur celui-ci, je ne peux m'empêcher de froncer les sourcils et de dévisager Anaïs. Mon ancienne amie me regarde sans réelle peine malgré l'effort qu'elle y met, le rouge aux joues.

– Il le fallait, déclara-t-elle simplement.

Je me lève d'un bond, comme si la chaise venait de me brûler et observe Anaïs. J'ouvre et ferme alors bêtement la bouche, voulant la mettre en garde pour la centième fois, mais aucun son ne sort. Alors je quitte le café en laissant une amitié de plusieurs années derrière moi.

J'ouvre la porte et ne peux retenir la larme qui roule sur ma joue. Je m'empresse donc de l'effacer et prends une grande inspiration. C'est alors que je croise le tendre regard d'Alastor qui m'observe depuis l'ombre d'un arbre, son flanc appuyé contre l'écorce du tronc. À ses pieds, Eve arrache distraitement les brins d'herbes. Déterminée, je m'avance vers eux.

La vie n'est pas linéaire, elle prend des plis et se courbe à 360°. Si mon don de passeuse d'âme m'a bien appris une chose, c'est qu'il n'y a jamais de fin en soi, c'est juste... le prolongement d'un continuum. La fin est un prolongement de l'autre côté d'un prisme infini. Et alors que les maths et la physique s'arracheraient les cheveux, moi j'y vois un gouffre qui vous donne le vertige. Pourquoi ? Parce que lorsque quelqu'un entre dans votre prisme, il n'en ressort jamais, où que vous alliez.

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Voilà le chapitre qui marque la fin de cette histoire. J'espère qu'elle vous aura plu, tout comme les personnages. N'hésitez pas à me donner votre avis 😊

-PaS-

De l'Autre CôtéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant