8. Entre réalité et espoir

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Une semaine s'est écoulée depuis la sortie parisienne. L'effet euphorisant de ma journée avec Sabine a perduré jusqu'au jour du rendez-vous avec le docteur Parrot.

Note à moi-même : lorsque mon moral sera en berne, rechercher dans les tréfonds de mes souvenirs, les moments de bonheur dont celui-ci fait partie.

La matinée passe à vive allure. J'énumère à haute voix la liste des tâches à effectuer avant de partir. Mes parents vont arriver d'une minute à l'autre pour garder Tiago. Le réfrigérateur est plein et j'ai nettoyé la maison de fond en comble dans le cas où mon absence s'éternisait. Dans le cas contraire, j'aurai plaisir à ne pas courir par monts et par vaux à mon retour. Même si ce n'est pas vraiment très utile, le grand ménage me permet de faire le vide et de me détendre. J'ai affiché un tableau sur la verrière de la cuisine avec l'organisation quotidienne. J'y ai noté les horaires et l'adresse de l'école, le judo du jeudi soir, le goûter, les devoirs et le bain, tout cela sous le regard moqueur de mon mari.
Dans la tête d'Alexandre, ce niveau d'anticipation et de détail est inutile, mais cela me rassure.

Retourner à l'hôpital, entouré uniquement de soignants inconnus et de personnes « cancéreuses » me donne le tournis et m'angoisse au plus haut point. L'anonymat aura l'avantage de m'assurer quiétude et tranquillité mais l'inconnu me fait peur. L'ambivalence de mes sentiments me conduit à la procrastination ou la paralysie, comme prisonnière dans un long tunnel sombre avec deux issues identiques. Laquelle choisir pour en sortir ? Je suis prise de vertiges, je m'assois un instant pour reprendre mes esprits.

La sonnette de la maison retentit, mes parents sont là. Les embrassades sont intenses.
— Bonjour ma chérie, comment vas-tu ? demande ma mère.
Indécise, je ne sais pas s'il est préférable de répondre vraiment à la question ou de botter en touche. Je choisis la deuxième option, par crainte de les anéantir en partageant l'état dans lequel je me trouve réellement.
— Ça va merci. J'ai tout préparé, normalement vous ne manquerez de rien.

Je leur transmets les consignes sur l'organisation, avant de prendre mon garçon dans les bras.
— Je reviens vite, d'accord mon chéri ?
— D'accord, maman. Je vais être sage avec papi et mamie, promis ! Tu seras fier de moi comme ça.
— Je suis déjà très fière de toi, tu sais.
Tiago souris en mâchouillant son index et majeur, à la recherche d'une contenance. Je l'embrasse tendrement sur le front.
Je monte dans la voiture côté passager, le cœur lourd. A travers le rétroviseur, je vois les mains de mon fils s'agiter sur le pas de notre porte, pour nous dire au revoir, entouré de mes parents.

Je refoule mes larmes. Ma gorge me lacère.

Le trajet se fait dans un silence religieux. Alexandre se montre pensif lui aussi. Je n'ai aucune idée de ce qui agite ses pensées sans toutefois parvenir à rompre notre mutisme.
Quelques embouteillages plus tard, nous arrivons à l'institut de cancérologie à Paris. Cette barre d'immeuble sans aucun charme et le bruit assourdissant de la métropole contrastent avec la journée passée en compagnie de Sabine la semaine précédente. La perspective de venir régulièrement durant des mois me donne envie de rebrousser chemin.

Repenser à mon fils pour ne pas abandonner.

Mes jambes me portent et j'entre dans le hall avec la boule au ventre mais l'esprit combatif. Une fois les formalités réglées, nous patientons en salle d'attente avec Alexandre, jusqu'à ce qu'un homme en blouse blanche s'approche, et nous invite à le suivre.
— Je suis le docteur Jean-Luc Parrot, oncologue. J'ai pris connaissance de votre dossier et j'ai quelques questions à vous poser. Allez-y, installez-vous je vous en prie, nous dit-il en désignant les deux chaises face à son bureau des consultations.

Je lui tends mon dossier médical ainsi que la lettre de recommandation du docteur Frost avant de m'installer.
Il me pose une série de questions sur mes antécédents familiaux, l'histoire de la maladie, mes symptômes, et les examens réalisés. Il scrute les documents.

Les falaises ocreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant