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Contre carte



Il était pratiquement deux heures du matin quand j'ai entendu Angel rentrer dans sa chambre. Impossible d'intervenir à ce moment-là, il ne dormait pas encore et je tiens quand même un minimum à ma vie.

Je consulte le réveil, il est bientôt quatre heures. Est-ce qu'il dort ? Je ne sais pas comment il est réglé alors ça me stresse légèrement. Si ça se trouve il s'endort directement quand il se couche ou au contraire il est sujet à des insomnies, peut-être qu'il passe un temps fou sur son portable ou sur sa tablette. Qui sait ?

Aller, c'est parti.

Je sens mon sang pulser dans mes veines, ma fréquence cardiaque exploser tous les records et la boule d'angoisse au niveau de mon estomac s'intensifie atrocement.

— Courage, Jezzy ! je me motive après avoir récupérer ma vengeance et en arrivant devant sa porte.

Le but étant de l'attacher au lit et de lui balancer un seau avec de l'acide – je plaisante – juste avec de l'eau gelée et des glaçons.

Je tourne la poignée et j'entrouvre suffisamment pour passer. Il a l'air de dormir, il est tourné vers le balcon donc je ne vois pas ses yeux. Je m'approche à pas feutrés, pose ma bassine près de son lit et je fais le tour. Il dort profondément, la couverture est remontée jusqu'à son menton et il ressemble à un enfant. Son expression est détendue et complètement sereine.

Impeccable pour mon plan. Ma vengeance n'en sera que plus savoureuse. Normalement c'est suivi d'un rire machiavélique mais j'ai un peu peur de le réveiller alors je me tais et m'empare du contenant par terre. Je m'avance, commence à faire basculer la seille, mon euphorie s'accentue – prête à déborder à mesure que les glaçons cognent contre les parois dans leur descente.

Puis je suis paralysée.

À moins d'un centimètre de la chute, les traits d'Angel deviennent affreusement affligés. Ses sourcils se tordent dans un mouvement de souffrance et ses lèvres se déforment en un rictus désagréable. Qu'est-ce qui se passe ? Le poids du seau commençant à endolorir mes muscles, je le repose en observant ce qui se passe devant mes yeux.

— ... T'es où ? ... Réponds-moi... (il se met à gigoter sur le matelas et à gémir) Que... NON ! Non ! Pas ça !

Sa respiration accélère. Il tend sa main vers l'avant et la ferme, attrapant du vide. Sa mâchoire se contracte, il pousse un cri qui me fait sursauter et reculer tant il me surprend. Il fait un cauchemar ? Ses doigts attrapent les draps et les empoignent avec désespoir, une fine pellicule de sueur fait briller son échine et je suis désemparée.

— El... Elkin !

Sa voix me fend le cœur et m'émeut. Elle est déchirée, torturée et cette intonation qui, habituellement, me fait vibrer, me donne envie de pleurer. Il semble tellement chagriné que je ne peux pas empêcher mes jambes de me mener à lui. J'abandonne mon idée diabolique – pour le moment – et je marche jusqu'à lui avant de m'assoir sur le bord du lit.

— Angel...

Il est tendu au possible, mon organe vital se serre quand une larme roule sur sa joue et je me fige, la contemplant acheminer sa route. J'attrape sa main et je la comprime avec force, il continue de bouger dans tous les sens et je décide de me faufiler derrière son dos. Étonnamment, il m'aide, son corps se pose facilement contre le mien et j'ai l'impression qu'il se calme.

Pour autant, il n'est pas totalement détendu. Alors je me mets à fredonner un air de musique. C'est une comptine que ma mère adorait me chanter quand elle essayait de m'endormir. Je le berce doucement en nous faisant balancer d'un côté à l'autre, mes phalanges caressent ses cheveux et cette fois, il est emporté par ce que je fais.

Deal With Devil (en pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant