Un autre cri, celui d'un homme, interrompit le recueillement.
Karl luttait pour se dégager d'une armoire recouverte d'un bloc de béton.
« Aidez-moi, Mike est blessé, cria Karl
Il s'était extrait des décombres, seul. Maintenant, il tirait par les bras son ami Mike. Les garçons vinrent à son secours, mais ils se figèrent tous par la vision d'horreur. Karl avait extirpé le corps des gravats amputé au niveau du tronc de sa partie inférieure. Plusieurs mètres d'intestins et de viscères traînaient à la suite du cadavre.
Moïse et Fred vomirent à tour de rôle. Karl continuait à traîner le corps dégueulant de boyaux vers le groupe de garçons.
« Bon sang, venez m'aidez! Il faut soigner Mike!
Edouard surmonta son dégoût et prit Karl par les épaules. L'inconscient de Karl refusait le passage de la mort.
Le garçon de bonne corpulence secoua Karl de sa torpeur.
« Lâche le Karl! Il est mort !
— Non ! il faut le soigner ! allez là-dessous récupérer ses jambes !
Edouard le regarda avec stupeur. Son camarade était dans une crise passagère de folie, il fallait le faire revenir. Il leva la main, et après un moment d'hésitation décocha une gifle.
« Revient à nous Karl ! Mike est mort putain ! Découpé en deux ! Personne ne survit à ça !
Dans son regard, la lucidité revint. Il baissa la tête et s'enferma dans le silence.
Le soleil rouge de cette fin d'après-midi douce en température déclina sur l'horizon ravagé. Les ombres de la nuit commençaient à masquer les horreurs de la catastrophe. Nous nous étions rassemblés dans les larmes et le désespoir. Maintenant une fatigue brutale tombait sur nos épaules. Nous nous étions éloignés du charnier central du lycée. Nous avions trouvé un coin dévasté mais calme, où aucun cadavre n'était dans notre champs de vision. Ne voulant pas rester statique, avec Moïse nous avions ramassé un tas de débris à base de bois et déposé sur le sol au centre du groupe assis. Vanessa avait toujours son briquet sur elle. Le gadget à faire le feu embrasa l'amas de bois. Toutes les consciences éveillées autour de cette lumière rassurante savaient ce briquet éphémère et ajoutèrent à la liste déjà longue des outils qui pourrait leur manquer à l'avenir.
Personne ne réagissait, personne n'avait faim, une contemplation présente qui sonnait comme une fin. Ils devaient réagir... Je devais réagir ! Je me levais devant mes compagnons devant le brasier.
"Nous devons organiser la survie et la progression de notre groupe. Malgré les différences qui nous marquaient encore il y a quelques heures, nous devons nous serrer les coudes, nous entraider. Des liens très forts nous unis maintenant, ceux du sang et des larmes.
— Et qu'est-ce qu'on peut bien faire à part attendre les secours ? demanda Karl larmoyant.
— Ça va faire maintenant neuf heures que la surface de ce qui est possible de voir a été ravagée. As-tu vu ou entendu la moindre chose qui pouvait ressembler à des secours ?
Cette question n'attendait pas de réponse évidemment.
« Je vous le dis, qu'on le veuille ou pas, ce qui vient de se passer est hors du commun. Rien de semblable n'a été vécu de mémoire d'homme. J'en suis persuadé. Nous venons d'assister à une fin du monde, à une fin de l'air moderne. Des secours médicalisés, des hélicoptères, des tanks hi-tech, nous n'en croiserons pas, ils n'existent plus.
— Et tu peux nous prédire ça après neuf heure seulement ? s'exclama Edouard.
— Non, je le sens ! c'est tout.
— Et tu crois qu'on est les seuls survivants sur cette planète pendant que tu y es!
— Bien sûr que non! Je pense que nous allons croiser des colonnes de réfugiés demain quand nous allons nous déplacer vers Paris.
— ... Paris! repris une partie du groupe.
— Oui! nous sommes qu'à cinquante kilomètres de Paris. C'est là que nous aurons des secours s'il y en a, et des informations sur ce qui s'est passé.
— Que cinquante kilomètre ! grogna Tania. Tu en as de bonnes ! Tu crois qu'on va se pointer à la gare pour prendre le train ou quoi ?
— Allons ! il faut que l'on surmonte les difficultés ensemble. A une allure moyenne, Paris doit être à dix heures de marche d'ici. Et avec un peu de chance, nous dégoterons une voiture ou un van en état de marche.
— A condition qu'il y ait encore une autoroute, continua Fred.
— Mais il faut tenter l'aventure, avancer. Ceux qui ne veulent rien faire et rester accroupi ici devant les cendres de ce feu n'avaient qu'à mourir tout à l'heure. A quoi vous sert la vie que Dieu à préserver aujourd'hui sur cette Terre sinon pour continuer à vivre et faire progresser notre génération dans ce nouveau monde.
— Ça y est, nous avons un nouveau gourou. Micaël le nouvel illuminé postapocalyptique. Suivons sa voie, implora ironiquement Karl.
— Non ! il a raison, nous devons réagir à défaut de dépérir, intervint Moïse.
— C'est vrai, il exagère un peu, mais je veux suivre sa direction, enchérit Fred.
— Vous êtes ses plus proches amis, c'est pour ça que vous avez confiance, rumina Karl.
— Il n'y a pas qu'eux ! moi aussi j'ai confiance en lui, dit Syvanna.
C'étaient les premiers mots de la jeune fille depuis des heures. Son intervention claqua comme un adoubement pour moi. Elle me faisait guide du groupe. Les flammes du feu reflétaient dans les yeux des membres du groupe comme un nouvel essor de combativité, une nouvelle vivacité.
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Chaos³
Ficção CientíficaQuand un petit groupe de lycéens se prend en pleine face l'apocalypse. Quand leur petite vie commune est dévastée par le souffle de la mort. Quelle est la nature de la fin du monde ; une catastrophe naturelle, une attaque nucléaire, une invasion ext...