Rien qu'une soirée au restaurant (3)

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Je ne croisais personne dans le couloir. Évidemment, il devait y avoir très peu de personnel à minuit passé. Je courais pieds nus, chaussures à la main, dans les allées sombres et froides de l'hôpital silencieux.

Benjamin.

Je me stoppai dans ma course, et en profitai pour me chausser en vitesse, appuyée contre un mur blanc. Je me mordis la joue. Une envie dévorante me poussait à faire marche arrière pour aller le voir. Juste une fois, juste cinq minutes. Pour lui embrasser le front, réchauffer ses mains gelées avec les miennes, imaginer comment il me regarderait lorsqu'il se réveillerait.

- Athéna, on a pas le temps ! Je suis désolée.

Mon unique occasion de rester au chevet de mon frère venait de s'envoler. Je repensai à la scène que j'avais laissée derrière moi. Le docteur Leuvis, toujours inconscient, le visage ensanglanté et la face écrasée contre terre à l'autre bout de la pièce. Et le souffle qui avait émané de mon corps. La puissance de l'explosion qui ne m'avait pas fait tressaillir une seconde. Mais qui avait projeté tout le matériel médical contre les murs et les fenêtres. Une vraie scène de crime.

- Lara qu'est ce qui m'arrive ?

J'avais recommencé à marcher.

- N'y pense pas, avance, on doit sortir d'ici !

La salle d'attente se profila au bout du couloir. Il y avait un carrefour, à gauche l'entrée de l'hôpital et à droite une rangée de fauteuils. Je me stoppai à l'intersection, l'arrière du crâne appuyé contre une paroie du couloir. Je ne devais pas paraître anxieuse, coupable ou bouleversée. Si ces satanés battements de cœur pouvaient bien cesser !

- Je vais t'aider, m'expliqua Lara. Mais dès qu'on sera sorties j'arrêterais de manipuler ton système nerveux.

J'approuvai en silence. Si Lara pouvait me faire oublier tous mes états d'âme immédiats, je m'en sortirais certainement plus facilement.

- Vas y dépêche toi, m'incita-t-elle.

À peine avais-je mis un pied hors du couloir que mon cœur se desserra, mes sourcils cessèrent d'être crispés, mes épaules se relachèrent et tout mon être me parut être plus léger.

Alors c'était ça le pouvoir des hôtes.

Elle pouvait me faire tout oublier, d'un seul claquement de doigt, je me sentais mieux que quiconque dans mon propre corps. Mais ce n'était qu'une façade. Toute la douleur était encore bien présente. Lara se contentait de me la faire oublier.

- Athéna !

Nate bondit sur ses pieds dès qu'il m'apercut. Une seconde avant, il était assis sur une chaise, le dos penché en avant, ses poings écrasés contre ses lèvres, l'air anxieux.

- Ne m'appelle pas comme ça je vais croire qu'un truc grave m'est arrivé.

Il fronça les sourcils, à moitié amusé, à moitié étonné.

- Tu... Tu vas mieux ?

- Oh oui rien qu'un petit malaise mais c'est pas la première fois. Quand j'étais petite je faisais souvent des malaises. Pour les vaccins le plus souvent. Ou les prises de sang. Mais j'ai jamais fait beaucoup de prises de sang. Et toi ?

Nate jetait des regards furtifs autour de lui, gêné. Je parlais peut être un peu fort. Il n'y avait personne d'autre que lui dans la salle d'attente. A l'accueil, le jeune homme nous fit un signe amical de la tête.

- Au revoir ! m'exclamai-je en retour.

Nate m'entraîna à l'extérieur.

- Tu es sûre que ça va ?

L'ANTI-HÔTE [Partie 1] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant