Chapitre 1

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Comme tous les matins, je faisais la mise en place du bar - restaurant où je travaillais. J'y étais serveuse, et j'adorais mon métier. J'appréciais le contact avec la clientèle, l'adrénaline qui montait quand le service commençait, et la pression qui redescendait à la fin. Rentrer chez soi le soir épuisée et se dire qu'on a bien travaillé aujourd'hui.

Plongée dans mes pensées, je chantonnais en finissant de dresser les tables du restaurant, prête à affronter le coup de feu du midi.

"Pamelaaaa à table." M'appelait Steve, mon collègue.

"Dis donc est-ce que j'ai une tête à m'appeler Pamela vieille pute?" Ralais-je le sourire aux lèvres.

J'adorais Steve, au fil des mois, il était presque devenu mon meilleur ami. Il faut dire que passer presque 10 h par jour ensemble, ça créait forcément des liens. 

"Ta gueule et viens manger salope !"  

Je rigolais puis le rejoins à l'arrière-boutique, où nos patrons avaient préparé la table.

L'avantage de travailler dans la restauration, c'était les repas offerts par la maison. On mangeait la même chose que les clients, et c'était à chaque fois un vrai régal. En plus, s'il y avait des restes, les patrons nous autorisaient à les ramener chez soi, autant dire que mon budget nourriture n'était pas très élevé.

"Al' tu veux des pommes de terre ?" Me demandais Catherine, la patronne.

"Volontiers, mais pas beaucoup, j'ai pas très faim."

"Allons, il faut prendre des forces, aujourd'hui est une grosse journée." Insistait Patrick, son mari et co-gérant de l'entreprise.

Il s'agissait d'un restaurant familial, nous n'étions que 3 employés : Steve, serveur, Jean-Eude (de son vrai nom Martin), cuisinier, et moi-même, Alicia. Nous nous entendions tous très bien, Cat' et Pat', respectivement 56 et 58 ans, étaient un peu comme nos seconds parents, et Martin, 43 ans, était considéré comme un grand frère pour Steve et moi, 25 ans tous les deux.

"On a combien de résa' aujourd'hui?" Demandais-je en enfournant un morceau de poulet colombien.

"35 réservations, dont une de 12 personnes."

"Ça va piquer aujourd'hui." S'inquiétait Steve.

"Normal, on est samedi." Lâchait enfin Jean-Eude.

Ce surnom me faisait rire à chaque fois, Martin avait, malgré son âge, un train de vie de papi. Il ne sortait jamais, râlait à propos de la nouvelle génération, n'avait que très peu de technologie chez lui, préférant "un bon vieux livre ou le journal", selon ses mots. Sans compter ses magnifiques pantoufles à carreaux et son peignoir, ce qui terminait son super look de papi à la retraite.

Il n'était pas très bavard et assez introverti, ce qui expliquait quelque peu son choix pour la cuisine, où il ne voyait pas les clients, et où il travaillait seul avec Patrick.

Même s'il paraissait inoffensif au premier abord, Martin était fraîchement sorti de prison. Sa seule erreur fut de venger sa fille, qui s'était faite tabassée par son ex, il y a de ça quelques années. Ce dernier avait porté plainte pour coups et blessures, et voilà, la suite n'est qu'histoire. Lui évidemment, n'avait écopé que d'une simple amende. Allez comprendre la justice.

Les patrons connaissant bien la famille, lui avaient donné une seconde chance. Depuis, il n'a pas quitté cette cuisine, et ne la quitterait probablement qu'à l'heure de la retraite. Vraiment, ce restaurant était pour nous tous un refuge.

Mais trêve de rêverie, le service allait bientôt commencer. La table débarrassée et les tenues enfilées, les portes furent ouvertes, et j'installais les premiers clients. Parmi eux, il y avait nos habitués, présents tous les samedis à heure fixe. Certains avaient une routine bien en place, prenant toujours les mêmes plats et boissons dans le même ordre, payant toujours de la même façon.

Une Cliente MystérieuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant