2- Adrian & Gabriel

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Gabriel et Adrian s'attelaient à la tâche auprès d'un ruisseau en bordure de la forêt. Assis sur de l'herbe fraîche, le garçon s'occupait de laver des vêtements tout en discutant avec son amie, qui cueillait les fruits d'un gigantesque noyer avec l'aide de son père, Aérios.

Il pouvait entendre bon nombre d'oiseaux chanter ainsi que le passage de femmes qui venaient, elles aussi, utiliser le même ruisseau un peu plus au large.

-Fais attention quand tu grimpes ! avertit Aérios lorsque sa fille se mit à escalader les branches.

-Allons, je ne risque rien.

Sans s'en rendre compte, Gabriel s'arrêta de travailler pour observer la scène. Il se mit à sourire en voyant le visage concentré d'Adrian, qui tirait la langue en tendant sa main pour récupérer quelques noix. Soudain, la jeune fille tourna la tête en sa direction.

-Que fais-tu, à me regarder ainsi ? interrogea-t-elle.

Le garçon, pris sur le fait, détourna le regard quasi-instantanément et se replongea ardemment dans sa tâche afin d'oublier la gêne qui le traversait. Il arrivait souvent qu'il soit distrait par son amie, qui se faisait une joie de lui faire remarquer.

Aérios s'approcha de l'enfant et s'agenouilla discrètement à ses côtés.

-Si tu ne cesses de la contempler à longueur de journée, tu vas devoir l'épouser. chuchota-t-il.

-Epouser ? répondit curieusement Gabriel.

-A dix ans, tu ne sais toujours pas ce que ça veut dire ? s'indigna l'homme.

-Non.

-Se marier. Se lier à quelqu'un pour toujours. Prendre soin d'elle, la protéger, faire des enfants... ce que nous font la plupart d'entre nous !

-Faire des enfants ? Comment faisons-nous des enfants ? rétorqua Gabriel, un petit sourire en coin.

L'homme en face se raidit, ne sachant plus quoi répondre.

-Tu es trop jeune pour comprendre. répondit-il avec sérieux. Je te confie Adrian, je dois m'absenter.

-Je n'ai pas terminé mon travail !

-Tu finiras plus tard ou une de ces femmes là-bas terminera à ta place. déclara-t-il en les désignant du menton.

Aérios se dirigea vers le centre du village en ordonnant au garçon de surveiller correctement sa fille encore perchée au noyer. Gabriel, quant à lui, s'adossa contre ce même arbre.

-Je crois bien qu'Aérios a fui par ma faute. dit-il en laissant échapper un petit rire.

-Oh, vraiment ?

-Il a perdu toutes ses couleurs lorsque je lui ai demandé comment on faisait les enfants. Les adultes sont vraiment des timides... murmura le garçon en contemplant le ciel.

-Comment en êtes-vous venus à discuter de ça ? C'est étrange ! s'exclama-t-elle.

-C'est lui qui a commencé à me parler de... mariage ! s'offusqua le garçon, tandis qu'une noix tombait dans ses cheveux.

Il croisa les bras en signe de contrariété. Au fond de lui, la situation l'amusait. Il avait ce petit plaisir coupable de faire le retour de bâton lorsque quelqu'un le mettait dans l'embarras au sujet de l'amour. Il aimait jouer sur les cordes sensibles, à parler de ce dont on ne parlait pas. Il était pratiquement sûr qu'il l'emporterait sur plus grand que lui s'il jouait dessus, à l'exception de quelques-uns qui lui avaient répondu franchement.

-Dans ce cas, pourquoi a-t-il parlé de mariage ?

-J'imagine qu'il se soucie bien trop de ton avenir. Il planifie déjà tout de ta vie.

L'Agneau et le LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant