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DERECK
DANS LE PASSÉ

Chaque livre raconte une histoire particulière. Certains vous fascinent avec la première phrase. J'ai toujours aimé la lecture, c'est le seul coin supportable de ma vie. Fermer le livre avec le cœur rempli d'émotion. C'est le seul moment où mon existence semble stable et confortable.

Un peu comme ce journal dans lequel je me confie. C'est mon histoire et j'ai tellement à dire. Je suis fatigué d'essayer de la modifier dans ma mémoire. Et j'aurais besoin d'une vie entière après celle-ci, parce que j'ai passé cette vie à seulement espérer.

Le bruit de la télévision résonne dans la maison que mon père a héritée de ma grand-mère. Ce soir est un soir de match pour les Buffalo Bills, contre les Browns. Mon père est un très grand fan des Buffalo Bills, tellement qu'il ne loupe aucun match.

Quelques minutes s'écroulent et ses pas lourds résonner dans les escaliers grinçant, et ma porte s'ouvre dans un élan de rage. Le visage de mon père apparaît furieux. Instinctivement, j'enroule le carnet dans ma couverture avant qu'il ne le découvre et mon cœur se serre déjà.

- Tu te moques de qui fils ? Crois-tu que je n'entends pas tes pas depuis tout à l'heure ? Tu te rends compte que tu as gêné le match... Je n'aime pas ça, dit-il de sa voix menaçante

- Je suis désolé, papa. Je ne m'en étais pas rendu compte.

Je m'excuse pour moi-même, pour ce qui va ensuite arriver. Je n'ai rien fait. En réalité, il en faut peu à mon père pour se lancer dans une rage immense envers moi. Je n'ai jamais eu de réponse à mes questions, pourquoi me déteste autant.

Sa bière tomba et se fracassa au sol, les bouts de verres resteront ainsi jusqu'à demain matin. Il serait si facile d'en prendre un petit bout et d'en finir, mais la vie n'est pas comme cela, elle n'est pas aussi facile. Elle est déterminée à faire du mal autour de moi. Moi, c'est elle que je déteste. Pourtant, j'ai désiré l'aimer. J'ai tellement désiré qu'elle m'aime à son tour, mais c'est la mort qui m'a répondu et donner son amour.

- Tu peux l'être, ta mère aurait dû t'emporter avec elle, mais elle a préféré ton grand frère. Je la comprends, c'était mon fils préféré aussi. Éden était le prodige tandis que toi, tu es faible et incapable. Tu finiras comme moi. Seul.

Ces paroles laisseront des marques indélébiles sur mon cœur, elles laisseront des marques comme celle que font les lames de cutter sur ma peau.

Je te déteste papa, tellement, du plus profond de mes entrailles...

Tout ce qui suivi fut comme un ralenti dans ma mémoire, le claquement de sa ceinture contre ma peau déjà meurtri, ces cris d'insultes percutant les murs de ma chambre et par-dessus tout, c'est menace de me tuer. Il n'est pas conscient qu'il m'a déjà tué, je suis tellement mort à l'intérieur. Mon cœur est le seul bruit qui inonde mon être sans ça, rien n'est plus vivant en moi. Rien.

Il s'en alla. Sans se soucier de moi, laissant mon corps rouge de coups, mes larmes rouges de sangs dans la pénombre que cette nuit laisse tomber.

Je ne bouge pas durant quelques minutes, laissant mon corps s'adapter à la nouvelle douleur et écoutant ses pas résonner dans la maison.

J'attrape le carnet tellement fort que phalanges deviennent blanches. Je m'acharne sur ces pages, qui à présent sont tachées de mon encre. Ce journal est le seul à me connaître vraiment. Personne n'a voulu apprendre à me connaître, aucun être humain n'a fait attention à mes couleurs qui aujourd'hui sont ternes et sans vie, mais avant j'étais une œuvre d'art avec des couleurs éclatant. Elles se sont éteintes, laissant une œuvre vivante et colorée à un tableau chiffonné.

Cher  inconnuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant