Lily of the Valley

    Savez-vous ce que signifie être parfait ? Non. Bien sûr que non, question inutile. C'est un terme très complexe... La perfection est un sujet vague dont très peu de personnes peuvent prétendre savoir ce que cela signifie exactement. Et celles qui pensent savoir, celles qui, par un élan d'assurance, voudraient s'avancer sur le sujet, en subiraient évidemment les conséquences, qu'elles soient terribles ou non. La vie est faîte de surprises, bonnes comme mauvaises, et personne ne peut échapper au sort qui l'attend. La perfection peut tuer, tout comme l'imperfection peut sauver. L'histoire de certaines personnes témoignent de cette affirmation.

   Ce n'est qu'une notion parmi tant d'autres. Et puis, l'humain est tellement complexe. Difficile de comprendre ne serait-ce qu'une part infime de ce qu'il est réellement...

  Mais revenons-en à notre sujet. Vous ne me croyez pas, je le sais. Pour vous, la perfection existe réellement ? Ne vous inquiétez pas. Je vous apporte la preuve concrète qu'il ne faut pas s'approcher de la perfection, au risque, une nouvelle fois, d'en subir les conséquences...

***

  Une forêt luxuriante s'étale face à nous. Un paradis merveilleux abritant sans doute des centaines d'espèces d'animaux et qui inspire une profonde sérénité. Les fougères nous caressent, tandis qu'Alexandre et moi avançons à pas furtifs dans cette forêt au délicieux parfum végétal. J'entend le clapotement d'un cours d'eau, au loin, et un sourire se dessine sur mon visage.. Nous sommes bientôt arrivés, me dis-je. Je me retourne et cherche Alexandre du regard, avant de l'apercevoir au loin se prendre le pied dans la racine d'un chêne. Mon rire résonne alors dans la clairière où je viens d'arriver.

  — Un peu plus d'entrain ! je lui lance. On est bientôt arrivé.

  Il grogne et s'empresse de me rejoindre, ses mains et ses genoux tachés de terre. Un vrai maladroit, je songe avec espièglerie.

  Alexandre se place à côté de moi et me jette un bref coup d'œil. Mais j'eus quand même le temps d'apercevoir une larme briller au coin de celui-ci. Inquiète, je lui pose une main sur son épaule et l'oblige à me regarder dans les yeux.

  — Ça ne va pas ?

  — Non. Enfin, si, mais ce n'est rien ne t'inquiète pas..., me répond-t-il, le regard fuyant.

  Je n'insiste pas, mais je sens bien qu'il me ment. Une lueur malheureuse et nostalgique brille au fond de son regard. Je ne comprend pas... Je l'emmène découvrir l'une des plus belles forêts de la région et il a l'air au bord du désespoir ! je songe, accablée.

  Je continue alors ma route vers le son apaisant du cours d'eau, plongée dans ma contemplation des arbres qui se dressent de toute leur hauteur, face à moi. Derrière moi, je ne me rends pas compte qu'Alexandre s'éloigne, toujours un peu plus loin...

***

  Jemma voulait me faire prendre l'air. Bonne idée de m'emmener dans une forêt, avait-elle sûrement pensé, sans savoir que ce lieu me hantait de manière bien pire que pourrait le faire un esprit...

  Pourquoi venir dans ce lieu si sinistre ? Celui qui est la personnification même de mes pires cauchemars ?

  Après tout, le Destin cherche peut-être à se venger.

  Une pression s'exerce sur ma gorge, conséquence de la panique qui commence à engourdir mes membres. Je retiens l'air qui tente de s'échapper de mes poumons avec bruit et panique. Haïr les arbres sinistres qui étendent leurs cimes au-dessus de nos têtes, obstruant le peu de soleil que nous avons déjà, est un bien petit mot.