C'était Victoire qui avait conduit tout le monde jusqu'à l'hôpital. Avant que je ne sorte, on me donna quelques dernières recommandations concernant mes plaies ainsi que mon ordonnance. Lorsque tous les papiers furent signés, nous rejoignîmes donc la voiture de Victoire. Je montai à l'avant avec elle, et Annabelle et Viktor grimpèrent à l'arrière.
Aussitôt, Victoire mit l'une de ses musiques et commença à chanter. Dehors, le temps était radieux, c'était une magnifique journée de novembre. Le soleil brillait dans un ciel dépourvu du moindre nuage et le temps, sans être chaud, n'était pas trop froid.
— J'adore cette chanson !
Victoire monta encore le volume et nous nous mîmes à rire. Arrivés à un feu tricolore, le bruit qui émergeait de notre voiture alerta la voiture à notre gauche. Le conducteur nous observa avec des yeux ronds avant de se mettre à rire lui aussi. Victoire gesticulait avec énergie, faisant mine d'avoir un micro dans les mains.
Sa joie de vivre me faisait oublier les tiraillements de mon corps et apaisait ceux de mon cœur.
Elle nous posa tous à l'université, puis nous prîmes le chemin de mon dortoir. D'après ce qu'ils m'avaient confié, tout le monde n'était pas encore au fait de ce qu'il s'était produit, et ceux qui le savaient n'avaient pas eu vent de mon implication. Il y avait seulement une rumeur selon laquelle un étudiant avait brisé la vitre de la bibliothèque. Mais déjà, d'étranges rumeurs circulaient ; certains affirmaient que c'était un geste calculé, motivé par des revendications politiques. D'autres pensaient que ce n'était pas un étudiant du campus, mais quelqu'un entré par effraction afin de causer du grabuge. De toute évidence, les deux étudiantes ne s'étaient pas vantées auprès du plus grand nombre.
Nous passâmes le long des plaines du campus, puis sous le vaste préau, et atteignîmes enfin le couloir qui menait à ma chambre.
Johanne était derrière son ordinateur. Lorsqu'elle nous entendit, elle fit tourner sa chaise vers nous ; ses yeux paraissaient hésiter à croiser les miens. Son visage était encore plus fermé que d'ordinaire.
— T'as l'air en forme, constata-t-elle.
— Quelle délicatesse ! gronda Victoire. L'ingénieur qui t'a créée a pas intégré une extension dédiée à la politesse ?
— Et si tu retournais faire mumuse avec tes pierres et tes cartes ? Y'a plein de graviers sur le campus, je suis sûre que tu trouveras ton bonheur.
Il était parfois difficile de comprendre la relation qu'elles entretenaient. La plupart du temps, elles étaient comme chien et chat. La petite part restante, leur alliance menaçait le reste du monde. Finalement, ça valait peut-être mieux comme ça ; si elles commençaient à s'entendre de trop, nous serions tous menacés.
Je m'assis sur mon lit en soupirant.
— Louve a besoin de calme, tempéra Annabelle.
— C'est bon. Je n'aime pas trop le silence de toute façon.
— Pas étonnant que tu t'entendes avec l'autre vachette, grommela Johanne.
— Je suis Taureau ! éructa l'autre en réponse.
— Ouais, ouais, si tu le dis.
Victoire plissa les yeux, prête à montrer les dents. Quant à Johanne, elle avait croisé les bras sous sa poitrine et l'observait par-dessus ses lunettes. Leur animosité me rappela quelqu'un que j'aurais préféré oublier.
— J'ai fait des cookies si vous voulez.
La voix de Viktor perça la glace qui s'était solidifiée dans la chambre. Victoire tourna la tête vers lui, la gourmandise ayant remplacé ce simulacre de haine.
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Louve [En pause]
Ficção Adolescente« Le silence est une mélodie que je ne peux plus écouter. L'obscurité de la nuit est aussi celle qui voile mon cœur. » Pour sa dernière année de licence, Louve est de retour à Bagnan, une ville qu'elle a quittée dix ans plus tôt. Elle aimerait un no...