/ chapitre zéro : Ne pas vouloir.

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... Rose ...

Quelqu'un m'appelle, j'entends sa voix, cette personne n'est pas très loin de moi, je le sais. Mais je ne la vois pas. Le brouillard est trop épais, je ne vois même plus mes pieds, mes mains sont frigorifiées, mon corps tout entier tremble.

... Rose ...

Cette voix persiste, j'ai l'impression qu'elle est à l'intérieur de ma tête, que ce n'est que le fruit de mon imagination mais ... elle résonne, comme si elle était filtrée par une grotte. Et ça recommence, mais elle n'est pas dans ma tête, j'en suis sûre, elle vient d'en face, elle veut que je vienne.

... Rose ...

Alors j'y vais, sans me poser de question. Je m'enfonce dans le brouillard glacial jusqu'à voir une silhouette s'élevait en face de moi. Grande et mince, ce que je ne suis pas, cheveux longs et lisses, ce que je n'ai pas. Je ne la vois que de dos, cependant je ne vois pas sa peau. Est-elle aussi blanche que la mienne ? ou au contraire, bronzée par une exposition excessive au soleil ? Mon dieu, je m'en fiche, j'ai tellement froid. Je n'ai pas d'écharpe, ni de bonnet, ni de manteau, mais seulement mes bras pour me couvrir.

- Hey, heum, bonjour ? bonsoir ? Je dis, incertaine. À cause de ce brouillard j'ai perdu la notion du temps, je ne sais pas si nous sommes en plein jour ou en pleine nuit.

... Rose ...

La silhouette, c'est elle qui m'appelle depuis tout à l'heure. Ses cheveux bougent sur le côté, comme si une main invisible venait les mettre en place et je vois sa tête tournait lentement vers moi. Elle tourne, elle tourne puis tourne encore. Mon cœur s'emballe en voyant que sa tête s'est retournée entièrement alors que son corps n'a pas bougé d'un pouce. Mes yeux s'écarquillent en voyant le reste. Une partie de son visage n'est plus là et l'autre partie est couverte de ...de...de sang !

... Rose ...

Oh. mon. dieu. elle commence à courir vers moi, je suis tétanisée, j'ai les yeux fermés, collés entre eux. Elle va m'avoir, elle va m'avoir, elle va ...


- ROSE RÉVEILLES-TOI !


Mes yeux s'ouvrent brusquement et je sursaute en voyant les yeux bleus rieurs de Lily, m'a plus jeune sœur, tout près des miens. Elle gloussa en me voyant sursauter. Ne ris pas de ma peur, femme !

- Tu es ma sauveuse, oh je t'aime tellement ! Je dis en souriant, ma respiration est rapide, mais la buée ne sort plus de ma bouche. Il n'y a plus de brouillard, je n'ai plus froid, ce n'était qu'un cauchemar, un putain de cauchemar, je suis sauvée !. Tu m'as sauvée de cette horrible femme, oh viens que je t'embrasse !

Mes bras rampent jusqu'à ses bras et j'essaye de l'attirer vers moi, mais elle s'éloigne en couinant. Je ris légèrement en voyant sa réaction.

- Tu racontes nawak toi, elle prend un air sérieux tout en posant le dos de sa main contre mon front. T'es pas malade pourtant.

- Cesses d'être stupide, si j'étais malade, je le saurais...

- Et puis de toute façon, t'as pas intérêt d'être malade. Elle ne m'a pas écouté, cette andouille. Je prends le coussin voisin et j'essaie de lui envoyer dessus, sauf qu'elle l'a évité et il a fini par s'écraser au pied de ma commode. Désolé copain, t'inquiètes pas, commode est quelque de froide, très dure, mais ordonnée. Cesses de jouer veut-tu, il faut que tu te prépares, que tu finisses ta valise, que tu ...

- Quoi ? Nah nah nah, attends deux minutes, Mon doigt se pose sur sa bouche pour la faire taire. Elle tente en vain de le mordre pour le faire fuir. Pourquoi devrais-je faire tout ça ?

Lili arrête d'essayer de réduire en miette mon doigt pour me donner un regard faussement triste et indigné. Avec ses mains, elle mime de longues oreilles de chien rabattus sur l'arrière de son crâne. Je ne remarque que maintenant qu'elle est habillée, coiffée, maquillée.

- Mais ... aujourd'hui c'est le grand jour, tu ne te souviens pas ? Un flash éclaire mon esprit, mon sourire s'évanouit, un soupire s'échappe de mes lèvres. C'est aujourd'hui, ce jour que je repoussais sans arrêt de mon esprit. C'est fou ça, à vingt ans, ta mémoire n'a toujours pas évolué. T'vas finir comme Doris, moi j'dis !

Moi, finir comme Doris ? Ce poisson chirurgien bleu de Némo à la mémoire pire que défaillante ? Non merci ! Je frappe le bras de Lili, qui elle lâche un petit aïe exagéré. Je lève les yeux au ciel.

- Bon, le petit-déj est sur la table du salon si tu veux manger, moi je vais finir ma valise ! Lili se lève et enlève la poussière inexistante de sa robe mauve, puis s'en va en claquant ses ballerines noires sur la parquet et avant qu'elle ne sorte complètement de ma chambre, elle dit. Dépêches-toi, le pays du Matin calme n'attend que nous !

Je veux me cacher dans ma couette, me noyer dedans pour qu'elle ne me retrouve pas. Je veux m'enrouler dedans et me jeter par la fenêtre, je veux disparaître. Je veux que cette silhouette revienne.

Mais je veux pas aller là-bas, je ne veux pas le revoir.

Je ne veux plus affronter mon passé, je veux que la barrière de l'oubli que j'ai mis longtemps à construire reste intacte. Je veux trop de chose qui ne se réaliseront pas.






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⏰ Dernière mise à jour : May 23, 2015 ⏰

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