Chapitre 16

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Sakura passa la nuit suivante à se remémorer ce regard connaisseur. La façon dont le brun s'était adouci lorsque Shikamaru avait compris qu'elle avait saisi son sous-entendu. Il avait quelque chose d'autre aussi. Quelque chose dans son sourire qui n'avait rien à voir avec la transplantation. Elle perdit des heures à analyser cette mimique, à essayer de comprendre la douce amertume collée à ses lèvres.

La rosée venait à peine de se percher sur le gazon que trois coups retentirent sur sa fenêtre. Kakashi lui adressa un signe. L'absence de sourire la fit laisser tomber l'idée d'enfiler d'autres vêtements. Il y avait un proverbe à Konoha: Kakashi est le chat quand il sourit. Il est la souris quand il cesse.

Le duo pénétra le bureau de l'Hokage. Shikaku, Inoichi, Genma, Shizune et Tsunade les attendaient déjà. Kakashi s'évacha contre un mur en retrait. Sakura s'avança au niveau de ses patrons. Elle vit les sourcils de Genma se lever. L'adolescente l'ignora parce que ce n'était pas le moment pour de telles futilités. Les prochains mots de la Senju prouvèrent son point.

-Orochimaru va attaquer Konoha dans les prochaines semaines.

Sakura le savait déjà. Elle était une des premières à l'avoir su. Si Tsunade l'annonçait si officiellement, c'était qu'elle attendait quelque chose d'autre de leur part que de la réflexion.

-La mémoire d'une orpheline était remplie d'évidences la ralliant au village du son, expliqua Inoichi.

Il ne nomma pas Harui à voix haute.

-Orochimaru n'avait pas posé un sceau pour éviter ce genre de fuite d'informations ?

Kakashi acquiesça avec la question de Genma.

-L'enfant a arraché la dent sur laquelle il était, renchérit Shikaku.

Cette information raidit doucement les épaules de Sakura. Harui avait délibérément exposé son village pour eux. Harui demeurait une traîtresse, mais elle avait été avant tout une enfant influençable. La médecin aurait aimé pouvoir dire que si la fillette s'était confiée, les choses auraient été différentes. La réalité était qu'elle aurait été exécutée dès qu'Inoichi aurait eu fini de chercher son esprit. Konoha était un arbre et ses racines ne pardonnaient pas.

L'air était saturé de la lourde odeur de ramens. La devanture du stand d'Ichiraku flottait légèrement au rythme lent du vent. Des voix fortes s'échappaient du restaurant. Sakura apprécia, quelques secondes, la superficialité des mots échangés. Elle savait que bientôt ces tons criaireraient au meurtre, priraireraient un Dieu inexistant.

Shikamaru et l'Uchiha remarquèrent son entrée. L'Uzumaki et l'Inuzuka se tenaient nez à nez. Les bols tremblaient, des gouttes grasses s'écrasant sur le vieux vernis du comptoir. Elle aurait aimé avoir leur véhémence. Elle aurait aimé avoir cette inconscience de la noirceur du monde shinobi.

Shikamaru leva la tête au bruit du rideau se soulevant. Il savait déjà qu'elle arrivait. Son nez s'était habitué à l'odeur de mort qu'elle baladait. Ses yeux détaillèrent paresseusement le trajet d'une goutte de sueur sur sa gorge. Il avait passé la nuit à envisager toutes les solutions possibles. Le shinobi savait qu'il n'y avait qu'une bonne solution. Elle était trop brisée pour supporter la trahison du faible cœur du garçon. Dans un univers où les yeux verts n'étaient pas fatigués, il aurait peut-être continuer de suivre du regard la perle de sueur. Hélas, dans le leur, elle était l'oiseau messager de la mort et il n'était qu'une autre âme sur son passage.

Les yeux céruléens la fixaient dans toute leur grandeur. Il était l'un des plus puissants ninjas. Pourtant, son regard comportait une détermination innocente que seuls les enfants possédaient. Un seul coup d'œil et Sakura savait qu'il était un rêveur, déconnecté de la dure réalité du monde ninja. Elle ne détestait pas Naruto. Elle était juste détentrice du savoir que des paires de bras s'épuisaient pour qu'il puisse continuer d'idéaliser leur société.

À l'autre bout du filOù les histoires vivent. Découvrez maintenant