1

6 2 0
                                    

A Garence Hill, le cours de Blue River continue de s'écouler au pied des montagnes du Santora et on pourrait penser que rien ne peut bouleverser sa trajectoire. Six mois se sont écoulés depuis la fin du procès de David Fisher, et les habitants ne parlent pas de ce qui est pour eux comme une cicatrice que l'on cache sous les vêtements, mais que l'on sent à chaque mouvement, laissant une trace cachée indélébile...

Mais parfois, c'est une autre douleur qui révèle le mal, et c'est ce qui se produisit lors du verdict concernant John et Edouard Fisher. Ce dernier, malgré sa jeunesse, était condamné à la prison dans l'attente de son jugement par le tribunal. Le verdict du jugement attendu était au minimum l'emprisonnement à perpétuité. L'ombre de la peine de mort planait au-dessus de sa vie. La décision dépendrait beaucoup du juge qui instruirait la procédure. La blessure, consécutive au coup de fusil tiré sur Adrian Broge, avait entraîné la mort du Maire de Garence Hill, et il ne pouvait en être autrement... Jill Master, l'avocate de la famille, essayerait quand il serait temps de lui éviter la peine capitale.

Tout ce qui avait été précédemment le « clan Fisher » était désormais terminé. Miranda, l'épouse de John Fisher, priait chaque jour pour qu'il ne soit pas condamné à mort. Elle était tombée malade, juste après la fin du procès de son plus jeune fils David. Elle avait tant résisté, mais la situation difficile dans laquelle se trouvait John son mari et Edouard son ainé, faisait que son organisme vital ne tenait plus à grand-chose. Quant à John Fisher, il redoutait le procès de son fils et son propre emprisonnement même s'il avait prévu une somme d'argent énorme pour pouvoir se faire libérer sous caution. Jusqu'au procès, il n'avait plus le droit à l'erreur, il le savait et de toutes manières, il avait changé. La disparition d'Adrian Broge était marquante pour lui. Les évènements s'étaient enchainés dans une spirale infernale et, même s'il ne l'avouerait jamais, en lui-même, il reconnaissait qu'il s'était trompé. Il avait été aveuglé par sa haine des Broge, alors que, visiblement, la seule responsable de l'emprisonnement de son fils David était Jeannette Clarks. C'est elle qui avait mis le feu aux poudres. John Fisher s'en voulait car il avait entrainé son fils Edouard dans la situation actuelle, et à moins d'un miracle, il ne pourrait jamais réparer son erreur.

L'état de son épouse Miranda le préoccupait. Elle qui habituellement, rayonnait, était si élégante, n'était plus que l'ombre d'elle-même. Elle passait son temps, allongée dans le canapé, sous un énorme plaid. Elle avait perdu tout attrait pour la conversation et savait rester des heures les yeux dans le vide. Dans ces moments-là, John n'osait pas interrompre ses souvenirs, car, il en était sûr, sa femme pensait à leur fils Edouard, et au bon vieux temps, quand Edouard était à Stone House, avec eux, et l'ensemble de ses frères.

Cette pensée serrait le cœur de John. Tout cela était entièrement la faute de cette misérable Clarks. Elle paierait tôt ou tard pour le malheur causé aux siens, l'humiliation vécue par David, et le déroulement des événements qui avaient menés à la mort d'Adrian Broge. Depuis la fin du procès de David, le patriarche Fisher n'avait pas réussi à reprendre les affaires, et, ses activités étaient gérées comme elles le pouvaient, par ses fils. Nicolas, Jack et Karl se répartissaient la gestion des bijouteries de saphir, les relations commerciales import/export et la gestion des carrières. David, quant à lui, avait purgé ses heures de travaux d'intérêts généraux à sa sortie, et se consacrait depuis à l'ouverture différée du Musée et du restaurant de la coupole dans la montagne du Santora. Son attachement à cet endroit n'était pas neutre, ni sans lien avec son histoire avec Betty. Il ne pouvait oublier leur premier rendez-vous, fondateur de leur amour et point de départ d'une dramatique destinée.

Son amour pour Betty, c'était ce qui l'avait fait tenir pendant la période difficile de son emprisonnement à Calstrazy. Concernant l'ouverture du musée, David n'était pas très sûr que cela fonctionnerait. Sa confiance en lui d'antan, l'avait abandonnée. Il reprenait ce projet, qui lui tenait à cœur, de son père, mais il n'était pas dupe sur le succès de l'opération. Depuis le début, de ce que tout le monde appelait le procès du clan Fisher, leurs boutiques de Saphir avaient fait l'appel de Boycotts et le chiffre d'affaires des sociétés s'était littéralement effondré. David et ses frères essayaient de relever un empire déchu, comme pour sauver une image idéale d'un ancien monde qui disparaissait peu à peu. La publicité réalisée en dehors de la vallée, permit d'effacer peu à peu le dédain sur les activités Fisher, pratiqué par la ville, et conduit souterrainement par Victoria Broge, qui avait repris le poste de Maire à la suite du décès de son mari.

GARENCE HILL - LA TEMPÊTE - TOME 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant