Le chevalier extorquant des écus au miséreux

Chapitre 1

Un noble, vêtu comme un oignon,

Arrivant comme mars en Carême,

Devant un pochtron

Fit le pot à deux anses

Afin de réclamer son dû.

- Vassal, partout je suis marqué au bon coin.

Je sais que dans tes bottes tu as du foin.

Ne retourne pas à ton vomissement

Et rends-moi mon argent !

- Aux cheveux maigres vont les mouches...

A propos de bottes,

Vous n'avez que des amis à la mode.

Pour moi, je suis chargé d'argent comme un crapaud de plumes.

Les araignées ont fait leur toile sur mes dents...

- Péquenot ! Quelle arrogance !

Je vois bien que tu t'es enluminé la trogne !

- A tout péché miséricorde...

- A tout seigneur, tout honneur !

Soulève toi quand je te cause,

Tu bois comme un Templier !

Cesse donc de m'accommoder de toute pièces !

Je te prêtais, je suis en besoin, tu me donneras.

- Ami au prêter, ennemi à rendre...

Je te disais tantôt que j'avais les poches trouées.

- Apothicaire sans sucre ! Pestiféré !

- Vieille amitié ne craint pas la rouille...

- Vilain, je te conseille d'avoir de l'onguent pour la brûlure !

- Si seulement j'avais quelques écus...

Abondance de biens ne nuit pas.

- Satané miséreux ! Tu t'en servirais pour te murger d'ivresse !

Tu es avare comme un rat.

Dis-moi, quand me rendras-tu mes écus ?

- A Pasques ou à la Trinité...,

Répondit le gueux en poussant le temps à l'épaule.

Avocat, passons au déluge.

A beau mentir qui vient de loin,

Je ne te dois rien.

La mesure était comble.

- Les bons chiens chassent de race !

Cul-terreux aussitôt pris sera pendu !

- Qui veut noyer son chien l'accuse de rage...

Le noble monta aux nues.

- Mets de l'eau dans ton vin, bougre !

Et bats ta coulpe !

La messe est dite

Et la marmite est renversée :

Tu seras pendu !

- Je ne me fie pas à qui entend deux messes.

Toute médaille a son revers :

Un jour, tu me paieras très cher.

- Que dis-tu là, ivrogne ?

- A bon vin pas d'enseigne...

- Tu as donc des écus ?!