Le minotaure

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L'enfermement. Et la solitude. C'est ce qu'il ressentait. La solitude depuis tant d'années qu'il en avait perdu le compte. C'était horrible. Il était affamé aussi, et dans une colère noire. Mais il ne pouvait pas en être autrement. C'était son destin. Il ne l'avait pas choisi mais c'était le sien.

Il errait dans ces couloirs sans fin à la recherche d'une sortie. La terre rouge l'asphyxiait, la blancheur des murs l'aveuglait. Il errait.

Il souffla d'un air rageur puis huma l'air. Cela sentait le sel, la sève de pin et le thym. Une odeur plus ténue lui parvenait. Cette odeur là était celle d'huile, de parfum et de chair. Cette odeur là le réconfortait. Mais elle était si loin!

Elle lui serrait le coeur, lui faisait tourner la tête, ses yeux se brouillaient et un vide immense se créait en lui.

Deux vides le hantait. Le premier lui tordait constamment l'estomac, le faisait saliver, lui faisait bourdonner les oreilles et parfois cessait. Mais cela était rare.

Le second vide lui retournait le coeur, le faisait hurler, pleurer. Ce vide lui donnait l'impression que mille mains venaient lui déchirer le corps. ce vide le transperçait de mille traits.

Ce vide le coupait dans son errance, parfois pendant plusieurs heures, l'empêchait de se mouvoir comme il le souhaitait. Celui ci n'était jamais comblé. Ce vide lui détruisait l'intérieur et même en se frappant contre les murs, celui ci persistait. Il avait tout essayé, mais rien n'avait réussi à enlever ce mal qui le rongeait. Rien ne faisait plus mal que ce vide. Parce qu'il semblait sans fin, parce que rien, même le ciel céruléen, ne semblait plus immense et intouchable que ce vide. La solitude le rendait fou, fou de rage, de tristesse et d'amour. Rien n'aime plus que cet être que tous ont abandonné. Il désirait être aimé mais ne le savait pas. Comment le pourrait il lui qui ne connait pas notre langage? Il voulait combler ce vide. Il le souhaitait plus que toute autre chose.

Quand une fois par an les parfums et les huiles venaient à lui, quelque chose venait lui transpercer le coeur, le faisait battre cent fois plus vite. Mais la salive lui remplissait la gueule, ses oreilles bourdonnaient. Les cris et les pleurs le rendait fou de rage. Et puis, quand le calme se faisait, quand son estomac était plein et le sol rouge et humide, quand les murs blancs étaient devenus maculés de rouge, il pleurait. Tous ceux qu'il avait touché ne sentait plus les huiles et les parfums mais une odeur salée bien plus forte que celle habituelle. Il errait à nouveau jusqu'à ce que les vides se fassent à nouveau en lui.

Un jour, non pas à la date habituelle mais plus tôt, ou plus tard, il ne savait plus, ou plutôt, il ne savait pas, deux odeurs lui parvinrent. L'une était jeune et vive, l'autre plus âgée mais tout aussi vive. Une odeur de cire vint se mêler à celle des parfums et celle du thym et des cistes.

Il était rassasié, mais curieux, il alla donc voir. Plus il se rapprochait, puis il se rendit compte que l'odeur la plus âgée hantait les murs depuis bien avant son arrivée. Elle avait toujours été là mais faible, ténue, passée. Ce parfum était comme celui de la pluie sur les murs de calcaire, mais infiniment plus forte et acre. Il haïssait cette odeur. C'était celle qui l'enfermait. Il poussa un grand cri et se précipita vers l'odeur. Il la détruirait. Et tout s'arrêterai n'est ce pas?

Quand il arriva là où l'odeur était la plus forte il ne vit rien. Elle venait d'en haut. Il releva la tête et vit des ailes. Cela était il le moyen de s'enfuir? Mais seules les mouettes pouvaient voler, il le savait bien, sinon il n'aurait pas été ici.

Quand les deux formes furent hors de vue, le calme revint,le calme seulement brisé par le sifflement du vent, le fracas des vagues et les chants des oiseaux.

Il recommença à errer.

Tous ceux, tout ce à quoi il touchait était détruit dans l'instant, dévoré pour lui donner un peu de vie. C'était sans doute cela son problème. Rien de ce qui l'approchait ne pouvait subsister bien longtemps, tout était déçu et noirci par son âme détruite. Il était en lui-même contradictoire, voulant à la fois se rapprocher de ces êtres étranges mais voulant tout obtenir d'eux jusqu'à leur chair délicieuse et douce. Il ne pouvait aimer sans détruire. Là était la cause de sa solitude. Les larmes coulaient, il se prostrait de temps à autre et l'incompréhension lui tordait le cœur. Il poussait des cris de douleur terrible que l'on entendait dans toute la région.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 15, 2022 ⏰

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