30. où Jimin marche

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Cela faisait des heures qu'ils marchaient.

Des heures pendant lesquelles ils n'avaient que peu parlé, à peine échangé quelques sourires encourageants. Chacun dans ses pensées, même ceux qu'ils accompagnaient.

Une des missions du maquis était de protéger celles et ceux qui souhaitaient passer la frontière.

Car, de plus en plus, on pouvait en avoir, des raisons de passer la frontière. Le travail obligatoire petit à petit mis en place au nord, qui envoyait les hommes et les femmes valides dans le pays conquérant en remplacement des soldats ennemis partis au front.
Des partisans, des compagnons comme eux qui étaient découverts par l'occupant et qui préféraient disparaître complètement.

Et surtout, de plus en plus, des hommes, des femmes, des familles entières qui fuyaient devant l'horreur qui se révélait peu à peu, devant le destin injuste qui les clouait à une étoile.

Aujourd'hui c'était cela. Un jeune couple qui fuyait, ensemble, alors que seule la femme était visée. Il ne l'abandonnait pas.

Alors ils marchaient, silencieux, tendus, observant chaque ombre, chaque recoin, dans la peur d'y découvrir une embuscade. La frontière était encore à trois heures de marche, dans un mélange de forêt montagneuse qui se dévoilait parfois.

Jungkook avait déjà accompli cette mission avec Michel, la semaine passée, maintenant c'était au tour de Jimin.

Mais, étrangement, Jungkook avait demandé à remplacer le compagnon aguerri qui devait l'accompagner, arguant qu'il connaissait maintenant le chemin et la procédure, et qu'il savait mieux que quiconque le protéger.

Michel était alité, malade, et le compagnon en question serait plus utile sur une autre mission. Chris avait accepté.

Et Jimin en était heureux, de ces instants partagés.

Jungkook marchait en tête, droit et imposant dans ses vêtements sombres, le pas vif. Sa silhouette se découpait sur la verdure environnante, les rayons du soleil jouaient parfois dans ses mèches brunes, et lui avançait, fort et fier. Malgré l'ombre bienvenue des arbres, il faisait toujours aussi chaud en ce début de mai, Jungkook avait retiré sa veste. Les muscles de son dos, de ses bras, se devinaient sous l'ombre ou le tissu, et Jimin se délectait de ce spectacle.

Qu'il était bon de ne plus lutter contre cette attirance, contre ce besoin qu'il avait de plus en plus de Jungkook, de son corps, de ses bras puissants. Qu'il était bon de se perdre dans son regard lorsqu'il s'abandonnait à lui, le laissait le vaincre, enfin.

Jimin savait, sentait que ce regard profond était alors si sincère qu'il en avait petit à petit baissé sa garde. Il commençait à faire confiance à Jungkook. Riant parfois même de la méfiance tenace qu'il avait eue, avant.

Non, maintenant il ne le craignait plus, repoussait d'un rire moqueur la supposition de Pierre, venu les rejoindre au maquis à son tour après une opération compliquée, là-bas, avec Bora. La supposition que Jungkook aurait pu être la taupe. Ça, non. C'était impossible, Jimin avait vu son regard, avait vu son combat, ses blessures, lorsque Jungkook était venu le sauver ce jour-là, au pont. Ce n'était pas lui.

Et, petit à petit, Jimin s'ouvrait, appréciait de plus en plus le temps passé avec Jungkook. A baiser avec lui, certes, mais aussi à rire, à discuter, à simplement marcher, ensemble.

Comme ici.

Entre eux le couple était perpétuellement effrayé, par un craquement de brindille, une cloche au loin, un animal qui fuyait.

Jimin tentait de les rassurer, souriait de réconfort, passait parfois un bras protecteur autour d'eux. Il voyait les remerciements dans leurs yeux, le soulagement de ne pas se sentir seuls. Cela devait déjà être si angoissant de penser à l'inconnu de l'après. L'après-frontière.

Résistances [yoonminkook]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant