La vie d'avant

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    La famille Bellec avait décidé de quitter la banlieue de Paris pour de nouveaux espaces verdoyants. Jacques Bellec était directeur de banque. Avec sa femme, mère au foyer et ses trois enfants, il rêvaient depuis toujours de quitter la banlieue parisienne et de partir pour habiter une grande maison en province. Mais les événements ne se sont pas passés comme souhaités. Le temps a passé et la famille a vécu des malheurs qui ont pour toujours amoindri et fragilisé les membres de la famille Bellec. Un jour, enfin, l'opportunité se présenta, Jacques finit par douter mais pour les enfants, il avait accepté de vivre à la campagne à deux heures de la capitale, un coin perdu entre la Normandie et la région du Perche. C'est pour les enfants que ça a été difficile. Axel 16 ans dut dire adieu à ses amis, il continuait d'entretenir une relation à distance avec sa petite amie Leslie, il passait beaucoup de temps sur son téléphone à prendre de ses nouvelles, pour entretenir un semblant de relation. Pour Justine 13 ans, ce fut aussi très dur : elle a dû quitter ses amies en espérant pouvoir les inviter aux prochaines vacances scolaires. Et puis le petit dernier qui se prénommait Paul, c'était un garçon de 6 ans attentif, mais pas très causant. Mais malgré tout, les enfants avaient eu un véritable coup de foudre pour cette maison.

     L'arrivée de la famille était un de ces remue-ménages nerveux où la crise de nerfs n'étaient pas loin. Axel ne retrouvait pas ses affaires. Son père lui demanda s'il avait annoté les cartons. Axel, vexé qu'on doute de lui, s'emporta en disant qu'il fallait être idiot pour ne pas le faire. Justine le prit pour elle, car certains de ses paquets s'étaient retrouvés avec ceux de la cuisine et du salon. Paul s'était assis au premier étage et profitait de la vue sur l'entrée du hall et observait tous les va-et-vient, une main sur le genou, l'autre tenant sa voiture de course favorite. Le contraste était flagrant entre l'agitation de ses proches et lui qui restait si calme, il jouait gentiment et de temps en temps babillait tout seul comme quand il était petit. 

     Justine déposait des cartons de-ci de-là sans logique apparente. Un tas de briques cartonnées s'entassa très vite dans le hall, bloquant l'accès aux pièces du rez-de-chaussée. Jacques pestait après Axel car il avait besoin de lui pour porter les meubles et très vite l'accès fut bloquée par Justine. Il s'alluma nerveusement une cigarette et déclara qu'il avait soif. Axel le regarda et se dit que pendant que son père fumait, il avait bien le temps de regarder son téléphone.

- Encore sur ton foutu téléphone ! Jura son père, aide-moi à soulever ça, lui dit-il.

- Je croyais que tu voulais faire une pause, se justifia-t-il. C'est bon, je vais t'aider. Ca va où ?

- A ton avis ! maugréa-t-il du bout de ses lèvres serrées pour ne pas lâcher sa cigarette, ce sont des ustensiles de cuisine, on va pas les monter dans ta chambre non ? Encore si t'étais capable de faire à manger...

     Axel sentait que c'était le genre de crise où il valait mieux laisser dire, sans quoi, ça pourrait virer à l'orage et que ça pouvait tourner en boucle pendant des heures.

- Mais putain ! s'emporta le père, fulminant et crachant des volutes de fumée, elle fout quoi ta sœur avec ses cartons ?

- Elle fait un Tétris, répondit Axel amusé mais surtout soulagé que la colère tombe sur quelqu'un d'autre.

     La blague dissipa un peu la colère paternelle. "Allez aide-moi à pousser ces cartons pour libérer l'accès", dit-il.

     L'heure de manger arriva vite, il faisait déjà chaud, et c'était loin d'être fini, il restait encore la moitié des meubles du salon, les lits à monter dans les chambres ainsi que les meubles de rangement, enfin le minimum pour pouvoir dormir et trouver des affaires pour aller à l'école le lendemain. Le soir, la petite famille se retrouva tant bien que mal autour d'un pauvre repas fait de restes du pique-nique du midi : un reste de chips, de pain et de fromage. Jacques regarda ses proches et leur dit :
- C'est une autre vie maintenant.
- Tu parles d'une vie ! répondit Justine.

Terreurs nocturnesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant