Chapitre 6 - En attendant Leag (Partie 2)

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Puis il s’écoula rapidement une semaine sans que ce nouvel intrus ne réapparaisse, pour le plus grand plaisir de Jude.

Durant, ce temps, Annabelle eut vite d’autres chats à fouetter. Après des mois à remettre petit à petit la maison à son goût sur son temps libre, à coups de pinceau et de montage de meubles, les tracas avaient décidé d’apparaître. Car, en l’espace de douze années sans le moindre entretiens, la demeure s’était fragilisée. Le mardi, la chaudière rendit l’âme et la jeune Classée découvrit avec horreur que les plombiers n’étaient pas donnés, même en sa sachant largement à l’abri financièrement. Sa notion de la valeur financière ne lui avait toujours pas échappé. Ensuite, ce fut dans la nuit jeudi au vendredi qu’ils furent tous deux réveillés  lorsque la pluie diluvienne qui s’abattait sur San Francisco était parvenu à s’infiltrer jusque dans le plafond. L’étage était encore parsemé de seaux et une odeur d’humidité traînait dans l’atmosphère. Annabelle attendait encore le devis de l’artisan tout en appréhendant la prochaine tuile à venir. Elle n’osait même plus présenter la Dodge à un garagiste.

Elle pouvait toutefois toujours compter sur Evan pour lui changer les idées. Le samedi, tôt dans la matinée, il réitéra sa proposition d’un footing silencieux et elle avait accepté sans émettre de conditions. Toutefois, il avait ralenti l’allure lorsqu’il avait remarqué son état de fatigue, combiné au rhume carabiné qui l’accompagnait. Sans chauffage, jusqu’au changement de chaudière prévu pour la semaine suivante, ce qui incluait des douches froides en attendant, Annabelle avait attrapé froid. Le fait qu’elle ait également continué d’entraîner son bouclier dans la mer devait avoir joué également. Alors, elle parlait du nez et sa gorge la démangeait dès qu’elle inspirait trop fort. Tant que ce n’était que ça elle ne se plaignait pas. Tout ce qu’elle voulait dans l’immédiat, c’était juste que sa maison soit réparée et un bon bain.

Mais inquiet pour leur santé à tous les deux, Evan avait invité prestement les colocataires à profiter de son chauffage au sol dans la maison adjacente. Comme pour le footing, le début d’après-midi se passa dans le silence et avec un bon café. Annabelle était aux anges.

Elle s’était posée dans le salon, recouverte d’un plaid pour se tenir chaud, à continuer sa lecture du journal de sa mère. L’étudiant potassait une dissertation sur une œuvre de Steinbeck et Jude restait en retrait, sur le sofa de l’entrée. Intrigué par ce que faisait ce dernier, Evan attira discrètement l’attention de son amie et pointa le tatoué de son porte-mine.

- Il pionce assis ?

Annabelle se pencha sur le côté pour mieux voir la silhouette de Jude, assis, immobile, les yeux fermés et les bras croisés sur sa poitrine. Mais son visage était plus empreint d’une intense concentration plutôt que de fatigue – pour changer.

- Il travaille son radar, répondit-elle en retournant à sa lecture.

- Son radar ?

- C’est pour capter tout ce qu’il se passe autour de lui. Il essaie d’augmenter son rayon.

- Et c’est dur ?

Annabelle sourit devant la curiosité du jeune homme et son regard amusé. En début d’année, avec ses amis, c’était elle qui posait ce genre de questions. Elle s’était habituée à être entourée de Classés qu’elle en oubliait parfois qu’Evan n’appartenait pas à cette catégorie de gens.

- Les facultés, c’est comme un muscle. Si on veut l’améliorer, on doit le travailler. Dans le cas de Jude, le but est d’augmenter son rayon de recherche sans perdre en qualité.

Parfois, il lui arrivait également de ne pas négliger la télékinésie en maintenant en l’air un élément lourd tout en s’adonnant à une autre activité. La Croisée se rappela encore du jour où, en faisant la tournée du linge sale, elle s’était retrouvé nez-à-nez avec le lit de l’adolescent à un mètre du sol, avec lui dessus qui faisait tranquillement ses devoirs de maths.

Annabelle Storm - Les Oubliés de l'EmpireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant