Chapitre 13 - Archibald Wentworth

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Barnsley, 

26 Mai

Evidence maintenait une allure vive. L'air s'engouffrait dans les yeux d'Archie et floutait sa vision. Il savait toutefois que le château n'était plus loin. Il avait repris le dessus sur ce qui était à l'intérieur de son corps, mais le lycan à ses trousses était tout proche. Sans sa blessure à la cuisse, il les aurait probablement rattrapés. L'entrée à proximité était celle du personnel, par le cellier. Anita et Lucia ne la verrouillaient jamais et il pourrait sauter de sa jument pour s'y glisser et s'y barricader.

Quelques centaines de mètres, c'est tout ce qui lui restait à parcourir. Les aboiements rageurs du prédateur lui arrachèrent un frisson. Il passa sa manche pour tenter de se dégager la vue, toutefois, le tissu maculé ne fit qu'étaler un peu plus de sang et de boue sur sa peau pâle.

Il finit par enfin s'approcher suffisamment du château. Un œil par-dessus son épaule lui confirmait que la bête s'apprêtait à bondir sur lui.

Archibald lâcha les rênes de sa monture et se laissa rouler au sol de côté. Ainsi allégée, la jument esquiva comme elle put le loup avant de filer vers les bosquets. Le jeune chasseur se releva aussi rapidement qu'il le put et fonça jusqu'à la porte du cellier, son assaillant sur les talons. La douleur lancinante dans sa cheville ne lui permettrait pas d'y arriver à temps.

Le fils héritier des Wentworth arma à la hâte une flèche et se tourna vivement vers le prédateur à quelques mètres derrière lui, ignorant la brûlante douleur dans son corps.

La flèche siffla et vint rejoindre la pointe toujours enfoncée dans la cuisse de l'être surnaturel qui laissa échapper une plainte terrible. Archibald profita de ces quelques secondes de répit pour détaler en boitant et espérer se retrouver un peu plus en sécurité.

L'angoisse gonflait dans sa poitrine à mesure que sa main s'approchait de la porte. Il priait pour que l'entrée soit encore accessible.

Lorsqu'il sentit le bois bouger, un élan d'espoir lui redonna la vigueur nécessaire pour fermer la porte derrière lui et enclencher le verrou. Il sentit plus qu'il n'entendit le poids du monstre heurter le bois avec rage.

Conscient que ce maigre verrou ne tiendrait pas longtemps sous les puissants assauts de la bête, Archie, totalement hermétique au brouhaha qu'il produisait, fit basculer le vaisselier afin de renforcer la porte. Toujours dans la crainte que son poursuivant ne fasse céder la barricade, il poursuivit son œuvre en plaçant un maximum de meubles pour obstruer l'entrée.

Les bruits provenant des offensives du lycan s'estompèrent finalement jusqu'à disparaître. Peut-être le loup était parti chercher un autre moyen d'entrer.

Archibald s'appuya contre le mur de pierre froid et se laissa glisser au sol. Il replia les genoux jusqu'à sa poitrine et y posa ses bras avant d'y enfouir son visage. Un sanglot le secoua, submergé par la culpabilité soudaine d'avoir abandonné la dépouille de sa sœur sur place.

Le cœur pris en étau par une profonde tristesse, Archibald peinait à respirer entre les tremblements incontrôlés de son corps. Les picotements dans sa nuque redoublèrent et se déplacèrent et finirent par ressembler à des coups de marteau résonnant dans tout son crâne.

Pour essayer d'atténuer la douleur, le jeune homme bascula la tête vers l'arrière pour profiter du frais sur le mur du cellier. Il n'avait pas envie d'entendre les reproches que l'Être à l'Intérieur avait à lui faire. Il n'avait pas envie d'entendre qu'il était faible, qu'il abandonnait trop vite. Il n'avait pas envie d'entendre cette cruelle vérité.

Il avait un talent énorme, il avait fanfaronné pour se venger de l'attitude inacceptable de son frère. Mais lorsqu'il s'agissait de prendre les armes en conditions réelles, ses jambes flageolaient, ses mains devenaient moites et il était incapable de garder la tête froide et penser à une quelconque stratégie. Archibald n'apercevait que la défaite et les conséquences que cela apportait. Il ne voyait plus que le sang et la mort. L'héritier de la prestigieuse famille avait peur, et s'il ne s'imaginait pas pouvoir fuir, envisageait tout simplement de mourir, sans véritablement essayer.

L'Héritage du Chasseur : Le Loup parmi nous.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant